Lame à double tranchant

1.5K 159 22
                                    


J'étais comme un corps sans vie. Et je me demandais si les autres subissaient la même chose que moi. Je n'avais toujours eu aucunes nouvelles. Et à chaque fois que je me réveillais, le cauchemar était encore pire. Il fallait à tout prix que j'aille aux funérailles, si je n'assistais pas à ces deuils, je n'allais pas croire que c'est réel. Mon père n'était pas dans ma chambre d'hôpital et je voulais aller uriner... Au moment de me lever, je m'écroule. Je m'écroule à la
Minute où mes pieds touchent le sol.

-MOI : Qu'est ce qui se passe ... ?

J'essaie encore de me lever mais mes pieds ne réagissent pas. On aurait dit des spaghettis trop cuits. À ce moment là, mon père entre.

-PAPA : Tu fais quoi au sol? Attends je vais t'aider à te lever.

-MOI : Je n'y arrive pas , pourquoi je n'y arrive pas? (en pleine panique)

Il essayait de m'aider mais mes pieds ne répondaient pas .

-PAPA : Non... Arrêtes ... tu ne vas pas recommencer à pleurer... tu ne fais que ça depuis des jours.

-MOI : Je suis sérieuse !! Je ne les sens pas !! Papa...( en larmes)

Il m'a porté et m'a mis sur le lit. Il est allé chercher le médecin.

Du côté de PAPA...

-PAPA: Docteur... Maintenant elle ne marche plus. Je crois que je vais devenir fou. Qu'est ce qui se passe ?

-LE DOC: Ce n'est rien de grave. Elle subit juste un traumatisme. Ça arrive rarement. Ça arrive uniquement aux personnes qui ont vécu un choc. Votre fille a un problème, elle est tétanisée, traumatisée. Essayez de lui parler. Et si elle ne veut pas , il faut la transférer comme je vous l'ai dit, elle se fera consulter par un psy.

-PAPA : Okay... c'est nécessaire ?

-LE DOC: Oui surtout si vous voulez réellement voyager comme vous me l'avez dit . Il faut qu'on trouve un moyen de la calmer. Du moins pour qu'elle ne vous cause pas de problèmes pendant le vol ou à l'aéroport.

-PAPA : Okay...

Du côté d'ELLA...

Mon père est revenu du bureau du médecin avec un fauteuil roulant.

-MOI : Ça veut dire quoi ?

-PAPA : Ce n'est rien de grave. Ce sont les effets secondaires des médicaments.

-MOI : Et je vais marcher à nouveau ??

-PAPA : Bien sure. On peut parler un peu ?

-MOI : Je veux allez aux funérailles.

-PAPA : Pourquoi ? Tu les connaissais ces filles ?

-MOI: Je veux juste y aller. Après ça je te promets de me calmer .

-PAPA : Vraiment ?!

-MOI : Oui...

-PAPA : Okay . Je vais me renseigner et on y ira ensemble. Si ça peut te permettre de te calmer... okay. Mais j'aimerais bien que tu me dises ce qui ne va pas quand ça ira mieux .

-MOI : Okay...

Environs trois jours plus tard mon père me fait comprendre que la levée c'est le week-end et que les parents des deux filles ont décidé de la faire ensemble... jusque là, tant que je ne l'avais pas vu de mes propres yeux, je refusais d'y croire . Pendant ce temps j'étais toujours à l'hôpital, les médecins et mon père me parlaient tout le temps. Pour que je mange mais je n'y arrivais pas. J'étais quittée en quelques semaines de 74 kg à 56kg. Je ressemblais à une fille sur le point de mourir.

Le Samedi... Je suis allée plutôt à la veillée avec mon papa... dans la voiture, j'étais très anxieuse. Soit je reprenais une vie normale soit je retombais au fond du trou. C'était chez FANY. Arrivée devant la maison de cette fille à qui on a fait du mal, j'étais de nouveau en larmes. J'aurais cru avoir un couteau en plein cœur. Il y'avait du monde... mais on me cédait le passage vu que j'étais en fauteuil et en larmes comme si j'étais parentée à elles . Et arrivée à un niveau, il y'avait les photos des deux filles. Et c'est là que j'ai su que je ne reprendrais jamais ma vie... On voyait par la fenêtre du salon grandement ouverte les deux cercueils...

Je vois une fille en noir entrer et tomber aux pieds du père de FANY... Mais je me demandais bien qui c'était. Elle pleurait de rage... de douleur... j'avais l'impression qu'elle ressentait exactement la même chose que moi... Elle pleurait sur ses pieds et lui il pleurait en tapotant son épaule pour la consoler. Et deux minutes après, ce mec KHALIL ... est venu l'aider à se lever... Et à ce moment là... j'ai compris que je n'étais pas la seule à souffrir ... je ne l'avais pas reconnu parce qu'elle avait maigrit autant que moi. Ce n'est même pas le bon terme ... Elle avait fondu littéralement. Cette fille comme on l'appelait la blanche, était encore plus noire que de la cendre, avec des creux aux yeux comme si elle n'avait pas dormi pendant des semaines. J'ai mis mes mains sur mon visage parce que je n'arrivais plus à me contenir... Et je l'ai vu venir vers moi... j'ai préféré me cacher pour masquer mes larmes.

-MIA: ELLA...

-MOI : Oui...

-MIA : S'il te plaît regardes moi...

J'ai senti la pression des bras de mon père sur mon fauteuil s'en aller. J'ai su qu'il voulait nous laisser causer.

Elle a enlevé les mains de mon visage en larmes.

-MIA : Je suis vraiment désolée... on aurait dû laisser tomber tout ça . C'est aller trop loin.

Elle m'a pris dans ses bras. Ça me fait de la peine de le dire mais je me suis réjouie de savoir que je ne suis pas la seule à subir le poids de la culpabilité. Que je ne suis pas la seule à vivre un enfer.

-MIA. pourquoi tu es en fauteuil ?

-MOI : ( Toujours en pleurant) Je ne sais pas... je n'y arrive plus... à marcher.

-MIA : Calmes-toi...

-MOI : Pourquoi aucuns numéros ne passent? Vous m'avez laissé tomber.

-...: (Avec une voix tremblante)Personne ne t'a laissé tomber... On subit tous... Crois-tu que j'ai réellement le courage de parler avec qui que ce soit après ça . On avait tout élaboré en oubliant que la vie ça s'en allait en un rien.

Je me suis retournée pendant qu'elle parlait. Et le premier truc que j'ai remarqué ce sont les cicatrices aux poignets . Dès qu'elle m'a vu les regarder , elle s'est battue à les cacher... Elle se mutile ... chacun a sa façon de gérer la douleur et la peine...

-MANUELLA : Tu n'as pas changé. Tu ramènes toujours tout à toi...

Même pas 5 minutes après KARELLE est arrivée... On était toute comme si on s'était inscrit à un programme de régime intense. On était tellement méconnaissable. Normal quand on est coupable et qu'on ne sait pas comment échapper aux retombées.

-KARELLE : Je suis contente de ne pas être la seule à maigrir.

Elle s'était rasée. Crâne lisse. Tellement on la regardait...

-KARELLE: Chacun gère la dépression à sa façon. Ça m'aiderait que vous regardiez ailleurs.

-MOI: ALV-

-KARELLE: Est malade. Elle est malade. Du moins ça va faire bientôt deux semaines qu'elle n'avale rien... La force d'être là, elle n'avait pas. Mais moi je devais venir... Il fallait que je le vois avant d'y croire. J'aurais mieux fait de ne pas venir... ( les larmes coulaient à flot)

Nous étions toutes là avec nos vêtements aussi noirs que nos cœurs à regarder les dégâts qu'on a causé après notre passage. On était devenu pire que ces filles, elles n'ont fait que nous blesser mais nous on les a envoyé dans la tombe . Un homme de Dieu a pris la parole et nous a dit ce soir là : << La vie et la mort sont au pouvoir de la langue>> ... Nos actes sont allés plus loin que nos paroles alors j'ai décidé ce jour là de ne plus jamais parler.

Deux heures plus tard en rentrant... Nous tombons sur la mère de JORDAN...

-LA MAMAN DE JORDAN: Toi! Je te reconnais... Tu es dans le même établissement que ma fille n'est ce pas ?

À suivre...

Les vendeuses de Piment 🤑🌶 ( En correction )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant