REMÈDE - PIERRE GASLY

29. Décider.

7 décembre 2019.

Asha ne s'arrête plus de sourire. Malgré ses réticence, sa tête se remplit d'images qu'elle veut garder précieusement.

Les lumières chatoyantes du marché de Noël. Les étals étincelants de mille feux illuminant la nuit qui commençait à tomber. Les guirlandes scintillantes se balançant au rythme de la légère brise. Les décorations suspendues aux arbres et aux toits. Les bougies vacillantes sur les stands. Les étoiles brillantes qu'elle s'amuse à reconnaître.

Les odeurs enivrantes. Un mélange de notes sucrées et épicées flottant dans l'air frais. Le délicieux parfum des marrons chauds, des crêpes fraîchement préparées recouvertes de chocolat et du vin chaud attisant son appétit. Chaque effluve ressemble à une bouffée d'oxygène.

Fermement accrochée au bras du pilote de peur de le laisser échapper, elle se laisse porter par les allées animées pour contempler les objets artisanaux et délices colorés. La musique festive. Les éclats de rire. Les chuchotements des visiteurs. Les sourires des commerçants. Tout est réuni pour créer une atmosphère joyeuse et magique.

Et Pierre regarde toutes ces illuminations se refléter dans les yeux émerveillés de la brune. Un spectacle enchanteur qui touche son âme rêveuse en plein coeur.

Et puis, le moment qu'elle redoute est arrivé. Les deux jeunes adultes chaussent des patins et s'avancent sur la glace. Asha doit se résoudre à lâcher la main du normand qui ne fait que la balancer à la recherche de son centre de gravité. Et malgré son équilibre précaire, il se montre aventureux là où elle prône la prudence, ses doigts fermement cramponnés aux barrières de sécurité.

« Regarde, en fait c'est pas si compliqué ! »

Il lui montre fièrement sa réussite, bombant le torse pour se tenir bien droit. Il glisse maladroitement jusqu'à elle mais dans la précipitation, il perd de sa stabilité et enchaîne les mouvements incontrôlés pour se maintenir sur ses deux pieds. La brune lui tend les bras pour lui offrir un échappatoire. C'était sans compter sur la vitesse engendrée et le voilà qui s'étale par terre, entraînant sa partenaire dans sa chute.

Le souffle de la jeune femme est court. Tous ses muscles se sont inévitablement crispés. Sa mâchoire est contractée. Ses paupières solidement fermées. Elle sent une main gantée caresser doucement son front et sa joue pour l'apaiser.

« Ça va ? Tu n'as rien ? demande-t-il, paniqué à l'idée de l'avoir entraînée dans sa chute. »

Elle ne répond rien. Elle sait qu'elle va de nouveau être confrontée à une situation douloureuse. C'est évident. Elle ne peut que s'être blessée parce qu'elle ne ressent pas la fraîcheur de la glace. C'est cette chaleur synonyme de danger qui se répand dans chacune de ses cellules.

Se préparant au pire, Asha ouvre difficilement les yeux. Son regard entre en contact avec le torse du pilote qui la tient vigoureusement contre lui. Elle est recroquevillé sur le corps de Pierre, allongé dos sur la patinoire. Il a réussi à l'envelopper dans sa cascade pour la protéger.

Elle pose son menton sur son buste, sa lèvre inférieure pincée entre ses dents et croise ses yeux inquiets.

« Merci d'avoir essayé de me rattraper, murmure-t-il alors que son souffle chaud fait danser les fines mèches brunes retombant sur son front.

- Merci d'avoir amorti ma chute.

- Je t'avais dit que je serai là pour te rattraper. »

Il sert un peu plus ses mains qui entourent la taille de la jeune femme dont il contemple les joues rougir. Il se demande qui il doit tenir pour responsable de son état : le froid ou son innocente timidité. Elle parvient néanmoins à esquisser un sourire, le rassurant sur le fait qu'elle ne lui en veuille pas plus que ça bien qu'elle affirme préférer tourner court à leur sortie.