54 | Arrangements

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— Amène les simplement, nous nous chargerons du reste.

Les instructions avaient été rapides et concises. Quelques mots murmurés dans la foule avant que l'ombre de la messagère ne disparaisse. Lagertha et ses guerrières ne voulaient pas attendre, ce qui finalement était pour le mieux : Édith partageait leur avis. La guerrière voulait parler à la reine, seule à seule. Nul ne devait être en mesure de les déranger, pas de fils pas d'époux. Edith devait s'en charger. Évitant la foule depuis son retour, Ragnar s'exclurait de lui-même, préférant se préserver de la foule le toisant. Pour ce qu'il en était des progénitures, leur cas s'avèrerait plus compliqué. Toutefois, contrairement à ses attentes défaitistes, ils finirent par se détourner d'eux-même. Ubbe avec Margrethe, Sigurd ayant disparu à la suite de le fils du forgeron et Hvitserk au bras d'Hedda. Edith s'était offusquée de cette préférence soudaine, pourtant elle fut contrainte de s'avouer que Hvitserk lui faisait un cadeau : cela faisait un fils de moins à distraire. Björn marcherait aux côtés de sa mère ainsi elle n'aurait pas besoin de veiller à ce qu'il s'interpose. Pour ce qu'il en était d'Ivar, il en était autre chose. Il serait le plus difficile à distraire, ou plutôt le plus difficile à se laisser trahir. Le cadet était celui qui l'aimait le plus, celui qui veillerait à sa protection. Aslaug pourrait toujours compter sur lui, aussi fallait-il qu'Édith s'en occupe. Elle le convaincrait de dire au revoir à sa mère, de lui parler tout du moins. De faire en sorte, qu'il n'ait pas de degrés. Essayant de se convaincre, Edith n'arrivait pas totalement à s'exonérer de sa culpabilité : elle, mieux que quiconque, savait ce qu'était de perdre un parent. Plus encore, elle connaissait la haine que nous pouvions éprouver contre celui l'ayant volé. Celle d'Ivar serait terrible, sans doute la pire d'entre tous. Mais d'ici son retour, ils seraient prêts.

Edith avait accepté à condition que la vie des fils soit épargnée. Condition plutôt dérisoire sachant que Lagertha n'oserait jamais s'en prendre aux enfants de Ragnar. Est-ce le respect d'une ancienne épouse ? Les principes d'une mère ? La Saxonne n'avait aucune idée de la réponse, bien que celle-ci lui importait peu. Malgré la garantie qui lui avait été faite, elle savait ce qui tout doucement menaçait : Ivar souhaiterait se venger, se venger de n'importe quels moyens. Lagertha n'aura alors plus d'autres choix. Ivar devra mourir. D'ici là, Edith pourrait penser à une solution, une manière d'épargner sa vie en complaisant à sa colère. Penser aux conséquences d'un meurtre avant même de l'avoir commis était une chose bien déroutante. La violence se répond par la violence, seulement un infirme se retrouve rapidement découragé devant une reine. Aussi peut-être repoussera-t-il ses plans ? Son intelligence lui dicterait d'être patient, d'attendre. Du temps en plus pourrait être à envisager pour le convaincre et alors Edith trouverait forcément un moyen. Une guerre entre frères causerait leur perte à tous, elle serait donc prête à tous les sacrifices pour l'éviter. Pour leur éviter à tous.

Lorsqu'Ivar s'était avancé pour défier sa mère, Edith eut du mal à y croire. Aucuns des fils ne semblaient avoir besoin d'aide pour se détacher de leur mère : l'appel de la chair ayant eut raison d'eux. La Saxonne n'eut plus qu'à jouer le jeu, car s'il y a bien une chose qu'elle eut apprise durant son exil était l'art de posséder rôle. Les garçons la percevait comme une petite chose fragile à sauver, voire à aimer quelque fois, cela au grès de leurs désirs. Ils la renvoyaient de frères en frères, comme si elle se contenterait de celui qui voudrait bien d'elle : comme si le choix ne lui appartenait pas. Elle comprit cela à la minute même où Hvitserk s'éloignait d'elle avec une autre femme : finalement Margrethe et elle n'étaient pas différente. A la seule différence, qu'elle aurait sa fin heureuse, Edith y veillerait. La bile dans sa gorge lui avait presque coupé le souffle. Elle se battait pour sauver leur vie tandis qu'ils l'humiliait. Après tout n'est-ce pas le rôle d'une femme, de laisser croire à un homme qu'il a le contrôle ? Qu'il la possède ? Edith n'était pas sotte, elle ne l'était pas hier, ni aujourd'hui, ni plus que demain. Elle ferait ce qu'elle avait à faire : elle tuerait la reine. Ou du moins, aiderait Lagertha à y parvenir. Après tout sa mission n'était pas des plus complexes : tenir éloignés les fils, les occuper pour qu'ils ne se doutent de rien, convaincre Margrethe qu'elle aurait le droit, elle aussi, à des années de bonheur et enfin conduire Sigurd et Ubbe là où les mariages se décident. Aucuns ne l'aiderait à partir d'ici, à rentrer chez elle. Personne ne lui rendrait sa liberté. En pensant aimer ces garçons, Edith courait à sa perte. Elle le comprenait désormais, Hedda n'ayant été que le simple déclencheur de sa réalisation. Elle suivit donc Ivar en nourrissant l'idée que le trahir avait été son seul choix. Égoïstement, Edith espérait qu'ils puissent lui pardonner un jour. Alors qu'elle même n'avait jamais pu pardonner à Floki. Édith comprendrait forcément la rage d'Ivar, cette rage elle la partagerait avec lui. Toutefois, une proposition inattendue allait bien bouleverser ses plans.

𝖥𝗈𝗋𝖾𝗂𝗀𝗇𝖾𝗋'𝗌 𝖦𝗈𝖽 | 𝖵𝗂𝗄𝗂𝗇𝗀𝗌 Where stories live. Discover now