Chapitre 37

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Les agents menèrent Hélios dans une pièce circulaire remplie de matériel informatique de surveillance. Un vieux triton aux cheveux gris était assis devant un ordinateur. Il se retourna lentement en faisant pivoter son fauteuil et désigna du menton un siège devant lui. Hélios s'y laissa tomber, plus mort que vif. Il n'y avait pas de fenêtre sur l'extérieur et la seule lumière provenait des différents écrans. Le contenu de ce qu'ils diffusaient ne cessait de changer. On y voyait une vue éloignée de la promenade des Anglais. Puis la vieille ville de Nice grouillante de touristes. Puis une photographie représentant Hélios lui-même sur laquelle il était écrit "activement recherché". Puis à nouveau le bord de mer. Le petit triton en avait la tête qui tourne.

— Eh bien, jeune Hélios, commenta soudain l'agent d'un ton las. On peut dire que tu nous auras causé bien du fil à retordre.

Hélios se tendit comme un arc puis se tassa sur lui-même sans répondre. Le triton ne parut pas s'en formaliser. Les autres agents étaient partis. Ils n'étaient plus que deux dans la pièce. Le vieux triton l'intimidait. Il avait suffisamment étudié le fonctionnement des FIT pour savoir à ses décorations qu'il s'agissait d'un haut gradé. Un commandant de station, peut-être. Contrairement aux autres agents, il s'était permis de garder des cheveux mi-longs couleur acier qui descendaient jusqu'à son cou. Pour le reste, il ressemblait parfaitement à un humain, sans autre signe d'appartenance au peuple de la mer que ses yeux bleus vifs. Hélios eut plus que jamais conscience de ses propres écailles qui brillaient dans la pénombre. Son déguisement se fissurait de partout.

— Nous avons cru comprendre qu'il t'était arrivé quelques mésaventures, récemment..., observa aimablement le commandant.

Il parlait d'un ton mesuré, comme s'il commentait la météo.

Hélios leva très brièvement les yeux. La villa des Faure venait d'apparaître sur l'écran juste en face de lui. On pouvait y voir une silhouette en costume qui devait être le père de Grégoire. Il discutait avec d'autres personnes, sans doute ses hommes de main. Il n'y avait pas de son. Les différents interlocuteurs semblaient se disputer.

— Ces humains savent pour moi, marmonna très vite Hélios en regardant à nouveau fixement ses mains. Ils m'ont capturé et jeté dans un bassin. Je me suis transformé devant eux...

Sa gorge ne noua et il courba le dos encore plus bas. Il se sentait lamentable. Le peuple de la mer s'était appliqué pendant des millénaires à conserver secrète son existence et il avait révélé en quelques jours sa nature à des humains par son désir égoïste de découvrir la surface.

Le vieux triton tapota l'écran devant lui.

— Nous le savons déjà. Nous en savons d'ailleurs certainement plus que toi. Sans doute ignores-tu ce qui t'a trahi ?

Hélios secoua timidement la tête.

Le commandant lança une nouvelle vidéo en noir et blanc. L'image n'était pas très nette et le petit triton dut se pencher en avant sur son siège pour mieux voir.

— Un détective un peu trop curieux a mis la main sur ce charmant spectacle, commenta l'homme en face de lui.

Le petit triton mit un moment à analyser les mouvements flous qu'il avait sous les yeux. Il finit par identifier la scène. C'était le jour de la tempête, lorsqu'il s'était transformé pour venir à la rescousse de Grégoire ! Il avait été filmé !

Il se regarda lui-même en train de ranimer le jeune homme en se dandinant, entièrement nu. Hélios se sentit rougir comme une pivoine. Bon sang ! Combien de personnes avaient vu cette vidéo ridicule ?

L'agent coupa soudain l'image. L'écran se mit à diffuser à nouveau l'affiche de recherche d'Hélios. C'était une photographie qui avait été prise le jour de son dernier anniversaire. Le petit triton se demanda si elle avait été fournie par ses parents. Il en fut contrarié.

Arc en ciel (bxb) [terminée]Where stories live. Discover now