XV

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— C'est quoi, alors, cette mission que t'a confiée Elysia ? demanda Lucie à Gabriel.

  Ils se trouvaient tous deux dans le dortoir du jeune homme, qu'il partageait avec Louis, Luke et Adrien. La jeune femme s'était assise sur le lit de son meilleur ami et savourait un cookie, tout en l'observant écrire son roman sur son ordinateur, à même le sol.

  — Elle veut que je filme. Elle veut que je montre ce qu'il se passe vraiment à l'Académie. J'ai déjà fait des épisodes « La vie à l'Académie », elle le sait, elle a vu les vidéos, elle me l'a dit. Elle ne m'a pas demandé de supprimer parce qu'elle se fichait que je montre quelques éléments de cours, nos bals et nos sorties à cheval en soirée avec Madame Claire.

  — En même temps, ce sont les meilleurs trucs ici.

  — Pas faux. Mais du coup, elle a rien dit, et elle veut que je filme plus. Elle veut aussi que je la filme ce soir, à table, en scred, quand elle va faire un petit discours.

  — Impeccable, alors. Ce ne sera pas bien compliqué, et cela va faire augmenter ta communauté en même temps.

  Gabriel hocha la tête. Soudainement, son visage s'illumina ; il se redressa vivement, et lâcha :

  — Let's go ! J'ai reçu un message d'Adrien ! Je lui ai demandé s'il était partant pour sortir avec moi sur Metz pendant les prochaines vacances, comme tu m'avais dis.

  Les lèvres de Lucie s'étirèrent en un sourire. Gabriel avait eu un petit crush sur son ami, Adrien ; toutes ses journées étaient rythmées par ses sourires, ses messages et ses paroles.

  — Allez, ouvre ! s'exclama Lucie en se mettant debout, pour se pencher au-dessus de son épaule.

  Gabriel hocha la tête. Il prit une profonde inspiration, puis lut à voix haute :

  « Désolé, Gab', mais j'suis pas dispo pendant les vacances, je rentre chez moi :( Et puis, pourquoi tu tiens à sortir sans les gars ? ça se fait pas trop de les mettre de côté :/ »

  Gabriel prit une profonde inspiration. Il jeta un regard paniqué à Lucie, qui dit :

  — OK. Là, tu dois tout tenter. Dis-lui que tu lui proposes une sortie rien qu'avec lui parce que tu avais envie de le voir seul et que tu as des cookies, aussi. Et ajoute que s'il refuse, tu le mettras au bûcher.

  — OK, répondit simplement le jeune homme.

  « Mince, c'est dommage. Je voulais faire un truc avec toi seul à seul, mais si t'es pas partant, tant pis »

  La réponse ne tarda pas.

  « Ah ! D'acc', excuse-moi, j'avais pas compris ça comme ça. Mais, j'pense pas que mon copain sera chaud pour que je sorte avec quelqu'un seul à seul avec quelqu'un. Désolé :// »

  Gabriel sentit ses épaules s'affaisser immédiatement. Il déglutit, et fit une moue attristée, silencieux. Lucie, derrière, balbutia :

  — Oh, mais... Je savais pas qu'il avait un copain. Il n'en parle jamais.

  — Je savais pas non plus. Alors qu'on est dans le même dortoir depuis nos douze ans.

  Lucie debout, resta immobile. Elle pouvait sentir toute la tristesse émaner de Gabriel ; il se redressa, et se passa les mains sur le visage, comme pour se ressaisir. Ensuite, il s'assit sur le bord de son lit, tremblant.

  — Tant pis. C'est pas grave. J'aurais dû m'en douter. Un mec aussi cool, ça se trouve pas partout.

  — Tu veux un câlin ? proposa Lucie, en tendant les bras vers lui.

  Gabriel hocha la tête. Lucie fit quelques pas pour enrouler ses bras autour de lui, tandis qu'il se blottissait contre elle. Il se laissa aller à quelques larmes ; mieux valait pleurer. Cela nettoyait l'âme et surtout celles en mauvais état.

  Le soir-même, après avoir essuyé ses larmes, tous les S3 se retrouvèrent comme par hasard à table en même temps. Gabriel était installé face à Elysia, en bout de table, de telle manière qu'il pourrait filmer plus facilement, le téléphone posé sur ses jambes. Le jeune homme commençait déjà à filmer discrètement le repas ainsi que les bêtises de Mary, qui faisait un concours avec Anaïs pour savoir laquelle pouvait boire le plus rapidement un verre d'eau. Spoil : c'est Anaïs. Mais elles n'ont bu que deux verres, donc ce n'est pas représentatif. 

  — Bonsoir à tous ! s'exclama Elysia, qui s'était installée depuis trois minutes à peine à table. J'espère que vous vous portez bien !

  Gabriel plaça son téléphone sous la table et le dirigea discrètement vers Elysia, relançant une nouvelle vidéo. La directrice se mit debout puis attendit que tous se taisent, pour lâcher :

  — Je me doute que la rumeur a déjà fait le tour de l'école, et je préfère vous en parler avant tout. Un article a été publié ce matin concernant notre Académie, en la calomniant, mais aussi en me calomniant moi-même. Le fait que l'on m'attaque en priorité est une bassesse, non seulement intellectuelle, mais surtout, cela a été réalisé en se basant sur le témoignage d'un élève renvoyé pour une agression sur une autre élève. Les sources ne sont donc pas fiables, et ce tissu de mensonge est tout à fait déplorable.

  Elysia prit quelques secondes pour reprendre sa respiration. Elle continua :

  — Je désirais vous parler ce soir au sujet de cet article, car à mon sens, cela peut vous servir d'exemple à tous. En tant qu'auteurs, vous risquez d'être attaqués car des personnes vous jalousent, et prient pour obtenir votre gloire. Vous êtes talentueux, et vous ne devez pas laisser des personnes vous atteindre, surtout lorsque les arguments qu'ils emploient ne sont pas corrects.

  Les élèves se mirent à applaudir. Ondine fit de même, de son côté, plutôt tièdement. Elle avait appris qu'Elysia avait été attaquée dans les journaux, évidemment, mais elle n'avait su qu'en penser ; alors, elle avait désiré rester neutre, et n'avait pas dit un mot à ce sujet de la journée. Elysia leur sourit, puis reprit, une fois que cela fut calmé :

  — Une plainte a déjà été déposée pour diffamation, dès ce midi. Libre à vous de croire ce que vous voulez sur cette affaire : mais je sais très bien ce qu'il en est de l'Académie, je sais ce qu'il en est aussi de mon travail auprès de vous. Si demain vous avez le moindre soucis avec moi ou avec des éléments de mon attitude qui auraient pu vous déplaire, n'hésitez pas à venir me voir. Je ne veux pas que certains d'entre vous soient mal à l'aise à l'école : l'Académie d'Ecriture est pour vous une promesse d'une scolarité heureuse, calme et sereine.

  Les élèves applaudirent de nouveau. Victoria, Théia, Lola et Romane se mirent même debout, pour siffler entre leurs mains et s'écrier, en chœur :

  — Elysia, Elysia, Elysia !

  Cela fit rire la directrice, qui secoua la tête, amusée. Gabriel coupa la vidéo, jugeant qu'ils en avaient eu assez. Elysia attendit de nouveau que cela se calme, puis dit :

  — Vous l'aurez peut-être vu, mais des journalistes tentent de pénétrer dans l'enceinte de l'école depuis ce matin. Si vous en croisez, n'hésitez pas à vous rapprocher immédiatement d'un professeur. La police viendra protéger elle-même notre école sous peu, mais en attendant, il faut que vous soyez prudents. D'accord ?

  — Ouais ! s'écrièrent les élèves en chœur.

  — Promis, lança un élève de 14 ans à peine, on va tout faire pour que l'Académie perdure, Madame !

  — Promis ! répétèrent plusieurs élèves, arrachant un sourire à Elysia.

  — Merci beaucoup ! Et bon appétit à tous !

  Elysia se rassit. Elle échangea un regard brillant avec Aurélien, puis un discret regard avec Gabriel, qui publiait déjà la vidéo sur Internet, en direct. En grand titre, en haut de la vidéo : « Elysia de Clermont s'explique sur l'article publié ce matin : OMG !!! ». Hop-là, cela ferait des vues à coup sûr. Il ajouta quelques émojis clichés, et ajouta un commentaire à sa propre publication : « Je tente de choper plus d'infos sur ce que pense Elysia, et je publie !! ».

  Tous mangèrent dans la bonne humeur. Tout allait s'arranger, non ?

  Vous êtes dans un roman écrit par Lysance, n'oubliez pas.

L'Académie d'Écriture [TERMINE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant