Une nuit pour une vie

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Ase

- ça y est on est arrivé, me signale Cawl.

Je regarde les alentours. Je ne vois qu'un hôtel de briques rouges dans cette petite ville de merde. On a roulé pendant 4h, dans une tension palpable. Il n'y a aucun signe de Lay. Juste ma Porsche sur un parking craignos. Qu'est-ce que c'est que ce coin pourrit ?

- Tu te fous de ma gueule, je murmure à Cawl.

Le brun hausse les épaules.

- Je n'ai fait que suivre tes instructions Ase le nase !

A l'évocation de ce surnom j'ai envie de le tuer sur place. Il me ramène à des souvenirs que je préfère oublier pour le moment. Gaël sort du véhicule pour se joindre à nous.

- Les gars vous êtes vraiment...  

Il n'a pas le temps d'achever sa phrase que la fenêtre d'un hôtel miteux s'ouvre. On s'empresse de se planquer derrière un buisson dans la pénombre. Quand une petite tête brune fait son apparition,

Mon cœur s'arrête.

Lay s'assoit sur le rebord de la fenêtre. Ses cheveux encore mouillés s'envolent au grès des courants d'air. Elle porte juste un short noir et une brassière. Elle va attraper la crève avec le froid qu'il fait ! Une légère fumée émane de ses lèvres. Je fronce les sourcils.

Elle fume ?

Alors une odeur que je reconnaîtrais entre mille, nous parvient et Cawl s'exclame :

- Putain ça pue l'herbe que j'ai mis dans le gâteau !

Je lui fais signe de se taire. Cette imbécile va nous faire repérer ! On aurait dû le laisser à la villa, il va encore tout faire capoter. Il n'a pas intérêt sinon je le bute sans autre forme de procès. Je suis suffisamment sur les nerfs comme ça. 

- Tu peux m'expliquer pourquoi on doit être discret si on est venue la chercher ? Me demande-t-il bien sérieux.

Gaël pose une main sur mon épaule.

- Il n'a pas tort.

Je dégage sa main qui se veut amicale. Mes yeux se plantent dans les pupilles dilatées de Lay qui essaye de contempler le ciel. Le nez pointé vers les étoiles, elle accapare tout l'espace dans lequel elle se trouve. Je ne vois que sa lumière dans la nuit. 

Je devrais aller la voir.

Je devrais tout lui expliquer.

Je devrais lui demander pardon.

Mais je suis comme paralysé. Je n'arrive pas à aller vers elle. Quand je vois qu'elle s'essuie la joue et cache son visage entre ses mains, mon estomac se noue. Aux nombreuses secousses qu'effectue son corps, je devine qu'elle pleure.

J'ai causé ses larmes.

J'ai causé sa souffrance.

Elle ne voudra plus jamais de moi.

Cette conclusion me provoque la nausée. Je ne voulais pas déclencher tout ça. Je ne voulais pas être un monstre. Encore moins à ses yeux. D'un coup elle pivote la tête vers l'intérieur de l'hôtel, son expression se crispe et elle jette un coup d'œil dans la direction de sa chambre. Puis son ombre disparaît à l'intérieur. Ma poitrine me paraît peser une tonne, tellement le poids des remords m'accable. 

- On y va, signale Gaël qui commence à se diriger vers l'hôtel. 

Ses yeux verts me scrutent alors que je ne bouge pas d'un poil. Mon attention est tournée vers la fenêtre où elle se trouvait il y a quelques minutes. J'ai envie de la voir et en même temps je me refuse d'affronter son désarroi. J'ai peur qu'elle me rejette. J'ai peur qu'elle ne m'abandonne. Je n'arrive pas à croire que je lui ai infligé toute cette souffrance. Ce n'était pas le but. Enfin ce n'était pas mon but. 

SHADE OFFWhere stories live. Discover now