Chapitre XIX

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Un rat longeait le mur, marchant tranquillement alors qu'il cherchait de la nourriture. Il s'arrêta avant de grimper sur les jambes de quelqu'un qui ne bougeait pas. Il les utilisa comme un pont, évitant de contourner le corps, et il descendit pour poursuivre sa route. Une porte s'ouvrit et des pas se firent entendre dans le couloir qui menait à la personne assise dans la pénombre et l'humidité. Les pas s'arrêtèrent devant une grille puis le silence. Un soupir résonna.

-Tu ne veux toujours pas te confesser ? demanda la personne qui venait d'arriver.
-Je n'ai rien à confesser, répondit la seconde personne, assise de l'autre côté de la grille.
-Nyala... Qu'as-tu fait passer comme message au roi ? l'interrogea la personne debout.
-Je te l'ai déjà dit et je te le répète, je n'ai rien dit à personne, Alin ! Tu divagues complètement, affirma la jeune femme. Fais-moi sortir d'ici et on oubliera cet incident, grogna-t-elle ensuite.
-Tu peux dire ce que tu veux... Je sais que tu nous as trahis, tous, et surtout Rhiannon, lui reprocha-t-il.

Nyala se leva lentement avant de sauter contre la grille, serrant les barreaux dans ses mains, le regardant avec colère.

-Je n'ai rien fait ! Je ne vous ai pas trahi ! Fais-moi sortir de là ! s'énerva la jeune femme.
-Bien... Je reviendrais demain dans ce cas, déclara le jeune homme en s'éloignant.
-Alin ! Alin ! Reviens ici ! Sale rat ! Alin ! cria la jeune femme.

Il l'ignora et sortit des cachots, retrouvant l'extérieur. Il vit Rhiannon qui était installée sur un banc, dans le jardin du château. Il s'approcha tranquillement et s'installa à ses côtés avant de lui sourire. La princesse y réagit à peine et le jeune homme fronça les sourcils. 

-Tu sembles ailleurs ? Que t'arrive-t-il ? demanda Alin, prenant sa main dans la sienne.
-Je m'inquiète pour Nyala, soupira-t-elle doucement. Je trouve son absence étrange. À peine arrivée qu'elle repart ? Et elle n'est toujours pas revenue. J'ai peur qu'il lui soit arrivé quelque chose, poursuivit la jeune femme.
-Elle avait d'autres choses à faire. Tu ne devrais pas t'inquiéter à ce point. Nyala est une grande fille... dit-il en espérant la rassurer.
-Elle ne m'a rien dit pourtant... Je pensais que... Peu importe, souffla-t-elle. 
-Que pensais-tu ? demanda-t-il.
-Simplement qu'elle me préviendrait si elle devait s'en aller si longtemps, répondit Rhiannon.
-Et pourquoi le ferait-elle ? Il y a t'il une raison à ça ? l'interrogea-t-il.
-Non... Tu as raison, soupira-t-elle doucement. Je m'inquiète pour rien. Elle va bien, très certainement, finit-elle par dire. En tout cas, elle rate quelque chose. Orien est très beau, dit Rhiannon pour changer de sujet. Votre jardin est magnifique.
-Oh que oui ! C'est un bel endroit. J'ai adoré y grandir, dit-il en souriant. Mais ce que je préférais, c'était quand on partait d'ici pour rejoindre Deos, ajouta Alin.
-On a grandit aujourd'hui, dit-elle amusée. Mais j'aimerai revoir Deos un jour. Je me demande si ça a beaucoup changé.
-Certes, nous ne sommes plus les même mais ce que je ressentais n'a pas changé, affirma le jeune homme.

Rhiannon eut un léger sourire, ne sachant pas quoi dire. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle ressentait pour Alin. Elle appréciait sa compagnie, ça elle en était sûre mais elle ne savait pas si elle était amoureuse de lui. C'était la première fois pour elle donc elle ignorait ce qu'elle était censée ressentir. Elle se rappelait des paroles de sa mère la nuit du massacre mais Alin n'avait jamais eu l'occasion de lui manquer puisqu'elle le voyait tous les jours et passait son temps libre en sa compagnie. Alin fronça légèrement les sourcils et il soupira. Il se leva et Rhiannon se demanda où il pouvait aller mais elle ne le suivit pas. Elle le laissait à ses affaires. Elle n'avait pas à savoir ce qu'il faisait. Ca ne la regardait pas. Du moins, c'était de cette façon qu'elle voyait les choses.

Alin retourna dans les cachots, se présentant à nouveau à Nyala. Elle ne se leva pas et ne réagit même pas à sa présence. Le jeune homme fit plusieurs allers et retours sur quelques pas avant de s'arrêter et de la regarder.

-Avoue ta traitrise ! s'énerva-t-il d'un coup.
-Je n'ai rien à avouer. Comment faut-il que je te dise cela ? Je n'ai rien dit à personne pour Rhiannon. Je ne l'aurai jamais fait ! Pas même pour dix fois mon poids en or ! Jamais, tu m'entends ?! grogna-t-elle.
-Nyala... Nyala... Si tu ne dis rien, tu seras exécutée. Pourquoi nous as-tu trahi ? Pourquoi as-tu dévoilé l'existence de Rhiannon ? reprit-il calmement.
-Je n'ai rien divulguer à qui que ce soit ! Je te l'ai déjà dit ! Je ne vous ai pas trahi et encore moins Rhiannon ! Si ça t'amuses de m'entendre me répéter, alors tu n'as pas fini parce que je le dirais encore : je n'ai pas trahi Rhiannon et je ne le ferai jamais ! affirma-t-elle avec conviction.
-Pourquoi devrais-je te croire ? demanda-t-il en souriant.
-Parce que je suis ton amie ! s'exclama-t-elle. Je suis ta meilleure amie ! La plus loyale ! Tu me connais ! Alors, toi, dis-moi pourquoi je l'aurai fait ?! s'énerva la jeune femme.
-Parce que me voir heureux te rend malade, grogna Alin.
-Qu'est-ce que..? D'où sors-tu cela ?! Tu as perdu la tête, je ne vois que ça, dit-elle, un rire nerveux lui échappant.
-Maghali... Rhiannon... souffla-t-il, serrant ensuite les dents et les poings.
-Je n'ai jamais voulu Maghali et il ne se passe rien avec Rhiannon ! Je l'entraîne, ça s'arrête à ça ! certifia Nyala.
-Je vois comment tu te comportes avec elle... Ne crois pas que vos entraînements sont à l'abris des regards, lui lança le jeune homme.
-Je n'agis pas différemment avec elle qu'avec les autres, rétorqua-t-elle.
-Tu mens ! cria Alin. Dis-moi que tu ne ressens rien pour elle ! Dis-le !

Nyala garda le silence quelques secondes avant de pousser un soupir. Elle se leva et s'approcha de la grille qui les séparait toujours.

-Je ne ressens rien. Rien du tout, affirma-t-elle.
-Aargh ! Je sais que tu mens ! Tu me regardes dans les yeux et tu me mens ! s'énerva-t-il.
-J'abandonne. Exécute-moi si ça peut te permettre de te sentir mieux. Je ne peux rien dire d'autre que ça. Je n'ai rien fait, rien dit et je ne ressens rien. Rien ! souffla Nyala en allant se réinstaller sur son sol poussiéreux.

Alin grogna de frustration avant de se diriger vers la sortie. Finalement, il fit demi-tour et ouvrit la porte de la cellule. Nyala se leva, se disant qu'il avait enfin compris. Elle tendit les mains pour qu'il lui retire ses chaînes mais au lieu de ça, il la tira par le bras et l'emmena vers l'extérieur. Le soleil l'aveugla dans un premier temps, ses yeux s'étant habitué à être dans le noir pendant plusieurs jours. Depuis leur arrivée à Orien à vrai dire. Elle ne comprenait rien à ce comportement. Ce n'était pas le Alin qu'elle connaissait ça. Il était devenu totalement fou. Il continua de la tirer vers la cour principale du château. Il la jeta au sol, sous les yeux des hommes et des femmes présents qui appartenaient au camp.

-Nyala ! T'es revenue ! s'exclama un homme en souriant.
-Tu es menottée ? Alin, que se passe-t-il ? fit un second, surpris.

Alin fit de nouveau quelques allers et retours sur quelques pas avant de s'arrêter derrière Nyala qui était sur les genoux, pieds et mains liés.

-Écoutez-moi, tous ! commença le jeune homme. Aujourd'hui, Nyala sera exécutée, annonça-t-il ensuite.
-Quoi ?! Pourquoi ?! s'indigna les personnes présentes, un brouhaha s'élevant dans l'air.
-Pour trahison ! répondit-il. Je sais, cela vous surprend... Je l'ai été aussi mais Nyala nous a trahi ! Elle doit donc répondre de ses crimes et ce sera par la mort. Talia emportera son âme vers l'enfer... Elle brûlera avec tous les traîtres qui ont vu le jour. Je condamne donc cette traîtresse à la mort, dès maintenant...
-Impossible ! Nyala n'aurait jamais trahi la rébellion ! s'exclama un homme.
-Il a raison ! Jamais elle n'aurait fait une telle chose ! suivit une femme.
-Tu dois faire erreur ! continua une autre personne.
-Assez ! Je sais ce que j'avance ! Elle nous a trahi ! Cessez de défendre une personne aussi vile ! Elle nous a conquit pour mieux nous détruire de l'intérieur ! affirma Alin.
-Je n'y crois pas ! Nyala, dis quelque chose ! s'écria un des rebelles.

La jeune femme resta silencieuse. Elle savait que lorsque le plus jeune des deux cousins avait décidé quelque chose, il le faisait. Elle ne pouvait rien dire ou faire qui le ferait changer d'avis. Il était persuadé de ce qu'il avançait. Il était certain qu'elle était la traîtresse qu'il lui avait ordonné de trouver. Ce n'était pas le cas... Il n'y avait aucune preuve mais il la condamnait malgré tout et elle avait beau s'époumoner à clamer encore et encore son innocence, rien n'y faisait. Elle avait donc baissé les bras. Ca ne servait à rien. Nyala savait que sa fin allait se dérouler ici, dans cette cour. Alin fit amener une grosse bûche de bois et il la posa au sol, devant elle. Il attrapa ensuite ses cheveux pour la tirer vers le bloc et poser sa gorge dessus. Son coeur battait à une vitesse folle. Elle n'aurait jamais pensé mourir de la sorte, aussi bêtement, sur les bases d'un mensonge qu'il se racontait à lui-même. 

-As-tu quelque chose à dire avant de donner ton dernier soupir ? demanda-t-il malgré tout.

Nyala serra les dents alors que des larmes roulaient sur ses joues. Elle n'était pas prête à rejoindre Talia, la déesse de la mort, mais si tel était son destin, elle l'acceptait. Alin haussa les épaules et leva son épée, il prit une grande inspiration et sa lame fendit l'air. Un choc métallique se fit entendre alors que l'assemblée était calme, subjuguée par ce qui était en train de se passer. Alin, qui, malgré tout, ne voulait pas voir ça, avait fermé les yeux, les rouvrit et il fronça les sourcils. Rhiannon se trouvait sous sa lame, retenant son coup de son épée, celle que Nyala lui avait offerte. Elle l'avait paré, l'empêchant de tuer Nyala.

-Écarte-toi ! Elle doit payer pour son crime ! cria Alin.

Rhiannon ne bougeait pas, retenant son épée de la sienne. Des bruits de sabots se firent entendre et des cris de soulagement envahirent la cour. 

-Ca suffit ! hurla Jordin qui venait d'arriver. Assez ! Quelle est donc cette mascarade ?! Qu'est-ce qu'il te prend ?! demanda le lord d'Orien.
-Elle nous a trahi ! La traîtrise se paie par la mort ! répondit Alin, en colère.
-Libère-la ! Sur le champ ! lui ordonna le chef des rebelles. Je t'ai donné un ordre ! hurla-t-il ensuite alors qu'Alin ne bougeait pas.

Le plus jeune releva sa lame et il rangea son épée dans son fourreau. Il prit ensuite la clé qu'il avait dans sa poche et il libéra Nyala des chaînes qui l'entravaient. Elle se leva et sans hésiter, elle se plaça aux côtés de Jordin qui faisait face à Alin. Rhiannon se releva à son tour, rangeant aussi son épée. La princesse resta aux côtés d'Alin malgré qu'elle l'ait empêché de commettre un tel acte.

-Tu défends une traîtresse ! Cette bâtarde ! grogna Alin en regardant Nyala avant de cracher au sol. Ne vois-tu donc rien ?!
-Quelles sont les preuves que tu avances ? demanda Jordin, croisant les bras sur son torse.
-Elle manigance contre nous ! Tous les soirs, elle disparaît. Chaque nuit, je la vois quitter le camp pendant de longs moments avant de revenir discrètement dans sa tente ! Je lui ai demandé de trouver le traître et pourtant, il n'y a personne ! Simplement parce que c'est elle ! Elle tourne autour de Rhiannon dès qu'elle le peut ! lança-il pour prouver sa culpabilité.
-C'est donc de cela qu'il s'agit ? D'une femme ? Tu as voulu exécuter notre amie la plus fidèle pour une femme ?! grogna Jordin.
-Que racontes-tu ? Nous passons du temps ensemble parce qu'elle m'entraîne. Elle ne me tourne pas autour, fit Rhiannon qui ne comprenait rien.
-Ah ! Elle s'est bien gardée de te dire que dans tout Ponenterra, des femmes aux cheveux bruns et aux yeux bleus se font tuer car le roi a connaissance de ton existence ! s'écria-t-il.
-C'est toi-même qui nous a donné l'ordre de taire ce fait ! se défendit Nyala.
-Une véritable amie le lui aurait dit ! rétorqua Alin.
-Tu n'es donc pas un véritable amant dans ce cas ! grogna la jeune femme.
-Comment ça ? Le roi Tiphon sait que je suis en vie ? demanda Rhiannon, perdue dans toute cette affaire. Comment est-ce possible ?
-C'est ce que je me tue à vous dire ! C'est elle ! Elle nous a jeter aux serpents ! affirma Alin, hystérique.
-Jordin... Je te jure que... 
-Je sais. Tu n'as pas à t'en faire, Nyala. Je sais que tu n'as rien fait. J'ignore qui mais ce n'est pas toi, la rassura le chef.
-C'est elle ! Pourquoi mentirais-je ? Quel intérêt aurais-je à tuer mon amie ?! Je ne prends pas plaisir dans tout ça mais c'est la vérité ! Elle l'a dénoncée aux soldats du roi qui l'ont informé de la situation ! affirma le jeune homme, essayant de les convaincre.
-Je ne peux pas croire que tu aies fait une telle chose, souffla Rhiannon, fixant Nyala dans les yeux.
-Assez ! Je ne veux plus rien entendre ! As-tu seulement laissé l'occasion à Nyala de se défendre ? A-t-elle eut l'opportunité de s'exprimer ? grogna Jordin, las de ces cris qui ne menaient à rien. Si tu veux parler, fais-le maintenant. Parle, lui dit-il ensuite.
-Je disparais la nuit car j'aime simplement réfléchir à l'écart du camp. Je ne fais que grimper dans un arbre et écouter le bruit de la nature. Cela m'apaise. Ca n'a aucun rapport avec une quelconque rencontre nocturne. Je n'ai pas trouvé de traître car, soit il sait se faire discret, soit il n'y en a pas. Sachez, tous, que j'ai passé ces dernières semaines à vous écouter, tous autant que vous êtes pour découvrir qui avait vendu Rhiannon, la princesse, mais je n'ai rien découvert. Et pour finir, je ne tourne en rien autour de celle que tu convoites ! Rhiannon est mon élève. Je lui apprends à se battre et à manier l'épée. Rien d'autre ! exposa Nyala. Si je lui avais voulu du mal...
-Je serais déjà morte car elle a eu des centaines d'occasions de me tuer, compléta Rhiannon.
-Exactement ! Et pourtant, la voilà, juste à côté de toi, bel et bien en vie ! s'exclama la jeune femme. 
-Alors comment le sait-il ?! grogna Alin.
-Je n'en sais rien ! Peut-être même que c'est toi le traître ! insinua-t-elle.
-Comment oses-tu dire que je puisse dénoncer celle que j'aime à ce bâtard de roi ?! s'énerva Alin, contrarié par de telles accusations.
-De la même façon que tu m'accuses, sans aucune preuves ! rétorqua Nyala. De plus, pourquoi aurais-je donné une simple description de la princesse alors qu'ils n'avaient qu'à venir jusqu'à notre camp pour la tuer ? Pourquoi tuer des femmes innocentes alors qu'elle est ici ? Ca ne fait sens ! affirma la jeune femme. Je ne sais pas ce qu'il t'arrive Alin mais il serait temps de te ressaisir. Ou alors la folie te guette de près mon ami et il vaudrait alors mieux que tu te retires car tu n'apporteras rien de bon à la rébellion, conclut-elle ensuite.
-N'écoutez pas cette vipère ! Elle ment comme elle respire ! Elle sait user de la sournoiserie et de la fourberie ! Elle ment ! continua Alin. La princesse est à moi ! Mais elle la désire et préfère sa mort que de nous voir heureux, ensemble ! affirma-t-il ensuite.

Nyala leva les yeux au ciel. Il n'y avait visiblement rien à faire. Tous étaient contre lui, à part Rhiannon qui émettait des doutes au sujet de Nyala, et pourtant il s'obstinait à vouloir démontrer qu'elle était responsable de la fuite sur sa survie.

-Ne trouvez-vous pas étrange que Nyala soit distante avec Rhiannon pour une raison inconnue et que, lorsque le massacre a commencé, elle se soit rapprochée d'elle ? Nyala avait abandonné son entraînement et sans raison apparente, elle l'a reprit ! Je vous assure, j'en suis convaincu, que c'était dans le but de pouvoir l'éloigner du camp et la livrer aux soldats de Venom pour l'éloigner de moi ! affirma-t-il.
-Je fais encore bien ce que je veux de ma vie ! J'avais mes raisons et j'ai simplement fini par me rendre compte qu'elle n'avancerait pas sans mon instruction. Elle n'avait pas fait assez de progrès à tes côtés. Je m'efforce de lui apprendre à survivre sans avoir besoin de nous et tu l'as constaté toi-même ! Elle a paré ton coup, t'empêchant de me tuer ! C'est donc efficace. N'est-ce pas ce qui importe ? déclara la jeune femme.
-Ne tente pas de les guider vers ta sournoiserie. Ne les détourne pas de mes paroles ! cria Alin.
-J'abandonne ! C'en est assez pour moi ! grogna Nyala en s'éloignant. Tout le monde sait ici que je suis innocente de ce dont tu m'accuses. Tu es le seul à y croire ! Et ta princesse de pacotille !

Jordin poussa un long soupir. Il était fatigué. Fatigué de cette situation sans queue ni tête et de son voyage. 

-Le spectacle est terminé ! Retournez à vos occupations ! ordonna-t-il aux membres de la rébellion avant d'avancer vers Alin, l'attrapant par le bras.

Il le tira jusqu'à l'intérieur du château. Jordin le força ensuite à s'asseoir et il lui mit son poing dans la figure. Il espérait que ça lui remettrait les idées en place et qu'il le méritait pour avoir tenter de tuer leur amie. Son amie. La plus proche qu'il ait jamais eu.

-Es-tu devenu fou, cousin ? grogna Jordin.
-Je t'assure que... souffla Alin avant d'être interrompu.
-Cesse donc ces idioties ! Tu connais Nyala mieux que quiconque ! T'a-t-elle déjà trompé, déçu ou menti ? demanda-t-il.
-Elle m'a prit Maghali, affirma-t-il.
-Cette histoire appartient au passé ! De plus, tu sais que c'est faux. Elle ne l'a jamais désirée contrairement à Maghali. Seule elle est la responsable de votre rupture. Pas Nyala ! Et serais-tu en train de me dire que tu voulais la tuer pour une histoire d'amour ? demanda-t-il avant de rire nerveusement. Te rends-tu compte à quel point c'est ridicule ?!
-Je l'ai perdue une fois... Je ne la perdrais pas à nouveau, souffla Alin, baissant le regard.
-Crois-tu sincèrement que c'est le meilleur moyen ? Ne crois-tu pas que tu vas l'effrayer par la folie qui animait ton regard dans cette cour ? demanda Jordin. Tu n'es qu'un idiot ! Je pars quelques semaines et voilà ce qui advient du camp ? Des histoires d'amour et de rancœur qui ne tiennent pas debout ? Que vont penser nos hommes de toi à présent ?! Le chef qui voulait tuer son bras droit ! Ils vont te craindre et nous n'avons jamais usé de la peur pour les garder sous contrôle ! Ils se méfieront de toi ! Idiot ! Quand comprendras-tu qu'elle est ton amie et qu'elle ne t'a jamais voulu aucun mal, ni à Rhiannon ?! N'as-tu donc pas réfléchi ?! 
-Alors pourquoi Rhiannon n'a de cesse de me parler d'elle s'il ne se passe rien ? grogna le plus jeune.
-Car c'est son amie ! Elle te parle de son amie avec qui elle passe beaucoup de temps ! Quel est le mal ?! Tu devrais être heureux qu'elle ne se sente pas seule ! Tout ne tourne pas autour de toi et de ta personne ! s'exclama le chef des rebelles. Je te croyais bien plus sage que ça. Tu te révèles être un imbécile imbu de lui-même... Je suis déçu. Pire... Tu me déçois.
-Jordin... souffla Alin.
-Non. Je ne veux plus rien entendre. Prends le temps de te calmer et de réfléchir à tes actes. Ils ont des conséquences et je crains qu'elles n'aient rien de bon à nous apporter, grogna-t-il.

Il laissa son cousin sur cette chaise, s'éloignant. Il refusait d'en parler d'avantage. Il était exténué mais soulagé malgré tout. Il était arrivé à temps mais dans le fond, pas réellement. Il était même arrivé un peu trop tard mais Rhiannon lui avait sauvé la vie. Elle s'était interposé entre la lame d'Alin et Nyala... L'héroïne du jour était la princesse. Il avait simplement pu avoir l'autorité nécessaire pour cesser ce spectacle pitoyable mais elle avait sauvé Nyala. La seule chose positive qui en ressortait était que Nyala l'entraînait bien pour qu'elle ait su réagir au bon moment. Cette journée resterait gravée dans les mémoires mais sans aucun signe positif. Jordin était en colère contre Alin. Il comprenait sa crainte mais elle ne justifiait rien. Oui, plus jeune, trop jeune, il avait perdu celle qu'il voyait comme l'amour de sa vie. D'abord lorsqu'elle fut promise à Olivio Reath et ensuite lorsqu'elle fut prétendument tuée. Aujourd'hui, il l'avait retrouvée et craignait qu'elle lui soit à nouveau retirée mais il n'avait pas le droit d'agir avec une telle folie, une telle impulsivité pour cette raison. Jordin savait qu'Alin se mentait à lui-même et qu'il le savait lui aussi mais il avait préféré se laisser convaincre par ses pensées qui n'avaient aucun sens plutôt que de faire appel à sa raison. Il avait laissé la jalousie et la peur l'aveugler et il avait failli tuer son amie. Ce genre de chose ne pouvait pas arriver. Pas chez eux. Pas dans son camp. Jordin redoutait maintenant que Alin ait retourné les esprits de certains contre Nyala qui était totalement innocente. Si le doute venait à semer le trouble, il pourrait alors dissoudre la rébellion et recommencer à nouveau. C'était déjà assez compliqué de gérer tout ça alors il ne pouvait se permettre que cela arrive. Il sortit donc du château et s'arrêta pour s'adresser à tous.

-Veuillez m'écouter et faire passer le message aux absents, dit-il d'abord. Je vous prie de pardonner Alin. Je pense que le voyage l'a fatigué et qu'il n'avait plus toute sa tête. Il est évident que Nyala n'a rien fait de ce qui a été avancé par mon cousin. Elle n'aurait jamais trahi la rébellion. Je vous prie donc d'effacer ces derniers instants de votre mémoire. Oubliez ces inepties et reprenons nos vies comme si cela ne s'était jamais produit. Je vais dès à présent reprendre les choses en mains, leur assura-t-il.

Garmen avait raison. Il leur fallait un endroit où rester sans avoir à bouger à nouveau et y envoyer toute nouvelle recrue désireuse de participer à la plus grande rébellion de l'histoire. Il ne quitterait plus leur camp. Jamais il ne laisserait une telle chose se reproduire à nouveau. Une fois son petit discours donné, il chercha après Nyala. Il fallait qu'il lui parle, qu'il sache si elle comptait rester malgré ce que lui avait fait Alin. Il chercha en regardant vers le ciel et il fini par la voir perchée sur une branche. Il grimpa à l'arbre et se hissa sur la branche pour s'y asseoir.

-Est-ce que tu vas bien ? demanda-t-il doucement.
-Mis à part que mon ami a essayé de me tuer et que ma seule amie féminine ait cru à ses sornettes... Oui, je vais bien, dit-elle avec ce sarcasme qu'il connaissait bien.
-Je suis navré, souffla-t-il.
-Je sais... Je sais. Cependant, ce qui m'a le plus choquée, c'est sa manière d'avoir agis avec moi. Nous étions à peine arrivé à Orien qu'il m'a attiré vers les donjons et m'a mise en cage, tel un animal. Il me traitait comme une prisonnière qu'il n'aurait jamais rencontré auparavant. Pas une seule seconde je n'ai ressenti de l'amour, de la tristesse ou de la déception de sa part. Seulement de la colère, lui confia la jeune femme.
-J'ignore quelle mouche l'a piqué mais ça n'arrivera plus, je te le promets. Ceci dit, si tu veux t'en aller, reprendre un nouveau départ loin de lui, de nous, je le comprendrais... lui assura-t-il.
-Pour aller où ? Vous êtes ma famille... Une famille un peu spéciale visiblement, dit-elle en riant, tentant d'apaiser les tensions.
-Pour être spéciale, elle l'est, répondit Jordin amusé avant de soupirer. 
-Je vais avoir besoin de temps mais tout ira bien, ne t'en fais pas, lui lança Nyala avant de sauter de sa branche. Ne m'en veux pas mais j'ai besoin d'être seule, fit-elle en s'éloignant.

Jordin hocha la tête, la laissant partir. Il comprenait son besoin et il ne comptait pas insister. Elle semblait aller bien même si elle devait tout de même être blessée et outrée par ce qu'il s'était passé. Le chef des rebelles espérait sincèrement que tout allait rentrer dans l'ordre et que ce serait bien vite oublié mais il en doutait. De telles actions avaient d'importantes conséquences. Et comme il l'avait dit à Alin : elles n'amenaient rien de bon.

The Lost Kingdom [EN COURS]Where stories live. Discover now