Chapitre 17

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Maude et Barbara n'étaient pas dans les parages lorsqu'ils retournèrent au port. 

Hélios avait les bras chargés de plusieurs sacs remplis d'affaires toutes neuves et de sa taille qui l'enchantaient. Et il avait désormais aux pieds des chaussures en toile avec une bonne semelle qui ne faisaient pas de bruit et tenaient bien sur ses pieds !

Comble de chance, il n'avait pas revu les agents des FIT. Sans doute avaient-ils perdu sa trace au milieu de tant d'humains. Hélios espéra qu'ils s'étaient rendus dans une autre ville et ne remettraient plus les pieds à Nice de sitôt. Il lui suffirait finalement de ne pas se faire remarquer pour ne pas être repéré et le tour serait joué. Il n'était pas si compliqué que cela de rester discret.

Grégoire prit son téléphone portable (le triton savait ce qu'était cet appareil pour l'avoir vu dans de très nombreux films et avait toujours rêvé de pouvoir un jour en étudier un de près) et passa un coup de fil aux filles pour les avertir qu'ils les attendraient sur le yacht.

— Tu devrais me donner ton numéro aussi, au cas où, conseilla Grégoire après avoir raccroché.

Hélios haussa un sourcil.

— Je n'ai pas de téléphone.

Le jeune homme eut un rictus.

— Il est vrai que tu aurais eu quelques difficultés à le cacher sur toi lors de ton arrivée...

Le triton rougit d'embarras en pensant à cette première rencontre. Malgré tout ce qu'il avait étudié pour préparer le concours, il y avait vraiment beaucoup de choses qu'il ignorait encore sur les humains. Il allait mettre à profit les jours qu'il avait pour approfondir ses connaissances.

Grégoire lui jeta un regard en biais.

— Puis-je espérer un jour une quelconque explication au sujet de ta mystérieuse apparition ?

Hélios fit la moue sans répondre. Il regarda sur le côté, espérant ne pas être interrogé davantage. Il détestait devoir garder un tel secret envers quelqu'un qu'il appréciait. Mais il ne pouvait tout de même pas trahir le secret de son espèce !

— Tu ne peux plus faire semblant d'être muet, grommela le jeune humain en enfonçant ses mains dans ses poches.

Mais il ne paraissait pas trop fâché et il laissa le triton montrer le premier sur le bateau.

Hélios posa aussitôt ses emplettes sur un fauteuil dès qu'il monta à bord. Il retira avec impatience le t-shirt trop grand de Grégoire dans l'idée d'enfiler ses nouveaux habits qui lui faisaient tant envie. Il faillit cependant pousser un cri lorsque le tissu frotta contre sa peau soudain brûlante. Il se contorsionna pour regarder son dos. Il avait la peau recouverte de grandes plaques rouges très douloureuses !

Les battements de son cœur s'accélérèrent. Faisait-il une réaction à l'injection qu'il avait reçu pour se faire passer pour un humain ? L'infirmier lui avait parlé d'effets secondaires. Comment ferait-t-il s'il avait un besoin urgent de soins médicaux ? Il ne pouvait pas se rendre dans un hôpital pour humains !

— Je crois que je suis malade, s'inquiéta-t-il en examinant sa peau avec inquiétude.

Grégoire jeta un bref coup d'œil à son dos.

— Mais non ! Tu as un gros coup de soleil, tout simplement. Ce n'était pas une bonne idée de rester torse nu sur le bateau sans protection.

Le petit triton ouvrit de grands yeux. Un coup de soleil ? Le soleil pouvait frapper ? Voilà une chose bien extraordinaire !

— Cela fait mal, gémit-il en posant son poing contre sa bouche.

Sa peau avait l'air en feu. Il souffrait à chaque mouvement qu'il faisait. Il ne comprenait pas comment il avait pu ignorer cette douleur jusqu'à présent.

Grégoire lui tapota l'épaule à un endroit épargné par le coup.

— Retire ton t-shirt et allonge-toi sur le ventre. Je vais te mettre de la crème contre les brûlures.

Hélios obéit et s'installa précautionneusement sur l'un des transats du pont, bien à l'abri sous un parasol. Désormais, il se méfierait du soleil... La surface était un endroit plein de dangers inattendus. On ne savait jamais d'où ils pouvaient venir.

Grégoire l'avait quitté un bref instant et revint bien vite avec un tube dans la main.

Il adressa un sourire rassurant au triton qui s'était retourné.

— Reste allongé, lui dit-il.

Hélios entendit un "poc" lorsque le tub fut débouché. Une odeur agréable descendit jusqu'à ses narines. Il agrippa ses mains sur les rebords du transat, tendu. Il tressaillit en sentant un contact.

Les mains de Grégoire, cependant, se promenèrent doucement le long de son dos en malaxant sa peau. Hélios trouva cela agréable. La crème était fraîche, sentait bon et lui faisait du bien. Contrairement à ce qu'on lui avait toujours dit, les humains - du moins l'un d'entre eux - étaient très gentils. Il était satisfait de voir le jeune homme prendre soin de lui ainsi. Il se sentait en sécurité auprès de lui.

Il enfouit son visage dans le coussin du fauteuil en soupirant et se dandina pour trouver une meilleure position.

— Cela n'est pas plus étonnant que cela, ce coup de soleil, le sermonna Grégoire qui était arrivé au niveau des épaules qu'il massa toujours aussi délicatement. Tu es blanc comme un cachet d'aspirine. On dirait que tu ne vois jamais le soleil. Tu habites en Bretagne ou quoi ?

Hélios se raidit instinctivement et le jeune homme dû le sentir car il soupira et referma le bouchon de la crème après avoir badigeonné tout son dos.

Clac.

— Tu es vraiment si mystérieux, marmonna-t-il. Tu peux me faire confiance, tu sais ?

Le petit triton ne répondit rien une fois de plus. Il aurait été facile de s'inventer une vie humaine plausible. Les agents FIT infiltrés le faisaient sans vergogne et étaient formés pour cela. Mais Hélios ne voulait pas mentir à Grégoire. Pour autant, il était évidemment exclu de lui dire la vérité. Le mieux était donc de ne rien dire du tout sur ce sujet.

Il se redressa. La douleur commençait à s'estomper.

— Je voulais être aussi brun que toi, soupira-t-il à la place en contemplant ses bras, découragé.

L'humain se mit à rire.

— Tu ne pourras pas, malgré tous les efforts du monde. J'ai une moitié d'origine africaine et ce n'est visiblement pas ton cas.

— Une moitié africaine ? répéta Hélios, très intéressé. Quelle moitié ?

— Par ma mère. Mon père est encore plus pâlichon que toi, à force de ne faire que travailler...

Le visage de Grégoire s'était refermé. Hélios en conclut que ses parents étaient pour lui un sujet sensible et préféra ne pas insister.

— Pourquoi es-ce que tu ne veux plus m'embrasser ? demanda-t-il sans transition.

Les yeux du jeune homme s'écarquillèrent.

— Je..., bredouilla-t-il, pris de court. Ce n'est pas que je ne le voudrais pas. Je ne le peux pas. Voilà tout.

Hélios se redressa avec précaution.

— Je ne comprends pas. Qu'est-ce qui t'empêche alors de faire ce que tu souhaites ?

Ce fut au tour de Grégoire de demeurer muet. Il fixait le triton les yeux remplis d'une sorte de crainte que ce dernier ne parvenait pas à comprendre. Il était persuadé de sentir comme un courant qui les poussait l'un vers l'autre. En quoi était-ce mal d'y céder ?

Il avança instinctivement le torse. Grégoire ne recula pas.

Ils étaient très proches l'un de l'autre. Vraiment très proches. Le triton sentait le souffle du jeune humain caresser sa peau. Sa bouche s'entrouvrit.

Le cœur d'Hélios s'emballa.

"Il va m'embrasser", comprit-il.

Son corps entier se mit à trembler d'impatience. Grégoire se rapprocha encore davantage. Il ferma les yeux.

Puis une voix s'éleva derrière eux.

— Nous sommes de retour !

Arc en ciel (bxb) [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant