XVIII.

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 ZeratoR observait la voûte céleste. D'ici, on ne voyait pas les étoiles. Il y avait trop de lumières. Trop de pollution... trop de choses entre eux et le ciel. C'était une des raisons pour lesquelles il détestait les villes. Ils détestaient les villes. Toutes les personnes dont il avait absorbé l'âme se manifestaient dans cette haine.

Il sentait leurs vies continuer en lui et se demandait s'ils lui pardonneraient un jour. Si à sa mort, ils seraient tous libérés. En attendant, il faisait avec. Et toutes les personnes qu'ils avaient vues disparaître faisaient intégralement partie de lui. Il n'avait pas le choix, se séparer de l'Autre demandait un sacrifice qu'il n'était pas prêt à demander à quiconque.

Une étrange brise vint glisser sur sa peau et il ferma les yeux pour en profiter. Au loin, il entendait Antoine jouer, c'était toujours plus simple quand il n'avait pas de public. Quoique, Ultia ne devait pas être loin pour qu'il choisisse cette mélodie.

Quelque chose d'étrange remua en lui. C'était l'un de ses hôtes. Il n'eut pas le temps d'investiguer plus en profondeur. L'instinct de l'Autre lui indiquait qu'il y avait un danger. Et que ce danger était en compagnie de Ponce.

Ses muscles bougèrent avant qu'il puisse réfléchir. Il identifiait sans mal les ondes de chacun des membres de la troupe. Retrouver son homme était d'une simplicité enfantine. Il nota tout de même la présence de deux intrus. Pour l'instant il s'occupait de Ponce, l'autre pouvait attendre.

Il lui fallut quelques secondes pour évaluer la situation. Le prince héritier mis en joue par un Ponce de très mauvais poil. Finalement, ce n'était peut-être pas lui qui courrait le plus de risque et le meneur n'avait pas réellement envie que sa soirée se transforme en mission pour tenter de cacher le corps de l'un des hommes les plus importants du pays.

— Ponce, pose ce couteau.

L'héritier ne demandait qu'une distraction pour agir. ZeratoR sourit devant sa tentative. Il adopta le ton calme et directif qu'il avait appris à maîtriser depuis des années. Celui qu'il prenait lors de ses représentations. Contrairement à ce que la plupart des gens pensaient, l'hypnose n'avait rien de sorcier.

Au fond de lui, l'Autre remuait, il n'avait pas été nourri depuis longtemps et une nouvelle âme lui ferait toujours du bien. ZeratoR le mit en sourdine. Il savait désormais que peu importe ses efforts, il lui était impossible de se débarrasser de cette voix. Alors, il avait appris à l'ignorer, et il était devenu excellent.

Le prince le fixait, incapable de bouger, comme il le lui avait ordonné. On pouvait lire la rage dans ses yeux.

— Est-ce que tu sais que si on te retrouve ici, tu nous condamnes tous à mort ? demanda ZeratoR.

— Et alors ? Vous pensez que vous méritez mieux ? Vous...

ZeratoR n'eut pas le loisir de savoir ce qu'ils étaient parce que Ponce venait d'envoyer son poing en plein visage du prince héritier qui tomba au sol, surpris.

— Mériter ? Toi ? Tu oses parler de mérite ? lui cria le jongleur.

ZeratoR s'interposa. Certes, le jeune homme méritait bien qu'on le remette à sa place, mais il valait mieux éviter les dégâts.

— Rayenne ?

Ils n'avaient pas été particulièrement discrets et Antoine était venu voir ce qui se passait, Ultia sur ses talons.

— Ah ? Alors c'est lui ? C'est marrant, il ressemble pas trop aux portraits... remarqua celle-ci.

Le prince héritier enrageait et Antoine qui s'était précipité sur lui se reçut un crachat en plein visage.

La Troupe des DamnésWhere stories live. Discover now