Chapitre 2

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Italie, Demetrio

Assis dans le fauteuil en cuir de mon bureau du cinquantième étage, j'attends impatiemment l'arrivée de mon détective privé et ami, Benvolio, qui vient de me téléphoner. Il y a deux mois, j'ai appris que les photos que j'ai reçues il y a deux ans et demi, montrant ma femme avec un autre homme, ne sont pas du tout ce que je croyais.

Depuis le début, je fais rechercher cet homme pour lui faire comprendre qu'il n'aurait jamais dû toucher ma femme. Cependant, comme son visage n'est visible, et seulement partiellement, que sur une seule photo, cela a pris un temps fou à mettre la main sur lui. Alors, il y a deux mois, quand Benvolio m'a donné son adresse, j'ai sauté dans mon jet privé direction la France. Sauf qu'après quelques intimidations, j'ai compris qu'il s'agissait du cousin de ma femme, que je n'avais jamais rencontré. Une violente colère dirigée contre moi-même m'a submergé. 

Je lui ai montré les photos et il m'a expliqué que ce jour-là, ils s'étaient croisés par hasard après deux ans sans nouvelle. J'ai bien entendu vérifié ses papiers pour m'assurer qu'il ne s'agissait pas d'une entourloupe mais l'homme disait vrai. 

Je replonge furtivement dans mes souvenirs. En y repensant, j'aurais préféré rencontrer cet homme dans d'autres circonstances. 

Il me tend sa carte d'identité avec un regard noir, compréhensible après les menaces que j'ai proférées.

- Tenez ! me dit-il sèchement.

J'attrape le document et lis.

Lucas DOWJKA né le 14 avril 2003 

Sans un mot de plus je quitte l'appartement, je sais ce qu'il me reste à faire.

Quand je reviens à la réalité, je suis envahi par la culpabilité, comme chaque jour depuis que j'ai appris la vérité. Ma femme ne m'a jamais trompé et moi l'imbécile le plus jaloux et impulsif de la terre, je l'ai traitée d'une manière impardonnable et je l'ai chassée. Alors depuis deux mois, j'attends que mon ami Benvolio la retrouve pour que je me fasse pardonner et avec un peu de chance que je la ramène à la maison. 

J'ai aussi découvert que les photos avaient été envoyées par une de mes anciennes maîtresses  qui était jalouse. Un jour elle est venue à mon bureau pour essayer de me séduire et a avoué, pensant que j'avais tiré un trait sur Léa et que je lui donnerais raison, qu'elle était à l'origine de ma séparation. Enragé, je l'ai fait arrêter et elle ne nuira plus à mon bonheur, si tant est que je le retrouve.

Quelques coups sont portés et je sais que Benvolio est arrivé avec les réponses que j'attends. Je lui dis d'entrer, il s'avance et s'assoit en face de moi, me tendant un dossier bleu. Mon cœur bat à cent à l'heure et résonne contre mes tempes. 

Qu'est-elle devenue ? Est-ce qu'elle va bien ? A-t-elle refait sa vie ?

- Bonjour Dem', tu risques d'être surpris, me dit mon ami, je vais te laisser lire ça au calme. Je pense que tu as besoin d'être seul.

- Pourquoi dis-tu cela ? Elle va bien ? Enfin, merci Ben, je te revaudrai ça !

Benvolio se lève, me serre la main et part, me laissant avec les réponses à mes questions entre les mains.

Incapable d'attendre plus longtemps j'ouvre le dossier et la première chose que je vois est une photo de ma belle. Elle est toujours aussi magnifique avec ses cheveux châtains et ses yeux de couleur changeante. Selon l'intensité lumineuse, ils sont bleus, verts ou bien gris, à la limite de la transparence. Son corps est splendide même s'il a pris quelques rondeurs. C'est une invitation aux caresses et à la luxure. Je me rappelle de son corps entre mes mains, se cambrant sous le plaisir. Je me souviens de ses cheveux éparpillés sur l'oreiller et son souffle erratique après l'orgasme. Ses gémissements et ses soupirs étaient pour moi la plus belle mélodie et j'ai envie de me frapper pour m'être privé d'elle et des bruits de son corps et surtout, je m'en veux de lui avoir fait du mal.

Je repose la photo et commence à lire le compte-rendu. D'après celui-ci, elle est retournée vivre dans le Jura. Quel idiot ! J'aurais dû m'en douter. Elle travaille comme guide touristique. Je souris parce qu'elle a réussi à faire le métier qu'elle aime. 

Ensuite quelques informations médicales sans grande importance jusqu'à une phrase qui vient de bouleverser ma vie.

" Léa Dowjka a accouché le 23 mai 2024 de jumeaux : Emilio Dowjka et Livio Dowjka nés à 22h41 et 23h17."

Mes battements de cœur redoublent d'intensité à tel point que j'ai l'impression que mon palpitant veut s'échapper. Mon souffle se coupe alors qu'une rage dévastatrice monte en moi. Qu'est-ce-que j'ai fait, putain ? Je pousse un rugissement et balaye tout ce qui se trouve sur mon bureau. Je suis incapable de me contrôler.

J'ai abandonné ma femme, je l'ai répudiée alors qu'elle portait mes enfants. Je l'ai laissée vivre sa grossesse toute seule, je l'ai laissée affronter la nouvelle toute seule, sans moyen de me contacter. Elle a dû accoucher, souffrir, avoir peur toute seule, parce que je suis le pire des salauds. A ce moment-là, je me déteste, j'aurais dû être là pour l'aider, pour la soutenir, merde !

La femme de ma vie a donné naissance à mes fils et je n'étais pas là.

Rayons de soleilWhere stories live. Discover now