𝟥. 𝘈𝘭𝘭 𝘛𝘩𝘪𝘯𝘨𝘴 𝘌𝘯𝘥

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Le dernier jour avait été doux

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Le dernier jour avait été doux. Les soldats avaient envahi la ville, remplissant l'air de l'odeur de sang et de boue. L'odeur de la guerre. Ils s'étaient donc échappés, comme ils savaient si bien le faire. Dans la forêt, leur monde était sauf. Le mal des hommes ne contaminait ni les racines ni les cours d'eau. La forêt résistait encore. La terre était molle sous leur pied et leurs souffles étaient humides. Il avait plu cette nuit et l'herbe en portait encore la trace. Ici, le mal ne dépassait jamais les branches.

Ils s'étaient avancés à trois, côtes à côtes, leurs épaules se touchant presque. C'était une journée d'hiver agréable, le vent était calme et le soleil rependait une aura de paix. Dans d'autres circonstances, la journée aurait pu être belle. Peut-être que dans un sens, l'était-elle seulement, il s'agit du genre de chose que les gens tristes sont incapables de le reconnaître. Plus tard, peut-être, le temps ferait qu'ils y repenseraient comme à un souvenir précieux ne s'accompagnant plus de l'aigreur des « et si ». Peut-être.

Caressant leurs dernières minutes d'un geste délicat, ils s'étaient aventurés sur leurs routes d'enfance avec une nostalgie qu'ils n'auraient jamais cru connaître. L'un observant ce paysage qu'il connaissait par cœur comme un étranger et les autres comme s'il s'apprêtait à disparaître. Ils avaient rigolé longtemps, au point où Anse' s'en était presque mise à pleurer. L'humour n'était sans doute pas le seul facteur, car elle n'avait pas tardé à se reprendre. Aujourd'hui, devait se dérouler sans accident. Une journée en dehors du temps. Une journée sans lendemain. Le dernier cadeau qu'ils pourraient s'offrir mutuellement. Une dernière journée ensemble.

— On aurait pu vivre ici.

Avait-il constaté, nonchalamment installé sur une racine bombée. Le ruisseau non loin, berçait leur échange d'un son continu et rassurant. Elles avaient acquiescé, peu convaincues mais gagnées par l'idée. Ils s'étaient allés à décrire ce qu'aurait été leur vie sauvage, comment se seraient composées leurs journées et bien d'autres détails. Ils avaient décrit cette vie comme l'on décrit un rêve. En soit, s'en était un : un rêve juvénile qui voulait les maintenir ensemble.

— Il se fait tard. Avait finit par trancher Édith, soucieuse de ne pas lui causer plus de problèmes.

L'appel devrait se faire avant le coucher du soleil et Aethelbert devrait être présent parmi tous les autres. Il avait protesté, sans surprise, prétextant que le soleil ne serait pas couché avant des heures. Croisant ses mains derrière sa nuque, il ne semblait pas prêt à bouger. Ainsi juché, pourquoi vouloir partir ? Pourquoi vouloir presser l'inévitable ? Sa sentence tomberait bien assez tôt.

Dociles, elles avaient fini par capituler. Elles n'avaient rien contre le fait de repousser leur retour. Ils savaient qu'une fois au village, ils ne se verraient que demain lorsque les hommes quitteraient la ville. Tant d'hommes qui n'y mettraient sûrement plus jamais les pieds.

𝖥𝗈𝗋𝖾𝗂𝗀𝗇𝖾𝗋'𝗌 𝖦𝗈𝖽 | 𝖵𝗂𝗄𝗂𝗇𝗀𝗌 Where stories live. Discover now