Chapitre 23

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Holly

En franchissant le pas de la porte de l'appartement des Davis, mon cœur s'arrête. Je crois n'avoir jamais vu un lieu si sublime que celui-ci. Les magnifiques baies vitrées encerclant la pièce principale offre une vue à couper le souffle sur Central Park ainsi que sur les immeubles alentours tout en baignant l'appartement d'une splendide luminosité. L'heure tardive fait incroyablement ressortir les époustouflantes illuminations des autres buildings, emplissant le salon de lumières diverses. Elles semblent se refléter dans la pièce, emplissant mon corps de divins scintillements.

— C'est... magnifique !

Monsieur Davis affiche un large sourire tout en se saisissant de mon épais manteau. Le carrelage blanc couvrant le sol de l'appartement est impeccable, si bien que j'hésite, l'espace d'un instant, à me débarrasser de mes baskets. Tout dans cette pièce semble avoir été déposé avec minutie, à vrai dire l'endroit semble tout droit sorti d'un de ces catalogues de décoration.

— Merci, Holly. Je t'en prie, fais comme chez toi, je vais chercher Henry.

Mon patron passe sa main dans ses cheveux bruns impeccablement cirés avant de quitter la pièce. Entendant dans mon dos des bruits de talons claquer contre le sol, je fais volte-face, tombant nez à nez avec une jolie blonde aux yeux d'un sublime bleu azur. Moi qui pensais que monsieur Davis était le portrait craché du petit Henry, je me suis visiblement trompée. La femme perchée sur ses talons est magnifique, l'innocence lisible sur son visage est époustouflante. Elle n'a rien à voir avec les mannequins cadavériques accompagnant souvent les hommes riches, et son petit côté enfantin malgré sa courte robe verte lui apporte un charme divin. Souriante à son arrivée dans le salon, cette dernière blêmit à la seconde où elle arrive à ma hauteur.

— Tu es... pardon, je manque à mes principes, enchantée, je suis Rebecca, la femme de Ian.

Sa mine penaude me fait presque rire, ou plutôt son expression plus que comparable à celle de son fils à la seconde où il a posé les yeux sur moi ce matin.

— Enchantée, Holly Jensen.

Je sens qu'elle meurt d'envie de me poser la question, je sens que savoir la vérité la démange. Je peux le voir à sa manière de basculer d'un pied sur l'autre, se mordillant la lèvre comme pour ne pas laisser échapper une bêtise.

— T'as vu maman, c'est l'amoureuse du garçon aux bras dessinés !

La joie d'Henry est presque communicative. J'ai envie de m'esclaffer de rire en entendant la description de Kerian. Le garçon aux bras dessinés ! L'innocence des enfants est toujours parvenu à faire fondre mon cœur.

— Henry, ce n'est pas son amoureuse.

Rebecca vire au cramoisie tandis que son fils se met à glousser.

— Excuse-le, il est encore jeune ! J'espère que sa remarque ne t'a pas...

La confusion de la femme aux cheveux blonds me touche. Je ne peux qu'imaginer ce que Kerian a bien pu lui raconter sur moi, le connaissant il a sûrement dû me couvrir d'éloges, si bien que je deviens rapidement gênée à la simple idée d'y penser.

— Non, pas du tout.

La jeune femme affiche un radieux sourire.

— Alors vous l'avez croisé ?

Comment est-ce qu'elle peut bien le savoir ? Est-ce que son mari lui aurait confié le fait qu'il soit l'objet de mon article ? J'en doute fort. Et le sourire malicieux se dessinant sur son doux minois m'en apporte la preuve.

— Par hasard. J'ai dû l'interviewer pour un article.

Au fond, je sais pertinemment que tout ça n'a rien à voir avec le hasard, que la seule et unique responsable de cette rencontre inopinée est Cherry, pensant réduire à néant ma carrière. Mais il est hors de question que je ne livre à la femme en face de moi les problèmes que j'entretiens avec mes collègues !

— Chérie, le hasard n'existe pas.

Sa mine malicieuse me fait presque rire. Rebecca Davis dépose délicatement sa main sur ma joue, caressant adorablement ma chaire rose. Cette femme est adorable, je crois avoir rarement eu en face de moi une jeune femme si douce et attendrissante.

— Ian... je veux dire... monsieur Davis, m'a confié que vous aviez aussi vécus une histoire compliquée.

— Ian est une sacré pipelette ! Glousse-t-elle, mais c'est exact. Tu vas trouver ça étrange mais... je me retrouve un peu en toi.

— En moi ?

Rebecca m'attire dans la sublime cuisine américaine tandis qu'elle laisse Henry jouer dans le salon. Elle m'épie de haut en bas, un large sourire aux lèvres puis se décide enfin à répliquer.

— Je ne sais pas, ton innocence me rappelle moi à ton âge ! Tu as l'air si fragile et en même temps si forte. On peut voir dans ton regard que tu as souffert, et que tu souffres toujours mais le plus étrange, c'est que, depuis que tu es arrivée, le seul moment ou ton regard s'est illuminé, c'est quand Henry a évoqué ce garçon.

Je me sens virer au cramoisie à l'entente de sa réponse.

— J'ai détesté Ian durant des mois avant que je ne me décide à lui laisser une nouvelle chance. Avant qu'on ne trouve à nouveau notre juste milieu.

— L'infime entre-deux que seuls deux âmes-sœurs sont capables de maîtriser, je murmure.

— Je vois que Ian t'a parlé de mon petit credo !

Nous gloussons tandis que l'homme aux cheveux d'un noir corbeaux fait irruption dans la cuisine, un large sourire aux lèvres. Son costard est sublime et une agréable senteur fruitée empli la pièce à la seconde ou il nous y rejoint.

— Laissez-moi deviner, vous parliez de moi ?

— Evidemment chéri ! Je n'ai aucun autre sujet de discussion que celui du grand Ian Davis !

Je ne peux m'empêcher de pouffer de rire. Ces deux-là sont si adorables, ils sont de toute évidence faits pour être ensemble, et voir deux personnes partageant un amour si fort empli mon cœur de joie. Je ne peux m'empêcher de me demander ou Kerian et moi pourrions nous trouver, à cet instant précis, s'il n'était pas parti. Si cette histoire aurait pu durer, ou bien si nous aurions continué nos chemins chacun de notre côté.

— Trêve de plaisanterie, nous allons être en retard.

Rebecca acquiesce d'un signe de tête tandis que son mari me prend dans ses bras avant d'une nouvelle fois me remercier de m'être déplacée.

— Réfléchis à ce credo, Holly. Si il est encore là, c'est peut-être pour une bonne raison.

La femme embrasse chaleureusement ma joue puis rejoint Henry dans le salon, me laissant seule dans l'immense pièce. Je ne peux m'empêcher de penser à ce fameux credo, et si elle avait raison ? S'il ne s'était pas trouvé là par hasard ? Et plus je me triture la cervelle, plus je me demande ce qu'il peut bien faire, en ce moment même. Et si cette altercation avec Leo avait éveillé son idée de quitter New-York pour retourner en France ? Et s'il se trouvait déjà dans un avion, et si je ne venais jamais à le revoir ? Mon cœur se resserre. Je sais que je ne devrais pas ressentir tout ça, les barrières que je me suis fixées ces dernières années me l'interdisent, mais plus les jours passent, et plus il me devient difficile de maintenir ces barrières.

Soulmate - Tome 3Where stories live. Discover now