Chapitre 18: invitation inattendue

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En entrant dans la salle à manger ce soir là, sous l'immense lustre aux milles chandelles, je fus surprise de ne pas trouver Charline et Mathilde au rez de chaussé à la table des autres Nymphes. Je les cherchais du regard dans le brouhaha des discussions et du cliquetis des fourchettes contre la porcelaine. Je les apercevais dans la mezzanine du premier étage à la table de Sam. Elles n'étaient que toutes les trois.

Une fois mon plateau plein, mes yeux passèrent de notre table habituelle à celle qu'elles occupaient plus haut, jusqu'à ce que Charline ne lève le bras très haut en hurlant pour surpasser le vacarme:

— Bleu! On est là!

C'était définitif, je ne me débarrasserais jamais de ce surnom.

Je montai les escaliers en tentant de ne rien reverser, saluai Alex et Nico à la table d'à côté et m'installai à table, entre Charline et la balustrade. Les filles étaient en grande discussion à propos des événements du weekend à venir. Selon leurs dires, le Nymphes vertes (dont Mathilde faisait partie) organisaient avec les Fenrir une grande fête dans la forêt. Cela ne me disait rien qui du tout. Il avait plu toute la semaine, il faisait froid et... L'idée de me balader en forêt la nuit était loin de me rassurer.

Charline insista.

— Allez, s'il te plait! ça nous changera des soirées à Tolane. En plus Mathilde y sera. Puis il y aura plein de Fenrirs super musclés qui vivent en forêt!

Alex, juste derrière elle, n'avait pas manqué d'entendre la remarque. Il fit basculer sa chaise en arrière pour se pencher entre elle et moi. Il imita le couinement d'un chien battu en me regardant avec ses yeux tout pleins de larmes. Voyant que je restais de marbre, il repris son sourire habituel, toujours en équilibre précaire sur les pieds arrières de sa chaise.

— Ta présence serait un plus mais si tu ne veux pas l'accompagner, je le ferais volontiers.

Charline lui accorda un sourire assortit d'un haussement de sourcils qui n'avait pas besoin de traduction. Il n'était donc plus nécessaire que je sacrifie mon weekend pour la sauver de la solitude. Du moins, jusqu'à ce que Sam insiste.

— S'il te plait Bleu, tu ne vas pas rester dans les jupes de ta mère toute te vie.

Je ne savais pas si c'était le fait que ce soit Sam qui réclame ma présence, l'évocation de ma mère ou le ton de défi qu'elle avait employé, mais je finis par accepter.

Le vendredi après-midi, le dernier cours de la semaine n'était autre que magie élémentaire. J'écoutais la leçon d'une oreille distraite. En effet, je passais l'essentiel de ces trois heures à expliquer à Alex que je n'avais aucune idée de comment m'habiller pour une fête en forêt.

Le professeur Sodiar me reprit à plusieurs reprises avant de requérir ma présence après que la cloche ait annoncé la fin de la semaine. Je restais donc assise sur mon fauteuil rabattable et Monsieur Sodiar vint poser son lourd postérieur sur l'accoudoir. Cette proximité soudaine me mit mal à l'aise, et à en juger par les grincements qu'il produisait sous le pois du professeur, l'accoudoir semblait du même avis.

— Ethyléne, commença-t-il, je suis surpris que vous soyez si peu attentive. Vous avez pourtant un grand potentiel. Une rumeur court à Emmerson, il parait que vous auriez réalisé une téléportation instantanée?

Ses yeux rouges et accusateurs me scrutaient. J'avais horreur qu'on appui une conversation du regard pour accaparer l'attention. Comme si écouter son interlocuteur devenait obligatoire. J'avais l'impression qu'on m'ordonnait d'être coopérative.

— Oui, en effet, cédai-je sous son regard insistant.

— C'est remarquable. Vous avez dû faire preuve d'un grand courage pour le tenter. Vos facultés semblent supérieures à celles de votre soeur. Avec un peu de travail, vous pourriez faire de grandes choses.

Sa voix n'était pas la même que celle qui adoptait en cours. Elle était calme et posée mais paraissait... Intéressée. Je ne savais jamais avec les Asimes si c'était eux qui parlaient ou leur part démoniaque. Un peu peureuse, je préférais écourter la conversation.

— Professeur Sodiar, je lance des éclairs quand il faut lancer des boules de feu, je suis tout juste moyenne en magie de l'air, et si j'ai réalisé cette téléportation ce n'est pas par courage, mais parce que j'étais terrorisée à l'idée d'affronter le garçon le plus fort de la classe et ses trois mètres de haut. Alors, capacités ou non, je ne pense pas qu'un jour je surpasserai ma soeur.

Il n'ajouta rien. J'en conclu que je pouvais partir. Je secouai la tête en sortant de l'amphithéâtre pour oublier cette conversation. Mon esprit n'avait aucune envie de se tracasser pour mes « potentielles capacités », je voulais me concentrer sur l'essentiel: comment allai-je m'habiller demain soir.

Emmerson école pour futurs Guerriers, Mages et DiplomatesTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang