Épilogue

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Un an plus tard

Depuis les coulisses, j'entendais les hurlements de la foule surexcitée.
- Allez, dépêche toi ! me supplia Dam, trépignant alors que je terminais d'appliquer du khôl sous ses paupières.
- Roh, attend deux petites secondes de plus... Voilà ! Tu es fin prêt.
- Merci ! Je me dépêche, tout le monde n'attend plus que moi, me dit-il en soulignant ses propos d'un clin d'œil appuyé.
Il me donna un rapide baiser sur les lèvres et partit en courant vers la scène en m'adressant un dernier signe de la main. Tous les autres membres du groupe étaient déjà derrière la tenture qui les séparait de la foule en délire.
Esther et moi assistions au concert, comme à chaque fois, depuis le derrière de ce rideau. Et quand Dam, une fois sur scène, se mettait à hurler et à sauter de partout, il nous arrivait parfois de croiser nos regards. Mon cœur battait un peu plus vite lors de ces instants. Le sien aussi, je crois.
- Le dernier avant les vacances, soupira Esther à côté de moi, exténuée mais heureuse. Un an que l'on enchaîne tournées, festivals et concerts, je n'en peux plus, rit-elle.
-  Moi aussi, je commence à fatiguer. Mais on a pas le choix !
Il est vrai que nous aurions pu choisir de rester chez nous ce soir, ainsi que tous les autres nuits de concerts ; mais depuis que madame Bialetti, la nouvelle manageuse du groupe, s'était débrouillée pour nous engager définitivement au sein de l'équipe, nous ne pouvions plus refuser ! Mais c'était loin de nous déplaire : j'étais à présent la chargée de communication officielle et Esther assistait Bialetti dans son travail. 
Ainsi, nous passions la plupart du temps avec elle, ainsi qu'avec le groupe ; jamais nous n'aurions pu rêvé d'un meilleur job.
Madame Bialetti, comme Dam nous l'avait dit peu avant son arrivée, est une crème. Tout se passe pour le mieux avec elle. Quant à notre ancien manager, tous ses chefs d'accusation l'ont conduits à une peine de quinze ans de prison, dont cinq avec sursis. Nous nous attendions à un peu plus, mais cela signifie tout de même que nous avions la paix pour un bon moment.
Les rideaux se levèrent. Vic, Thomas, Ethan et Dam apparurent au public. Les cris d'impatience se transformèrent en hurlements. Ethan tapa quatre fois ses baguettes ensemble pour marquer le rythme ; et les premières notes de Zitti e Buoni résonnèrent dans toute la salle.
Comme d'habitude, le concert fut formidable et dégagea une énergie folle. Dam était déjà torse nu et couvert de sueur à la troisième chanson.
Esther n'avait d'yeux que pour Thomas, qui semblait secoué par des spasmes quand il était temps d'un solo.
Au bout de deux heures et demi de concert déchaîné, les lumières se tamisèrent et le quatuor disparu derrière une brume noire.
Ils débarquèrent en hurlant dans les coulisses :
- Yeah ! hurla Vic en me prenant le bras pour me faire danser avec elle. On a été exceptionnels !
- T'as assuré Vic ! Je suis super fière de vous.
Il est vrai que ce que je ressentais pour eux était bien plus que de la fierté. Dès la sortie du nouvel album, une semaine avant le début de la tournée de l'été dernier, Måneskin avait reprit la tête des charts internationales le premier jour. Encore plus adulés qu'avant, ils n'avaient plus une minute pour eux. Mais puisque en tant que membres officielles de l'équipe, Esther et moi pouvions les accompagner lors de leurs déplacements. Nous vivions littéralement la vie de rêve.
Tous se démaquillèrent et se changèrent, puis nous partîmes prendre un verre ensemble, au cœur de la nuit florentine, où le dernier concert avant cet été s'était déroulé.
En chemin pour le bar, Dam me prit la main.
- Je suis vraiment content que l'on puisse s'offrir une pause. Cette année passée a été vraiment crevante, et on a eu peu de temps ensemble...
- Tu rigoles ? Maintenant que l'on vous suit de partout, tu ne peux pas dire ça, ris-je. Mais oui, je comprends ce que tu veux dire. Moi aussi, j'ai hâte.
Il m'embrassa longtemps le sommet du crâne, et je posais ma tête sur son épaule en y enfouissant ma tête. Son bras se resserra autour de moi.
- Tu te souviens du pari ? lui demandais-je soudain.
- Le pari ?
- Oui, le pari. On se l'était fixé lors de la première tournée, il y'a quasiment deux ans, tu te rappelles ?
- Oh oui, c'est vrai ! Que le premier qui tombait amoureux avait perdu ?
- Oui.
- Je dirais que l'on est à égalité, non ?
- Quoi ? ris-je. C'est toi qui t'es déclaré en premier, menteur.
- Hein ? Menteur... C'était synchronisé !
- Mouais... Je ne te le concède pas vraiment.
- Bon, j'assume alors. Mais seulement parce-que je suis le mec le plus parfait qui n'est jamais existé, et que je ferais tout pour ne pas heurter l'ego de ma dulcinée, me répondit-il d'un ton faussement hautain.
J'explosais de rire.
- Surtout parce-que tu es bien trop épris de moi, lui répliquais-je sur le même ton.
- C'est possible.
Je ris une seconde fois, et lui répondit.
- C'est la seule chose sur laquelle on est à égalité dans ce pari, je crois.
Nos éclats de rire se mêlèrent, tandis qu'il resserra son bras autour de moi.

Quelques mètres devant nous se trouvaient Thomas et Esther, toujours amoureux comme au premier jour, ainsi que, nouveauté, Vic et Ethan. Mon pressentiment l'année dernière ne m'avait pas trompée... Mais nous étions tous très heureux pour eux, ils étaient parfaitement assortis et s'entendaient à merveille.
Nous nous assîmes à la première terrasse que nous vîmes, et nous prîmes tous, oh surprise, un Limoncello.
Le temps semblait toujours s'accélérer dans ces moments là. Mais cela ne m'effrayait pas, non. Au contraire. Je savais qu'il y'en aurait toujours un autre ensuite, qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il vente. Que peut importe les intempéries, nous avions déjà survécus au pire.
Que ma vie ne serait, comme pour tous mes amis, jamais autre que celle que nous vivions maintenant. Que jamais nous n'avions goûté à un bonheur pareil auparavant, et que pour rien au monde nous ne changerions quoi que ce soit. Notre place était là. Et nul part ailleurs. Tous les six ; ensemble, amoureux, artistes, jeunes, innocents, naïfs, mais surtout heureux.
Heureux oui, c'était cela. Nous étions tous heureux, c'était au final la seule chose qui comptait réellement. Le reste n'était que matériel. Nous étions heureux.

Métro, boulot, Damiano Where stories live. Discover now