Dans la France de 2063, où les citoyens ont le choix entre suivre les traditions ou être déchus de leur nationalité, le jeu télévisé « Ennemis jurés » bat tous les records d'audience.
Le principe : cinq coupables de crimes passibles de la peine de m...
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~ À la fin
Il faisait jour à l'extérieur du tribunal. Sur une toile de ciel givré, une lumière d'hiver, froide et diffuse, répandait sa blancheur surnaturelle. Cette soudaine clarté lui brûla les rétines. L'air aussi la gifla. Trop vivant.
Elle se réveillait sans tendresse d'un rêve amer, empreint de mort. Ici, c'était la réalité du jour et de l'hiver qui la sommait de vivre.
Elle n'en revenait toujours pas d'être encore là, dans la prison. On les conduisait séparément au réfectoire. Irène suivait les gardiens sans lutter. Marcher mobilisait ses dernières forces. Elle n'aurait pas dû se trouver là. Ça aurait dû se terminer tout à l'heure. Elle, avec les pieds suspendus dans le vide.
Les supplications de Guillaume. Encore. Un fardeau qu'elle portait et porterait longtemps. Comme si elle lui avait elle-même passé la corde au cou. Se répéter qu'il avait mérité son sort, en raison de ses crimes, ne soulageait en rien son dégoût.
Elle parvint à s'emparer du plateau qu'on lui tendait. Des Médocs l'y attendaient. Elle songea que les choix qui lui importaient auparavant n'avaient plus de sens désormais. Prendre des Médocs, ne pas en prendre. Dérisoire.
Elle se saisit machinalement d'une soupe orange à l'odeur du cumin, d'un steak dur comme de la semelle, d'une bouillie de pois cassés et d'un flan tricolore.
Elle n'avalerait rien. La douleur la remplissait comme une boue, entièrement. Il lui serait impossible de faire entrer quoi que ce soit d'autre. Avant longtemps.
Devant elle se présenta une salle vide. Elle s'assit sans réfléchir sur la chaise la plus proche. Faire un pas de plus lui aurait trop coûté. Elle était soulagée de pouvoir s'effondrer. Elle fixa par hasard le sapin de Noël. Il clignotait. Elle n'arrivait plus à détacher ses yeux de cette guirlande stupide.
Elle ne la regardait pas vraiment. Il n'y avait que le sac de jute et le gibet.
Quels avaient été ses derniers mots déjà ?
Elle perçut qu'un autre entrait dans le réfectoire. Elle n'avait pas le courage de se retourner. Elle pria qu'on la laisse tranquille. Et son vœu fut exaucé.
Il s'assit loin d'elle, au fond de la cantine, hors de son champ de vision. Deux autres vinrent, deux autres l'ignorèrent.
Elle ne voulait pas savoir qui ils étaient ni s'ils faisaient ou non partie de son équipe.
Quand le quatrième détenu entra, une agitation inhabituelle la força à sortir de sa léthargie. Jordan s'était avancé entre les rangées de tables et s'arrêta quand Victoria se leva et se dirigea d'un pas rageux dans sa direction. Il se figea. Elle se campa devant lui, le foudroya du regard et le gifla.
CLAC.
Il massa sa joue en tenant son plateau à une seule main, contrarié.
