42 | Secondes Perdues

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Dès son retour dans l'habitacle, Margrethe eut du mal à cacher son angoisse. Loin d'être rassurée par le comportement de son amie, qui se contentait de demeurer muette, la Viking s'évertuait à lui arracher les quelques bribes d'informations qu'Édith voulait bien lui concéder. Répétant plusieurs fois sans y croire que la situation était sous contrôle et qu'elle ne devait en aucun cas s'inquiéter, Édith commençait lentement à intégrer la situation épineuse dans laquelle celle-ci se trouvait.
Sortir des griffes d'Ivar ne serait pas facile, mais pour l'instant exécuter ses demandes restait le choix le plus raisonnable. « Au moins le temps de trouver comment faire », se rassurait-elle. Ivar lui avait annoncé son départ, bien que la date exacte lui soit encore inconnue, Edith n'avait qu'à attendre sagement que celui-ci se produise. Mais comment ferait - elle si celui - ci était prévu dans plusieurs mois, ou dans un an ? Elle pourrait paraître docile, mais nullement durant autant de temps.

Margrethe inspecta sa blessure et fut surprise de la voir ainsi préparée. Plus encore que sa mauvaise d'humeur, l'application d'Ivar à soigner Edith la terrifiait. Comprenant que plus de soins ne seraient pas nécessaires pour l'instant, Margrethe se retira. Sa présence était demandée au Skali, dont elle ne pouvait s'absenter plus longtemps. Acquiesçant sans y trouver quoi que ce soit a redire, Edith observa la Viking disparaître, en laissant derrière elle un silence mortuaire mordu par un air froid et rebelle.

La journée pourrait suivre sans encombres à part la quotidienne visite de Hvitserk, Édith n'attendait personne.

Sur les coups de midi, le jeune homme s'annonçait. Comme à son habitude, il avait ramené avec lui une assiette intacte, revenue de la table garnie du Skali. Le froid avait gangrené l'assiette, se faisant il s'empressa de la réchauffer au coin du feu. Se perdant dans des banalités agréables, Edith essaya tant bien que mal de repousser l'inévitable. Lui apportant avec soin son repas en s'installant auprès d'elle, il était temps d'affronter cette fatalité. Hvitserk avait le regard fatigué et les traits tirés. Malgré ses blagues et son ton léger, la Saxonne sentit que quelque chose le travaillait. Sournoisement des incertitudes s'étaient glissées dans sa tête et lui avaient enlevé son sommeil. Un choix les guettait, lui et ses frères. Ils souhaitaient prendre le bon, pourtant comment pouvoir en être sûrs ? Lui conseillant de suivre ce que lui indiquait son cœur, Hvitserk sembla rassurer.
"Je dois faire ce qui est juste. Je ne peux pas me lancer si le combat est déjà perdu d'avance", se justifia-t-il. "Je comprends", le rassura-t-elle.
Sans en être parfaitement sûre, Edith soupçonnait la raison de son inquiétude. Ivar lui annonçait son départ prochain et les frères se rassemblaient à en perdre le sommeil. Hvitserk avait fait le choix de laisser partir son père et peu importerait le résultat de ce raid, il devrait en supporter les conséquences.

          —   Vous avez tous fait ce choix ?

Le jeune garçon hocha la tête en silence, le regard porté sur ses mains. Son choix était fait, pourtant il semblait en avoir honte. Hvitserk était tiraillé entre son rôle de fils, et ses ambitions d'homme. Mais en tant que Viking, le choix devait s'avouer facile et clair. L'ambition guidait les hommes, alors pourquoi Hvitserk serait-il une exception ? Relevant la tête dans sa direction pour fixer un point imaginaire derrière elle, le garçon se corrigea,

          —  Enfin presque tous.

          —   Ivar, je sais.

Fronçant les sourcils durant un léger instant, Hvitserk se reprit vite. Il avait décidé de ne plus laisser ses mauvaises pensées influencer son comportement. Edith pouvait s'entendre avec son frère, ou tout autre personne qu'elle jugerait digne de son intérêt. Elle ne lui appartenait pas, il devrait faire avec. C'est donc en essayant de camoufler son mécontentement qu'il tenta de faire la discussion,

𝖥𝗈𝗋𝖾𝗂𝗀𝗇𝖾𝗋'𝗌 𝖦𝗈𝖽 | 𝖵𝗂𝗄𝗂𝗇𝗀𝗌 Dove le storie prendono vita. Scoprilo ora