Forever Young (histoire terminée)

Chapitre 3 (nouvelle version)

JAKE

Je la déteste.

Elle m'a abandonné, je dirais même qu'elle nous a abandonnés. Et voilà qu'elle revient ici la bouche en cœur. Non. Je ne veux pas d'elle.

Elle n'a pas le droit de me faire ça.

Son départ m'a anéanti, je me suis retrouvé seul au pire moment de ma vie. J'étais comme un bateau en perdition, sans son ancre pour se stabiliser. Je dérivais sur l'eau, sans but ni point fixe. J'étais complètement fou d'elle !

Malgré mon jeune âge, j'imaginais déjà ma vie avec Marlow. Et j'étais sûr qu'elle tenait à moi, elle m'aimait, en tout cas d'une certaine manière. Bien sûr, je n'étais pas aveugle, son amour était différent, elle ne me voyait pas comme un prétendant potentiel, mais les sentiments peuvent évoluer, non ? Je nourrissais l'espoir qu'en grandissant, elle porterait un regard plus intéressé sur moi.

L'amour est tellement complexe, pourtant tout était plus simple avec Marlow. A ses côtés, tout devenait limpide pour moi.

J'ai toujours été un enfant un peu renfermé, très calme, trop d'ailleurs. Mais Marlow avait ce pouvoir sur moi, cette emprise positive qui me poussait à m'épanouir chaque jour un peu plus. Malheureusement ma mère a très vite compris ce qu'il se tramait dans ma tête, et dans mon cœur. Elle a notamment découvert mon obsession pour Marlow en fouillant dans ma chambre. Des poèmes, des photos d'elle, j'avais amassé pas mal d'objets lui appartenant : un foulard, un collier et même une de ses culottes en coton. Ma préférée. C'est précisément ce vêtement qui a fait péter un câble à ma mère.

Ce soir-là, elle m'a passé un savon de tous les diables. Je n'étais pas « normal », c'était « malsain » ... j'avais 11 ans putain, ma queue frétillait au rythme de mes hormones, je n'avais aucun pouvoir sur ça. Et mon cœur, lui, était complètement obnubilé par Marlow. Alors oui, la culotte me procurait une sensation étrange, une sensation d'appartenance, comme si avec ce vêtement, elle était avec moi, à chaque instant de ma vie. C'est stupide, et sûrement bizarre aussi, mais je ne pouvais pas m'en empêcher. J'aurais pu prendre un tout autre vêtement, seulement j'ai choisi cette culotte parce que c'est intime, secret, et ce n'est pas quelque chose que les autres personnes peuvent voir facilement. Comme si, dans un sens, nous étions les seuls à connaître l'existence de ce sous-vêtement. Je suis peut-être un pervers, après tout.

Ensuite, elle est partie. Pendant sept ans. Je sais que mes parents l'ont poussée vers la sortie. Je me souviens encore de leurs conversations que j'ai surpris un soir.

— Je t'avais dit que je ne voulais plus la voir ici, Mike ! J'ai fait ce qu'il fallait !

J'entends ma mère crier depuis le bureau de papa. Il est tard, Ashley doit dormir profondément, mais impossible pour moi de trouver le sommeil. Cela fait quelques semaines que Marlow est partie et depuis, je n'ai plus l'impression de vivre, je survis. Mon cœur s'est éteint à son départ. Je n'arrive plus à me concentrer sur les devoirs, malgré l'insistance de ma mère, je ne dors plus, je ne mange plus. Je suis une loque. Un vrai zombie, comme ceux qui peuplent les bandes dessinées de ma bibliothèque, sauf que je ne me repais pas de cerveaux, et ce qui m'affame c'est l'absence de Marlow.

Et voilà que je me retrouve assis derrière le comptoir de la cuisine à écouter mes parents se disputer à deux heures du matin.

—... Tu n'as pas trouvé judicieux de m'en parler avant ? Je suis ton mari, Dina ! C'est un minimum, tu ne crois pas ? Je ne sais pas comment tu t'es débrouillé, mais tu as brisé le cœur de tes deux enfants, est-ce que tu t'en rends compte ?