XIX

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Quelques jours passèrent. Les élèves de S3 dirent adieu à leur dernier mois de septembre vécu en tant qu'élèves de spécialisation et saluèrent le mois d'octobre, qui s'annonçait chargé. Les DS, les devoirs sur table, commençaient dès la première semaine. De plus, ils avaient assisté à la conférence de Désirée Plessis sur l'écriture et les manières de trouver l'inspiration et aussi à la remise des diplômes des élèves qui avaient eu le leur aux rattrapages.

  Octobre débutait sur les chapeaux de roues. Elysia avait recontacté Ayden, évidemment, et ils avaient commencé à parler par SMS. La directrice prenait garde à chacun de ses mots, pour que rien ne puisse être réutilisé en cas de soucis : c'était un journaliste et elle voulait être prudente. Cependant, Ayden flirtait ouvertement avec elle et elle hésitait grandement entre entrer dans son jeu ou rester plutôt neutre par message pour être sûre de ne pas prendre de risques.

  Le 2 octobre, Elysia dînait tranquillement dans la salle à manger. La majorité des élèves étaient là, car ils avaient prévu une soirée « football ». Lens jouait contre Lyon ; Luke et Alex s'étaient engagés à préparer la salle de réception pour que tous regardent le match sur des fauteuils et des poufs. Ainsi, ils mangeaient avant le match, pour pouvoir grignoter des gâteaux après.

  — Madame de Clermont ! s'écria un garde d'Okeanos en entrant, le pas pressé. Un homme demande à entrer dans le château, il dit vous connaître. C'est urgent, d'après lui.

  Tous les élèves relevèrent la tête de leurs plats, surpris. Elysia, qui discutait avec Aurélien et Philomène à table, fit de même, et répliqua immédiatement :

  — Qui est-ce ?

  — Ayden Morel, Madame. Y'a-t-il nécessité que nous le renvoyions ?

  — Ayden ? répéta Elysia en se levant. Non, faites-le entrer.

  Elysia posa sa serviette sur la table. Elle murmura quelque chose à Aurélien, avant de partir en de grandes enjambées jusqu'à la porte de la salle. Le professeur marmonna un juron, ce qui surprit tout le monde ; il souffla à Philomène :

  — S'il se fait annoncer de cette manière, c'est mauvais signe. Je rejoins Elysia.

  — Je me charge de surveiller les élèves ici, répondit la professeure.

  Aurélien hocha la tête. Il se hâta pour emprunter le même chemin que la directrice quelques instants auparavant et remarqua immédiatement Elysia. Celle-ci venait de déboucher dans le couloir où se trouvait Aurélien, quelques mètres plus bas ; elle était accompagnée par Ayden. Le duo rejoignit le professeur. Ayden serra la main d'Aurélien, avant de souffler :

  — Je suis navré d'arriver ainsi sans prévenir. J'ai hésité à t'envoyer un message, Elysia, mais j'étais déjà en route et je ne voulais pas perdre une minute.

  — Ne t'en fais pas, ce n'est pas grave. Il s'est passé quelque chose ?

  Ayden hocha la tête. Il posa un regard sur la porte à leur droite, où beaucoup d'élèves se penchaient pour mieux entendre la conversation. Puis, il dit :

  — Pourrions-nous en parler ailleurs ?

  — Bien sûr. Allons dans mon bureau.

  Elysia, Ayden et Aurélien partirent d'un pas pressé. Ariana, Sarah, Ondine, Alex et Mary, installées à différentes tables, se jetèrent un simple regard ; puis, Alex s'exclama :

  — On part à la soirée foot ?

  Ce fut une parfaite occasion pour quitter la pièce. Tous se levèrent, presque en même temps, afin de vider leur assiette dans les poubelles, puis de partir en direction de la salle de réception non loin de là. Ils s'installèrent, environ à soixante, puis Alex se mit debout devant l'écran. Luke se battait avec le vidéoprojecteur et l'ordinateur qui était connecté à celui-ci, mais tous attendaient les nouvelles d'Alex.

  — Je viens d'aller voir sur Internet. Ayden Morel est un journaliste pour Le Fameux Gaulois, un petit journal. Il a tutoyé Elysia et je l'ai vu passer un bras autour de sa taille lorsqu'ils sont repartis.

  — Tu penses qu'ils sortent ensemble ? demanda François, un sourire aux lèvres.

  — Ce serait décevant ! s'exclama Lucie, qui dégustait un cookie. Je m'attends vraiment à ce qu'elle finisse avec M. Courpere, moi !

  — J'espère aussi, déclara Théia. Aurélien a l'air vraiment gentil, et il est aux petits soins pour elle.

  — Rohlala, quoi qu'il arrive, ça va m'inspirer pour ma romance ! ajouta Rose, en tapant dans ses mains. J'ai hâte de voir ce qu'il va se passer !

  Ondine, quant à elle, restait assise à côté de Sarah, silencieusement. Elle n'aimait pas le fait qu'Elysia s'approche d'un homme, car cela pourrait signifier qu'elle aurait des héritiers. Et dans ce cas, le sang de Béryl, et par extension, celui d'Alcyone, coulerait dans les veines de l'héritier de Clermont. Soudainement, un raclement de gorge se fit entendre dans toute la salle. Le silence se fit de nouveau, et Philomène, à la porte, s'exclama :

  — Vous n'allez pas passer votre soirée à raconter des ragots sur vos professeurs, n'est-ce pas ? Votre directrice a autorisé une soirée dédiée au football, et non pas une soirée tournée vers les rumeurs à son sujet. A présent, lancez le match. Je vais regarder avec vous.

  Philomène traversa la salle, son sac sur l'épaule. Elle le posa au sol, et en sortit un pull, qu'elle faisait au crochet. Elle l'avait déjà bien entamé, d'après ce que purent remarquer les élèves.

  — Vous faites un pull pour un élève, Madame ? demanda Ysa.

  — Non, répondit Philomène, penchée sur son ouvrage. Ne le dites pas, mais je tricote un pull pour le Noël des professeurs. Celui-là est celui de Madame Carine.

  — C'est adorable, déclara Théia, souriante.

  Philomène lui jeta un regard satisfait, avant de se remettre dans son projet. Luke parvint enfin à diffuser le match, qui commençait à peine : ils passèrent le reste de la soirée devant le grand écran, à sautiller quand des occasions pour marquer se présenter, et à crier quand l'équipe qu'ils ne soutenaient pas réussissaient à obtenir elle-même une occasion.

  Dans le bureau d'Elysia, l'ambiance était tout autre. Installée derrière son bureau, Aurélien debout derrière elle et Ayden assis face à elle, la jeune femme apparaissait tout aussi stricte que son rôle de directrice était censée lui imposer à l'accoutumée, bien qu'elle ne s'y tenait pas. Le visage sombre, elle réfléchissait à toute allure.

  — L'article sera publié demain par cet idiot de Théo Lambert, dans le journal La Gazette de la Meuse. C'est le journal dont nous avions parlé, lors de la soirée en boîte, celui qui a déjà écrit un article assassin sur toi. Je ne sais pas si cela est vrai, mais dans tous les cas, il faut que tu te prépares. 

  — Ils indiquent donc qu'Ondine est la cousine d'Elysia et disent qu'Elysia prépare un plan pour récupérer l'Okeanos ? marmonna Aurélien, bras croisés.

  — Oui, confirma Ayden.

  Elysia restait silencieuse. Tête baissée, elle tapait nerveusement du pied au sol, tout en triturant ses mains avec angoisse. Ayden ajouta :

  — Que ce soit vrai ou non, j'ai préféré te prévenir, Elysia.

  — Merci, Ayden. Est-ce que tu aurais le numéro de ce Théo Lambert ?

  Ayden fronça les sourcils. Il fit une moue songeuse, puis répondit :

  — Non, mais j'ai celui de son chef. Il est ami avec le chef du journal où je bosse, ce qui explique le fait que j'ai eu l'information en avant-première.

  — Quand sont imprimés les journaux ?

  — Ils le sont sans doute actuellement.

  Elysia hocha la tête. Elle avait un plan. Ce serait compliqué, et ils allaient jouer contre la montre, mais... Le jeu en valait la chandelle. Si Nérée d'Okeanos croyait qu'elle montait un complot à son encontre, Elysia n'en donnait pas cher de sa peau, et de celle de son école.

L'Académie d'Écriture [TERMINE]Where stories live. Discover now