6 - La Non-Mage

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Selene

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Lâchez-moi !

Je hurle alors qu'on me tient les bras et les jambes. J'ai beau gesticuler dans tous les sens, ils n'en ont que faire. Ils me portent comme un vulgaire objet, sans penser au fait que je puisse ressentir leur poigne trop forte, que je puisse avoir peur, être triste ou avoir mal car mon bras est trop tourné d'un côté. Ici, je ne suis pas vue comme une personne humaine, loin de là. Je suis un paquet qu'on a ramené, un objet à acheter.

— Cessez de la manipuler de la sorte, je vais m'occuper d'elle, déclare une voix féminine.

Les hommes qui me malmènent dans les couloirs de cette immense demeure cessent de me tourmenter. Mes pieds reposent enfin sur le sol alors que mon coeur bat si fort dans ma poitrine qu'il résonne même aux creux de mes oreilles. Cette femme s'avance vers moi, elle est âgée d'une quarantaine d'années si ce n'est plus. Ses cheveux grisonnants attachés dans un chignon parfaitement structuré. Ses lèvres fines pincées sont peintes de rouge et elle porte un admirable tailleur à la couleur de la nuit, bleu comme le ciel un soir d'été. Elle arbore un air sévère et me regarde de la tête aux pieds.

— Messieurs, dès lors que nous passons ces portes, vous ne faites pas un pas de plus.

Elle ouvre les portes battantes décorées d'une tapisserie pourpre puis me fait entrer avec elle dans ce qui ressemble le plus à une garde robe, celle-ci contient en plus de cela, une salle de bain. Un miroir sur pied est posé non loin d'une baignoire en bois, laquelle est déjà remplie d'eau.

— Déshabillez-vous, ordonne la quadragénaire.

Je la regarde, elle, puis les alentours à la recherche de quelque chose pour me défendre alors elle claque des doigts devant mon visage pour que je ne m'éparpille pas.

— Jeune fille, ne cherchez pas à fuir, vous vous y perdrez.

— Je vous en conjure, ayez pitié. Je dois rentrer chez moi.

— Si vous souhaitez rester en vie, pliez vous aux règles de cette maison et faites de même lorsque vous aurez été choisie par l'un de nos clients.

— Vous entendez-vous parler ? Jamais je n'irai chez l'un de vos clients. Je ne suis pas une marchandise.

— Vous avez passé les grilles, alors si, vous êtes une marchandise. Déshabillez-vous ou je le fais pour vous.

Elle a employé un ton bien plus brutal et cinglant cette fois. Je garde mes mâchoires serrées, elle ne semble pas rigoler. Je dois rester calme, je dois trouver une faille et quitter cet endroit. Je détache mon tablier couvert de boue puis le jette sur le côté, je continue avec ma veste, puis ma chemise. Bientôt, je me retrouve complètement nue devant cette femme qui me regarde d'un air hautain.

Je grimpe dans la baignoire, l'eau n'est même pas chaude. Je m'y assois, replie mes jambes contre ma poitrine alors qu'elle me frotte le dos avec une brosse, si fort que je crois qu'elle m'esquinte l'épiderme. J'en grimace de douleur. Je crois que certaines fois, des sanglots nouent ma gorge mais je parviens à les ravaler. Jusque quand ? Comment va mon père ? Suis-je loin de la ferme ? Vais-je m'en sortir ? Et ces monstres... ils sont terrifiants.

Restes forte, Selene.

Je sais Ô combien il est difficile d'être arrachée à sa vie.

TENEBRIS LUMINA : L'Arbre de Vie [INTÉGRALE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant