Solitude au rebut

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Rue de Rivoli, Romane marchait à vive allure. Déjà deux heures s'étaient écoulées depuis la conversation d'avec Liam. Pendant ce laps de temps, Érine, Anne-Catherine et la tante Claudine s'étaient liguées pour la tenir suspendue au téléphone, toutes trois impatientes de découvrir comment les retrouvailles s'étaient passées. Après avoir relaté les grandes lignes de cette rencontre à ses deux amies, elle promit de les rappeler. Concernant la tante Claudine, elle fut plus brève encore puisqu'elle devait prendre la route dans quelques jours afin de lui rendre visite dans le sud-ouest de la France.

Arrivée à l'hôtel Meurice, Romane patienta devant une réceptionniste, différente de la veille. L'employée jeta une brève œillade dans sa direction, sans relever la tête ni même formuler de politesses en retour à celles exprimées par Romane. Elle avait des allures de mannequin dans son petit tailleur chic parfaitement ajusté qui lui donnait une élégance raffinée et très adaptée pour les lieux.

— Mademoiselle ?Finit alors par l'interpeller Romane.

La réceptionniste releva enfin le regard du carnet de notes qui l'absorbait tant, le port de tête digne d'une princesse. Elle détailla celle qui lui faisait face et l'avait interrompue dans sa lecture puis rapidement une moue dédaigneuse défigura ses jolis traits.

Romane piquée au vif rougit. Était-ce si flagrant qu'elle ne possédait pas le nombre de zéro requis sur son compte en banque pour oser se présenter dans le palace et la déranger ainsi ?

Même l'onéreux sac à main de cuir beige offert par Flora n'avait pas eu raison de l'œil expert de cette créature de magazine. Sans doute ne trouvait-elle pas grâce à ses yeux avec sa robe déjà trop portée ? On l'avait déjà si souvent complimentée sur le fait que cette coupe style patineuse mettait si bien sa silhouette en valeur. Ce n'était pas non plus la couleur marine unie de celle-ci qui lui piquait les yeux...

La sonnerie d'ouverture des portes de l'ascenseur se fit entendre dans fond du hall. Elle agit comme un réveil et l'hôtesse lâcha enfin un « madame ? » aussi froid qu'un glaçon.

— Je suis attendue, bafouilla Romane, je voulais déposer ce sac...dit-elle soulevant un petit bagage à main. Puis elle s'interrompit,consciente que son interlocutrice la dévisageait comme si elle avait de la salade entre les dents.

— Et qui vous attend selon vous ? La questionna-t-elle narquoise.

— Moi ! Claqua une voix masculine dans le dos de Romane.

La réceptionniste se leva spontanément, le visage transfiguré par un masque mielleux.

— Monsieur Laurence, susurra la beauté froide, sourire crispé, roulant des yeux.

— Vous monterez le sac de mademoiselle Saint-Clair dans ma chambre, lui commanda-t-il fermement.

La jeune femme déstabilisée le saisit immédiatement faisant tomber les brochures touristiques disposées sur l'avancée du meuble de réception au passage.

Sans aucune considération supplémentaire pour la femme, Liam se tourna vers son invitée.

— Tu es radieuse Darling, lui dit-il en la gratifiant d'un léger baiser sur la bouche.

Elle lui répondit par un sourire éblouissant, conquise par ce bel homme si prévenant. Un peu aussi, il fallait bien l'avouer, à cause de la mésaventure de l'employée prise en flagrant délit de snobisme mal placé.

Ils se dirigèrent vers le « bar 228 » qui faisait partie de l'hôtel si renommé pour ses clients célèbres et ses décors utilisés par le cinéma. Pour Liam fréquenter des endroits prestigieux n'était apparemment qu'une formalité. Romane, quant à elle, était loin d'être blasée et savait s'émerveiller autant des choses simples que de lieux mythiques qui avaient inspirés tant d'artistes comme celui-ci.

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