LIII.

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 ZeratoR entendit le grincement particulier du fauteuil de Rivenzi avant qu'il n'ait le temps de toquer à la porte et alla lui ouvrir.

— Je vois que je peux abandonner la carrière d'espion, le salua Riv.

— Je dois en conclure que ton rapport va être décevant ?

Rivenzi souffla et roula à l'intérieur, refermant la porte derrière lui. ZeratoR l'avait envoyé avec Dach et Gius en expédition dans la ville la plus proche pour prendre la température de l'ambiance générale du pays quant à leur existence.

Jusqu'à présent, ils avaient uniquement fréquenté des lieux loin de toute civilisation et plusieurs parfums de dissuasion avaient été utilisés autour des camps pour éviter que des aventuriers ne tombent dessus par hasard. Ils ne passaient que quelques jours à un endroit et prenaient bien soin de masquer leurs traces en partant.

Aucun garde n'avait été repéré et aucune tentative d'attaque quelconque. Ils avaient quitté la capitale depuis plus d'un mois et avaient vécu coupés du monde depuis. C'était une décision dictée par l'urgence et l'absence de meneur. ZeratoR avait toujours insisté pour que le groupe reste au contact de la population. C'était pour lui un moyen de l'éduquer, de montrer qu'ils n'étaient pas des monstres.

Après le coup d'éclat d'Amazon, le discours risquait d'avoir plus de mal à se faire entendre. C'était la première fois qu'ils prenaient le risque de s'établir à distance raisonnable d'une grande ville. Le meneur savait qu'il était plus simple de se fondre dans une foule que de tenter de s'infiltrer dans un village. Pour mener, il avait besoin d'informations, or il en manquait cruellement. Est-ce que le roi était mort ? Est-ce que la ville se reconstruisait ? Est-ce qu'on les chassait ?

— Bon, j'ai une bonne nouvelle, et des tas de mauvaises nouvelles.

— Commence par les mauvaises.

— Je pense que c'est mieux de commencer par la bonne.

ZeratoR leva les yeux.

— Ok, super, mec, souffla-t-il.

Il pouvait entendre le sourire dans la voix de Rivenzi. Ce dernier glissa quelque chose dans sa main. Une paire de lunettes ! Le meneur les enfila aussitôt. Des lunettes de soleil ! Et vertes qui plus est. L'idée de ne plus passer la moitié de son temps les yeux fermés le réjouit. Effectivement, c'était une bonne nouvelle.

— Incroyable... lâcha-t-il.

— C'est plutôt pas mal, hein ? On a passé des heures à chercher la bonne couleur.

— Vous avez perdu du temps sur la mission à cause de ça ? s'insurgea le détenteur des toutes nouvelles lunettes.

— Rohh, on a juste fait quelques détours, rien de grave. Elles te plaisent, au moins ?

— Bien sûr qu'elles me plaisent ! Merci, vous êtes vraiment les meilleurs...

— Ah bah, un compliment de temps en temps ça fait pas de mal.

— Comme si je vous complimentais jamais...

— Pas assez, en tout cas.

— Bon, les mauvaises nouvelles !

— Frédéric Sauveur est vivant. Il a présenté son nouvel héritier. Un fils obtenu d'une union légitime cachée. Il a dix-sept ans et il a tenu un discours où il accusait tous les altérants d'être des terroristes. Il y a une nouvelle loi qui autorise à tuer un altérant s'il semble prêt à utiliser la violence. Les primes pour les dénonciations d'altérants ont grimpé. Il y a des jolis portraits de nous partout en ville et les gens sont plus que jamais convaincus qu'on est des merdes. Ah oui, aussi, apparemment, ce qui s'est passé à Amazon, c'était une tentative de coup d'État d'Étoiles avec l'appui des forces altérantes.

La Troupe des DamnésWhere stories live. Discover now