Chapitre 15

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Nous revîmes tous au studio dès le lendemain, malgré la cuite de chacun. Avec Damiano, malgré le fait que nous avions tout deux faillit craquer, nous prétendîmes que rien ne s'était passé. Les autres ont tous joué le jeu, et personne ne nous a relancé sur ce sujet. J'avais touché un mot de ce pari à Esther, et vu le regard de Thomas hier, je pense qu'il est également au courant !
Mais cela ne me dérange pas qu'elle lui en ait parlé, prendre ce défi trop personnellement aurait déjà été un signe de faiblesse de ma part ! Au contraire, ça me fait rire. Ça décrédibilise quelque chose que j'aurais bien trop prit au sérieux autrement.
La journée fut tranquille, et les paparazzis moins nombreux. Je me sens revivre.
Je rentrais chez moi un peu plus tôt que prévu, car je voulais me prendre un dernier rendez-vous chez le médecin, afin de vérifier que tout allait bien depuis mon agression au début de la tournée.
Je préfère me comporter comme si elle n'avait jamais eut lieu, pour ne pas inquiéter les autres et les faire culpabiliser. Mais au fond de moi, je sais que je ne parviendrais jamais à l'oublier complètement. Chaque nuit, quand je ferme les yeux, la scène se rejoue. Mais j'en suis spectatrice, non actrice, et je suis comme flottante au dessus de mon enveloppe charnelle, obligée de regarder cet horrible spectacle. Ces images me hantent. Les questions aussi.
Pourquoi moi ? Quel concours de circonstances et de hasard a œuvré ce soir la ? Que se serait-il passé si Dam n'était pas intervenu ? Serais-je restée seule, agonisante pendant des heures infinies ? Je finis toujours par ensuite sombrer dans un sommeil sans rêve, assombrit par mes tristes pensées.
Je sort du bâtiment abritant le studio aux alentours de 17h. J'arpente les rues de Rome à pieds, à la recherche du cabinet de mon médecin.
La consultation se passe bien, et il m'indique que mon corps s'est totalement remis de cette agression.
- Mais, madame, au delà de la blessure physique, qui, la plupart du temps, se règle en peu de temps, la guérison des séquelles psychologiques n'est pas aussi rapide. Je ne connais pas votre point de vue dessus. Et je ne suis pas la personne qu'il vous faut dans ce cas. Mais je peux vous adresser à un de mes confrères psychologue. Bien sûr, c'est vous qui décidez, en fonction de ce que vous ressentez !

Sa déclaration me laissa sans mot. Malgré mes cauchemars et visons récurrentes, je ne m'étais jamais posée la question quand à un suivi médical. Les larmes commencèrent à me piquer le coin des yeux.
- Oui, je crois que c'est une bonne idée. Merci beaucoup.
La consultation se finit ainsi, avec dans la poche la carte de visite d'un psychologue exerçant non loin de chez moi. Je l'appelais directement rentrée chez moi, et un rendez-vous fut fixe la semaine prochaine. Cela me rassurait et me soulageait.
À vingt-et-une heures,alors que je venais de sortir de ma douche, on toqua à mon balcon.
- Anna ! Ouvre moi !
J'étirais un sourire en coin. J'enfilais des vêtements à la va-vite, et courus lui ouvrir.
- Je ne rentre pas, mais je voulais te demander si toi tu voulais rentrer chez moi. Un pote vient de m'offrir une belle caisse de Limoncello et je me suis dis que ça serait sympa de déguster ça entre voisin.
Il insista bien sur le mot voisin.
- Oh mais bien volontiers ! Je te rejoins de suite.
- Super, mais l'entrée se fait par balcon. Tu vas devoir faire comme moi. Pas de porte.
- Pas de soucis, j'ai peut-être des talents d'escalade cachés !
Je le suivis alors par mon balcon, et enjambait le mince espace vide qui le séparait du sien. Il s'apprêtait à me réceptionner, les bras écartés en prévision de ma chute. Qui n'arriva jamais, car j'atterris sur le sol encore mieux que lui.
- Alors, pas trop jaloux ? J'y arrive encore mieux que toi.
- La chance du débutant...

Il m'invita à rentrer dans son appartement, dans lequel je n'étais que peu de fois venue. Les murs étaient assez sobres, mis à part une immense affiche étant en réalité un collage géant de tous les groupes et artistes qu'il idolâtrait. La surface était assez grande, j'aurais dit une centaine de mètres carré, pour une personne habitant seul.
Je lui fit remarquer, ce à quoi il me répondit :
- Je sais, mais j'ai racheté l'appartement à mes parents alors qu'ils voulaient le vendre.
C'est vrai, l'histoire me revenait en tête. Il me l'avait relaté alors que je venais de m'apercevoir que nous étions voisins, en octobre ou novembre probablement. Et nous étions déjà direction fin août. L'année avait filée à une vitesse folle. Déjà un an que je connaissais mes amis ? Cela dit, j'ai l'impression qu'ils ont toujours fait partis de ma vie.
Avec Dam, on passa donc la soirée à boire son alcool fraîchement reçu, tout en refaisant le monde. Une chose que j'appréciais grandement chez lui était, qu'en plus d'être rockstar, c'était quelqu'un de très intelligent et cultivé. On pouvait avec lui discuter littérature, cinéma et politique.
Au bout du troisième verre de Limoncello, je me décidais à m'arrêter là :
- Depuis qu'on se connaît, je n'ai jamais bu autant d'alcool de toute ma vie. Il faudrait peut-être que j'espace un peu, avant de devenir une vrai alcoolique, riais-je.
- Surtout que tu n'as que 18 ans, ton foie est encore un novice. Le mien, à 22 ans passé, est surentraîné.
Sur ce, pour parfaire sa remarque, il me fit un thé :
- Espèce de sacoche, c'est fini maintenant. On passe à la tisane.
- Bientôt 19 ans, abuse pas.
Alors que, nous étions occupés à rire, je reçu un mail sur mon téléphone. Cela ne m'intrigua pas plus que ça sur l'instant, mais ce fut lorsque je vis l'expéditeur du message que mon cœur loupa un battement.
Ma mère. Ma mère, avec qui je n'avais pas eu de contact depuis plus d'un an et demi, qui m'avait envoyé un mail. Cela n'annonçait rien de bon. Dam remarqua ce changement d'humeur sur mon visage.
- Ça va ?
- Attend, je vais m'asseoir sur le canapé deux minutes, si ça ne te dérange pas.
Il m'y accompagna, le regard inquisiteur. J'ouvris la notification.

De : mariepierre.*****@gmail.com
À :   anna240501@gmail.com
Objet : Appartement

Anna,
Je t'écris au sujet de l'appartement ainsi que des moyens que nous t'avons fournis à tes 18 ans. J'ai appris par des connaissances que tu avais visiblement fait la une de tous ces magazines people en t'affichant avec ce type d'un groupe dévergondé. Je n'en ai pas grand chose faire, si ce n'est que pour ton honneur. Mais je me suis faite une réflexion, avec ton père, à ce sujet. Comme tu le sais, et j'espère que tu ne l'as pas oublié, nous t'avons donné une somme importante à ta majorité afin que tu puisses faire ta vie seule. La une de ces journaux a du, je l'imagine, te faire gagner suffisamment d'argent pour que tu nous rembourses le crédit de ton logement ainsi que cette somme d'argent. Ton père et moi souhaitons s'acheter un nouvel appartement en Suisse, et ton indépendance ne sera qu'officielle lorsque tu nous auras remboursé ce que tu nous doit. J'ai appelé le notaire hier. Tu es invitée à nous rejoindre chez lui samedi prochain.

Marie-Pierre.

Ma main resta ballante, et mon téléphone glissa par terre. Je n'arrivais plus à parler. Damiano s'empara, avec mon accord silencieux, de mon téléphone tombé au sol. Au fur et à mesure qu'il avançait dans sa lecture, son visage devint de plus en plus blême. Avant qu'il ouvre la bouche, je me concentrais pour arriver à formuler une phrase sans bégayer :
- Mes parents. Je crois que je t'avais déjà raconté très vite le principal les concernant. Je ne sais pas quoi faire. Je n'ai pas cet argent. Et je ne veux pas qu'on m'en donne, lui dis-je, sachant très bien ce qu'il allait répliquer.
Je tentais de me lever, mais le choc était si grand que je titubais pour finalement me rasseoir.
- Alors laisse nous au moins te trouver un avocat. Il est hors de question que tu te fasses avoir comme ça. Viens, on retourne au studio. Là-bas, j'appelle le manager, et lui demande d'en trouver un immédiatement. Le meilleur possible. La dessus, je ne veux aucune négociation de ta part ! Le manager s'occupe de payer intégralement les frais ! Anna, tu fais partie du groupe, maintenant. T'es bien plus qu'une amie pour nous tous. Il est hors de question qu'on te laisse seule là dedans.

Sans un mot, je le serrais contre moi. Il me rendit mon étreinte. Sans apercevoir son visage, et malgré le drame qu'était la situation dans laquelle j'étais, je savais ce qu'il allait dire.
Avec un pâle sourire que je parvins tout de même à esquisser, je lui répliquais avant même qu'il n'eut pu ouvrir la bouche :
- C'est une exception. On a dit qu'on ne refoulais pas nos sentiments. Et si je me sens super redevable et que j'ai envie de te faire comprendre combien je te remercie et combien le geste me touche, je le fais.
Pour toute réponse, il me serra encore plus fort contre lui. Son odeur de cologne m'emplit les narines.
Nous nous dépêchâmes ensuite de nous rendre au studio, pour téléphoner au manager. Il fut légèrement retissant au début, mais l'insistance de Damiano le fit vite céder.
- Je vais faire tout mon possible, mademoiselle. Je vous avoue que ce n'est pas mon rôle premier, m'occuper des affaires juridiques et familiales des amis de mes poulains, mais j'ai conscience  de la place importante que vous tenez au sein du groupe. Alors je vais le faire. Dès demain, mon avocat le plus renommé enverra un message au notaire de vos parents. Il va faire en sorte que vous n'ayez aucune dettes financières et immobilières à leur rendre . Une fois le procès gagné, il le sera j'en suis sûr et certain, vous serez désormais totalement indépendante d'eux.
- Mille merci, monsieur. Merci infiniment.
J'appelais ensuite tour à tour tout le groupe, ainsi que Esther, afin qu'ils nous rejoignent au studio.
- Merci encore Dam.
Son bras pressa mon épaule, et il répliqua avant que je n'eus le temps de le faire :
- C'est une exception. On a dit qu'on ne refoulais pas nos sentiments. Et si je me sens super redevable et que j'ai envie de te faire comprendre combien je te remercie et combien le geste me touche, je le fais.
- Redevable de quoi ? lui dis-je en riant.
- De tout.
- Je n'ai pourtant rien fait.
- Au contraire, Ann'. Au contraire.
Puis son bras relâcha son étreinte et il quitta la pièce, la réponse à ma question me laissant perplexe.
- Je reviens dans 10minutes, les autres ne vont pas tarder !

Métro, boulot, Damiano Where stories live. Discover now