Chapitre 25

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Holly

Alors que je fais les cent pas dans la salle de bain, attendant que la conversation d'Henry et Kerian prennent fin, une centaines de questions se bouscules dans ma tête : et s'il venait ? Non, c'est impossible, il ne pourra jamais deviner l'adresse des Davis. Et s'il se pointait chez moi, attendant mon retour ? Là, je ne trouve pas de contre argument pour calmer ma crainte. Je n'ai aucune idée de ce que je ressens à cet instant précis. Est-ce que j'ai réellement envie de le fuir ? J'en doute fort. Ce qui me fait le plus peur à cet instant précis est ma réaction si je venais à le croiser. Est-ce que je serais capable de le repousser encore longtemps ? Plus les jours passent, et plus l'envie de le tenir loin de moi s'amenuise. Comment est-ce possible qu'il parvienne encore à avoir un tel impact sur moi après toutes ces années ? Il a suffit qu'il pointe de nouveau le bout de son nez pour que ma vie prenne un virage à quatre-vingt-dix degrés, pour que tout se bouscule dans mon esprit, pour que mon corps tout entier en soit chamboulé; tout ça, au détriment de la nouvelle vie que je m'étais construite, au détriment de ma relation avec Leo, et par dessus-tout, au détriment des promesses que je m'étais moi-même formulée à la seconde ou il m'a abandonnée.

- Holly ! Roucoule Henry à travers la porte.

A la seconde ou j'ouvre la porte de la salle de bain, je tombe nez à nez avec le petit blond à la coupe au bol. Son large sourire satisfait ne m'inspire rien de bon.

- Tu as fini de lui parler ?

- Oui ! Il arrive, il m'a dit qu'il viendrait me faire le dessin de la rose !

Cette fois, son ton enjoué ne me fait pas le moins du monde sourire, et il me faut moins d'une seconde pour réaliser ce que cela signifie ; Kerian s'est servi d'Henry pour obtenir l'adresse des Davis et désormais, le voilà en route pour me rejoindre. Mon cœur s'arrête et mon crâne me fait un mal de chien. Je ne peux pas lui ouvrir, je ne peux pas me retrouver face à lui en dépit l'envie de le faire. Je ne peux pas redevenir faible.

- Pourquoi est-ce que tu pleures, Holly ?

Le garçonnet agrippe le tissu de mon jean avant de caresser adroitement ma jambe. Repoussant une larme perlant sur ma joue, je quitte enfin la salle de bain pour aller m'affaler sur le canapé, suivie de près par le petit Henry.

- Tu vas me disputer parce-que je lui ai donné l'adresse ?

Il fait la moue, grimpant difficilement sur le haut canapé et déposant sa petite tête blonde sur mes cuisses.

- Non. Je... je dois juste réfléchir.

- Le garçon a l'air amoureux de toi, pour te vrai.

Son ton enfantin me fait cette fois beaucoup rire.

- Comment est-ce que tu peux en être sûr ?

C'est vrai, comment est-ce qu'un gosse âgé de moins de six ans peut-il bien être sûr d'une telle chose ? Il ne connaît rien à l'amour à l'amour, et il connaît encore moins mon histoire. Lui raconter une telle chose briserai en éclat tous ses idylliques rêves de gosses concernant l'amour !

- Parce-que dans l'avion, maman a dit que le garçon et toi ressembliez beaucoup à papa et elle. Et ils sont toujours amoureux, ils m'ont même eu moi ! Alors... le garçon doit être amoureux comme papa.

Son innocence me touche en plein cœur, j'aimerais tant pouvoir penser de la même manière que lui, me dire qu'il ne s'acharne pas à vouloir me récupérer pour rien, je souhaiterais plus que tout pouvoir croire en ses belles paroles et lui offrir à nouveau mon cœur sans la moindre crainte. Au fond de moi, j'aurais aimé rester cette fille naïve de l'époque.

Les minutes passent, et je ne parviens pas à calmer mon angoisse; faisant les cent pas au beau milieu du salon, je ne peux m'empêcher de me demander ce qu'il peut bien avoir à me dire. Et s'il venait me reparler de Leo, et si, tout ce qu'il venait faire ici, était me reprocher de lui avoir caché le fait que Leo et moi étions ensemble ? Je ne supporterai pas une autre dispute avec Kerian, de la même manière que je ne supporterai pas de m'effondrer à nouveau devant lui. Et à la seconde ou on sonne à la porte, mon angoisse s'intensifie. Ma respiration est si saccadée qu'il me devient de plus en plus difficile de respirer normalement. La moindre parcelle de mon corps tremble, si bien que je ne parviens pas à retenir Henry, s'élançant en courant contre la porte de l'entrée.

- C'est lui ! Il est là !

J'ai du mal à comprendre sa joie à l'idée de revoir Kerian. Je doute fort que mon ex petit-ami se soit montré sous son meilleur jour lors de leur première rencontre ! Kerian a toujours détesté les enfants, et il leur a toujours bien fait comprendre cette forme d'aversion.

Lorsque je rejoins enfin Henry dans l'entrée, les jambes toujours tremblantes, Kerian se trouve planté devant la porte, le regard vide de tout sentiment. Cette inertie change à la seconde ou l'immense blond aux tatouages dépose son regard sur moi ; je peux, à cet instant précis, lire une forme de soulagement mêlé à de la honte. J'espère qu'il se sent honteux d'avoir usé de la naïveté d'un enfant pour récupérer cette adresse !

- Tu n'est qu'un idiot, Kerian.

Un léger sourire lui monte aux lèvres. C'est pas vrai, est-ce qu'il est heureux que je le traite d'idiot ? Ce type est définitivement bon à enfermer !

- J'avais besoin de te voir.

Toujours planté devant la porte, il n'a toujours pas mis à pied à l'intérieur de l'appartement. Comme s'il attendait mon feu vert pour y pénétrer. Je ne peux, en revanche, pas m'empêcher de rire en voyant le petit Henry, agrippant fermement sa longue jambe. Il semble si heureux d'avoir Kerian face à lui, si bien que je n'ai pas le cœur à le mettre à la porte.

- Entre, avant que je ne change d'avis.

Henry sautille de joie avant d'agripper la main de Kerian pour le tirer jusqu'au salon ou ces derniers s'avachissent sur le canapé. Je ne peux pas y croire, je ne peux pas croire que je viens de laisser Kerian entrer chez les Davis ; Ian et Rebecca m'en voudraient assurément ! Mais pour le moment, je ne parviens qu'à penser à une chose : ce que Kerian peut bien avoir à me dire, la raison de son besoin si pressent de me voir.
En voyant Henry, riant à gorge déployée tandis que le grand blond lui raconte je ne sais quoi, mon cœur se resserre. Comment un type faisant tout pour se faire détester de tout le monde peut-il bien apporter tant de bonheur autour de lui ? Comment un type haïssant la terre entière peut-il bien en être tant adulé ? Tout chez lui s'avère détestable ; son égoïsme tout comme sa vulgarité et sa violence devraient rebuter quiconque a le malheur de l'approcher, ses mensonge ainsi que son insensibilité et son apathie devraient tous nous repousser. Et pourtant, il semblerai que quelque-chose chez lui attire jusqu'à la moindre personne ayant croisé sa route, un divin aura obligeant quiconque à fermer les yeux sur tous ses défauts. Comme si, le simple fait de détester la vie, l'avait poussé à en devenir l'être favori.

Soulmate - Tome 3Where stories live. Discover now