XXXVIII

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Ensuite, ils partirent au bal. Elysia serra Philomène dans ses bras ; la pauvre femme tremblait encore d'angoisse. La musique fut relancée, tout fut replacé normalement, comme s'il n'y avait rien. Néanmoins, sur Internet, les journalistes présents le soir-même publiaient déjà les clichés pris. Personne n'avait eu le réflexe d'enregistrer Elysia et son discours, ce qui navra presque la jeune femme. Mais c'était suffisant : de nombreux journalistes devaient avoir vu les publications, et Elysia serait un peu plus tranquille, normalement.

  Aurélien évitait soigneusement Elysia. La jeune femme, qui s'était placée près du buffet avec un verre de champagne à la main, fut bientôt rejointe par Lola. L'élève attrapa un verre de jus de raisin, et dit :

  — Où est M. Courpere ?

  — J'en sais rien, répliqua Elysia. Il a refusé de me parler, tout à l'heure, et...

  — Vous n'avez pas à angoisser, déclara Lola. On lui a dit que l'on savait que vous vous étiez embrassé, et il a dit qu'il se doutait que vous nous l'aviez dit. On lui a demandé s'il était content, et il a simplement souri, avant de répondre que cela ne nous regardait pas. Je suis sûre et certaine qu'il vous aime, Elysia. Il n'attendait que vous, et qu'un signe de vous, pour en être enchanté.

  Elysia sentit un soupir lui échapper. Elle devait lui parler, et vite. Sans quoi, elle se connaissait, elle risquait d'auto-saboter le tout uniquement à cause de son angoisse.

  Le bal se déroula plutôt bien. Les élèves commentaient tous la scène avec les journalistes, car ceux présents entreprirent de tout raconter à tout le monde ; les regards se tournaient vers Elysia, qui discutait volontiers avec tous les élèves qui venaient parler avec elle. Néanmoins, Aurélien quitta la soirée tôt, à la plus grande surprise de la jeune femme, qui ne se voyait pas abandonner ses élèves tout de même. Ainsi, elle resta jusqu'à minuit, puis salua tout le monde, remercia tous les élèves et les professeurs d'être venus, et partit en hâte jusqu'aux appartements des professeurs. Elle s'arrêta devant celui d'Aurélien, et prit une grande inspiration, avant de s'approcher de la porte. Elysia se ravisa pourtant : Lola lui avait dit de réfléchir, et elle n'avait pas tort, car elle ne savait pas quoi faire vis-à-vis d'Aurélien. L'aimait-elle ? Elle n'en avait rien.

  Elysia partit donc jusqu'à sa chambre. Elle prit une douche, mit son pyjama le plus large et le plus confortable, et s'échoua dans son lit, comme une étoile de mer.

  A son réveil, la lumière se glissait entre les rainures du volet. Elle mit quelques minutes avant d'émerger, puis prit conscience qu'elle était enfin rentrée. Quel bonheur ! Ses draps étaient beaucoup plus confortables que ceux de la garde à vue, en tout cas. Durant toute la journée, elle croisa à peine Aurélien ; il lui jetait de simples brefs sourires avant de repartir. Cela faisait mal à Elysia, qui regrettait à chaque instant son acte. Les paroles de Lola, censées la rassurer, lui revenait en boucle. « Il n'attendait que vous et qu'un signe de vous ». Elle lui avait offert ce signe plus qu'éloquent, et désormais, il la fuyait.

  La jeune femme n'en dit mot à personne. Durant toute sa vie, elle avait toujours senti une présence derrière elle, qu'elle avait désigné comme étant celle des ancêtres ; mais depuis sa garde à vue, elle ressentait simplement un vide, prenant et effrayant. Elysia avait l'impression d'être seule, et depuis l'éloignement d'Aurélien, c'était encore pire. En plus, c'était les vacances ; les élèves rentrèrent, pour beaucoup ; il ne restait plus grand monde à l'Académie, et Elysia se plongeait dans le travail.

  Durant les deux semaines, elle reçut plusieurs fois la visite de policiers, qui ne prévenaient jamais. Ainsi, ils pouvaient voir qu'elle passait son temps à travailler dans son bureau, à préparer la prochaine période et les prochains événements pour l'école. Elysia travaillait aussi sur les plans pour construire une nouvelle aile à l'Académie, plus perfectionnée, dédiée à l'art graphique et à la communication. Les professeurs d'art ou de marketing auraient ainsi plus de place, et auraient droit à des salles beaucoup plus récentes.

L'Académie d'Écriture [TERMINE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant