Chapitre 5

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À cette heure-là, Hélios aurait dû se mettre en route pour l'usine de plancton où il était supposé retrouver son père. Il s'efforça de ne pas imaginer la déception de ce dernier lorsqu'il ne le verrait pas arriver. Et celle, plus vive encore, que sa famille ressentirait en apprenant ce qu’il avait fait. S'il y parvenait, bien sûr. Il y avait un pourcentage de chance important pour que quelque chose se passe mal dans son plan hasardeux. 

Il emprunta un ascenseur qui le mena directement au dixième niveau. C'était une série de bulles contenant des bureaux administratifs dans lesquels il n'avait jamais eu l'occasion de mettre les pieds. Le centre médical des FIT n'était pas difficile à repérer car l'architecte qui l'avait conçu s'était efforcé de lui donner une apparence proche des maisons de la surface. C'était le seul bâtiment à avoir une forme carrée et non ronde. 

Hélios s'arrêta devant la porte sur laquelle il était écrit en gros : Forces d'Intervention Terrestres. Il avait peur d'entrer. Il deviendrait un hors-la-loi à partir du moment où il en aurait franchi le seuil pour se faire passer pour quelqu'un d'autre. Il n'était pas trop tard pour faire demi-tour et aller rendre son badge à Ptolémée. 

"Si", songea Hélios. "Il est trop tard. J'ai pris ma décision. Je ne reviendrai pas en arrière". 

Il fit un pas en avant. Les portes coulissantes s'ouvrirent devant lui. 

— Bienvenue au sein des Forces d'Interventions Terriennes, lui dit une sirène assise derrière un comptoir d'accueil. Puis-je avoir votre nom et votre matricule ? 

Hélios sortit maladroitement son badge pour y lire le numéro inscrit en petits caractères sous la photographie de son meilleur ami. 

— Euh… Ptolémée, n°65 756. 

Sa voix avait failli s’étrangler lorsqu’il avait prononcé le faux prénom. Il était à moitié persuadé que la sirène allait soudain se fâcher et le traiter de menteur en voyant le badge. Elle ne lui jeta cependant qu’un vague regard et ne demanda même pas à l'examiner de plus près. 

— Vous pouvez patienter ici. 

Elle lui désigna un espace situé à la droite de la banque d’accueil, à côté d’un hublot. Il était déjà occupé par trois sirènes et deux tritons du même âge qu'Hélios mais qu'il ne connaissait que vaguement de vue, ce qui était une chance. Ils ne fréquentaient pas la même école que lui. Tous étaient plus grands, plus robustes que lui. Ils le toisèrent sans lui adresser la parole. L'une des filles finit par lui adresser un vague signe de la tête avant de contempler à nouveau le mur. Il était recouvert d'affiches de recrutement des FIT. 

Un infirmier et une infirmière venaient régulièrement appeler l'un ou l'autre des futurs aspirants qui les suivaient et ne revenaient pas ensuite. C’était bientôt le tour d’Hélios qui commençait à se tranquilliser un peu. Pour l'instant, tout se passait bien. Puis une nouvelle personne franchit la porte du centre médical. Le petit triton sursauta. C'était Hector, l'un de ses camarades de classe. Ce dernier aperçut fatalement Hélios et lui adressa de grands signes joyeux. 

— Salut Hélios ! claironna-t-il à voix haute. 

Le jeune triton jeta aussitôt un regard nerveux à la sirène de l'accueil. Elle regardait son écran sans sembler avoir remarqué le changement de prénom. 

— Salut. 

Il prit un ton froid, espérant que son camarade se désintéresserait de lui. Il y avait trop de risques pour qu'il trahisse sa véritable identité. Mais Hector vint s'affaler sur un fauteuil juste à côté de lui. Il rejeta en arrière ses boucles blondes, très à son aise. Il avait l'air de vouloir bavarder. 

Arc en ciel (bxb) [terminée]Where stories live. Discover now