IX

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Le dimanche fut étrange pour tous. Les élèves de S3 gardaient la tête baissée, la mine inquiète, la fatigue de la soirée de la veille encore peinte sur leur visage. La majorité d'entre eux restait enfermée entre la bibliothèque et leurs dortoirs, à avancer sur leur roman pour la fin d'année, dans un silence presque pesant. Beaucoup regrettaient quelques erreurs de la veille dues à l'ivresse, et les autres tremblaient d'avance en imaginant les punitions d'Elysia.

  Le lundi matin, Ondine et la S3 B avaient cours d'écriture dès la première heure. L'objectif de cette heure était de travailler sur la vie d'auteur ou d'autrice en elle-même ; ainsi, ils voyaient des cours sur les syndromes d'auteurs, sur les conférences, sur les salons auxquels se rendre...

  — Donc, au cours de votre vie d'auteur, vous serez confrontés à de nombreux problèmes. Pour autant, vous ne devez pas abandonner, et c'est pour cela que nous allons les voir, afin que vous puissiez mieux les appréhender si cela vous arrive un jour.

  Ondine adorait les cours. Non seulement elle avait l'impression de découvrir un vaste monde face à elle, mais en plus, elle pouvait écrire durant les cours, ce qu'elle voulait, tant que cela permettait d'avancer pour son projet final. Cependant, dans les cours comme ceux-là, écrire n'était pas bien vu, car le professeur n'apportait rien en aide pour l'écriture en elle-même.

  — Le premier syndrome que nous verrons est le syndrome de l'imposteur. Ce syndrome pousse les auteurs à ce qu'ils pensent que leurs écrits ne sont pas à la hauteur, ou que s'ils le sont, ce n'est pas grâce à eux, mais plutôt à de l'aide extérieure. C'est un syndrome (malheureusement) assez courant.

  Ondine, son ordinateur face à elle, prenait en note le cours.

  — Ensuite, nous avons le syndrome du milieu. Ce syndrome consiste à ce qu'arrivé au milieu de votre roman, soit vous vous ennuyez à l'écrire, soit vous avez passé une grande partie de vos intrigues et cela vous intéresse moins. Également, le syndrome du 6e chapitre... C'est moi qui l'ai appelé comme cela, lâcha Arsène, le professeur. C'est le syndrome d'après incipit. Après avoir présenté l'univers et les personnages, vous voulez arrêter là.

  — Oh ! s'exclama Louana. J'en suis à là ! Il faut faire quoi pour lutter contre ce fléau ?

  Sa phrase arracha quelques rires dans la salle. Ceux qui ne rirent pas à voix haute envoyèrent des émojis amusés, ce qui redoubla les rires. Le professeur, qui jugea que c'était beaucoup de rires pour une si petite chose, n'en dit rien, mais répondit :

  — Justement ! Je vous présente tous les syndromes, et ensuite, je vous expliquerai comment y remédier.

   — Cool, merci !

  Ondine releva la tête de son ordinateur pour observer son professeur traverser la salle, tout en déclamant son cours. Un soupir satisfait lui échappa : elle était si bien, là ! En cours, avec une classe amusante, et avec des sujets intéressants ! Simplement, son cœur se serrait, sans doute à cause de l'angoisse et de la frustration. D'un côté, elle sentait que les réactions de ses parents sur ses actions à l'Académie risquaient d'être très négatives, et Ondine craignait de profiter pleinement. L'ombre de ses parents flottait au-dessus de ses épaules.

  D'un autre côté, Ondine était très frustrée. Les cours étaient géniaux, mais elle avait l'impression de ne pas avancer assez vite dans son roman. Elle en était au troisième chapitre, mais avait déjà tout réécrit quatre fois, car elle n'arrivait pas à se décider sur l'époque et le fil rouge concret. C'était si compliqué, d'écrire ! C'était son premier vrai projet, et c'était intimidant.

  « ONDINE ! »

  La jeune femme cliqua sur la notification. Elle craignait toujours de recevoir de tels messages, alors son cœur s'était accéléré vivement.

L'Académie d'Écriture [TERMINE]Where stories live. Discover now