7. Tragédie Shake's Pearienne

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"Quand il est sans remède, un chagrin est fini, et qui n'a plus d'espoir n'aura plus de regrets"
William Shakespeare

L'homme n'avait jamais cessé de tourner autour de l'inconstance des choses. Pour preuve, Oscar Wilde avait rédigé une pièce à ce sujet, L'importance d'être Constant, Adam Mickiewicz était à l'origine de la phrase « Qu'est-ce que la vie humaine en ce monde inconstant ? Rien qu'un instant », et Shakespeare avait écrit dans sa comédie Beaucoup de bruit pour rien,  « Ne vous moquez pas de mes contradictions, car l'homme est un être inconstant ».

Elizabeth Morgan était inconstante. C'était là bien crucial fait. Névrosée et même soupe-au-lait. Elle-même n'était pas sans l'ignorer.

Mais s'il existait bien une chose ici-bas, qui avait le mérite d'être aussi constant qu'inconstant, il ne pouvait en relever que de la mort, nuage de fumée tout de noir vêtu, traînant avec lui peurs et pleurs.

L’Homme fréquentait le deuil comme il fréquentait un vieil ami perdu de vue depuis bien des années. Avec appréhensions et questions pour la plupart, avec excitations et rédemptions pour d'autres. Tous pourtant, à peu de choses près, empruntaient les mêmes sentiers. Peut-être pas en même temps, peut-être pas pour la même raison, mais le chemin n'en restait pas moins semblable. Le deuil s'avérait tout aussi universel, que personnel. Il comportait, disait-on, cinq étapes. Le choc. La colère. Le marchandage. La tristesse. Et après coups, l’acceptation.

Elizabeth avait connu le choc. Et la tristesse. Elle se voyait désormais bloquée, quelque part au beau milieu d'émotions contraires. Elle était à elle seule un univers de poche. Fascinant, éprouvant, et incohérent.

— Dans deux semaines nous aborderons une nouvelle thématique, entonna le professeur. Tenez, si je vous parlais du Crime de L'Orient Express, ou bien du Chien des Baskerville, que me répondrez-vous ? Hercule Poirot et Sherlock Holmes, sans nul doute, je l'espère. Personnages célèbres de deux des plus productifs et brillants écrivains britanniques qu'ait recensé le dix-neuvième siècle ; Sir Conan Doyle et Agatha Christie. Nous allons comparer ces deux détectives à la réputation sans précédent et quitterons ainsi sans encombre le milieu plus ou moins paisible qu’est celui de la romance. Bien. À présent, je vais récupérer les poèmes que vous aviez à rédiger pour aujourd'hui.

Elle n'avait pas écrit de poèmes, elle. Elle, la fille aux poèmes. Elle lui avait pourtant et extra-scolairement rendu un carnet entier de poèmes, elle. Mais ce jour-ci, la fille un peu blême aux jolis poèmes ne l'était plus.

— Je m'entretiendrai avec vous dans quelques minutes, Mademoiselle Morgan, concéda-t-il. Tous, écoutez-moi un instant, je vous prie. Il y a un point important que j'ai oublié de mentionner avec vous le jour de la rentrée. Je suis contre le système des notes. Vous avez bien entendu oui. Comment ? Un professeur qui n'aime pas noter ses élèves ? Par la barbe de Merlin, serait-il malade ? pensez-vous probablement, et peut-être le suis-je, oui. Mais à bien y réfléchir, qu'est-ce qu'un A ? Un B ? Un C ? Rien de plus qu'un quelque chose qui vous fait vous comparer les uns aux autres, si vous voulez mon humble avis. Est-ce que votre note sera meilleure que celle de votre ami ? Sera-t-elle moins bonne ? Alors, c'est à cela que vous voulez que soit résumé votre travail ? Un essai « Admirable » ? Un exercice un peu « Benêt » ? Un devoir « Cocasse » ? Allons, allons, vous valez mieux que cela, enfin ! Est-ce vraiment ce que vous désirez entendre ? Que vous êtes capables de réécrire ce que l'on vous dicte, tels des robots ? Parce que c'est à cela que correspond une note ; ni plus, ni moins. D'ailleurs, vous admettrez bien volontiers que démunies de toute correction, celles-ci sont parfaitement inutiles.

Rendez-vous salle 209 Where stories live. Discover now