REMÈDE - PIERRE GASLY

32. Brisé.

8 décembre 2019.

Asha a toujours le nez enfoui contre le torse de Pierre. Le long silence qui s'est installé entre eux est salvateur. Il lui permet de réfléchir à ce qu'elle veut vraiment. À ce qu'elle veut faire de tout ce temps qu'elle a désormais à disposition. Elle se sent nerveuse, mais déterminée. Elle sait qu'elle doit exprimer son désir de passer à autre chose, de laisser derrière elle les ombres du passé qui la retiennent. Les mots se bousculent dans sa gorge alors qu'elle cherche la bonne manière de l'exprimer.

« Pierre, je... Je ne veux pas me lamenter sur un passé fantasmé. Je ne veux pas nourrir des regrets. Je veux profiter de ce que j'ai le pouvoir de changer maintenant, dit-elle finalement d'une voix empreinte de détermination. »

Le châtain l'écoute attentivement, une lueur d'espoir dans le regard. Se concentrer sur la suite. En extraire le meilleur. Et il est curieux de connaître le prochain chantier sur la liste.

« Et quelle est la prochaine étape ? lui demande-t-il doucement. »

Elle réfléchit un instant, cherchant les mots justes pour décrire ce qui brûle au fond d'elle. Elle repasse un à un les points dans sa tête et cherche comment exprimer ses envies.

« La prochaine étape, elle marque une pause, c'est de me faire passer pour quelqu'un d'autre pour une journée, répond-elle avec une pointe d'excitation. Je veux explorer de nouveaux rôles, de nouvelles identités, pour sortir de ma zone de confort et ne pas avoir à raconter mon passé.

- Asha... Écoute, je... Tu ne pourras pas faire ça avec moi, murmure-t-il dans un souffle qui emporte l'enthousiasme de la brune.

- Mais pourquoi...? Sa voix brisée résonne directement dans le coeur serré du châtain.

- Tu sais, avec la Formule 1... C'est dur de se faire passer pour quelqu'un d'autre.

- Mais, tu mettras ton écharpe et ta casquette. »

Elle suggère ceci en repensant à leurs sorties au cours desquelles ils n'ont pas été dérangés. Et heureusement d'ailleurs, parce que ça n'aurait été qu'un obstacle supplémentaire qui aurait empêché la jeune femme de se libérer. Mais la solution qu'elle évoque ne fait que compliquer ce que Pierre essaye de lui expliquer. Alors il soupire parce qu'il sait que la conversation va être difficile. C'est aussi sûrement pourquoi elle est autant nécessaire.

« Il n'y a pas que ça...

- Je croyais que tu voulais faire toutes ces choses avec moi, le sourire qu'elle arborait encore meurt définitivement sur son visage.

- Je le voulais. Je le veux toujours ! s'exclame le normand. Mais ce souhait là... Je n'aime pas trop cette idée. Tu sais, je suis pas à l'aise avec ce truc de jouer un rôle. Tu peux t'épanouir et réaliser tout ce dont tu rêves en assumant d'être toi-même, sans artifice. Le monde a tellement à gagner à te connaître et à te découvrir, il reprend son souffle. Je peux comprendre que ce ne soit pas facile pour toi mais je veux que tu te sentes libre de vivre ta vie selon tes propres désirs. Je serai toujours là pour te soutenir et t'encourager, tant que ça te permettra de rester fidèle à toi-même. »

La jeune femme baisse les yeux, un pincement de déception au fond de son cœur. Elle se retient d'exprimer son ressenti face à sa réaction. Elle aimerait lui hurler que c'est sûrement facile pour lui d'agir ainsi. Mais elle sait que c'est bien plus compliqué. Elle sait que lui aussi doit faire face à ses propres difficultés. Et que ce qu'il a réussi à gagner aujourd'hui, il a travaillé dur pour le mériter

Alors, elle choisit de se résigner.

« D'accord, acquiesce-t-elle, si tu n'aimes pas cette idée, alors je ne veux pas le faire. On peut juste le rayer de la liste et trouver autre chose. »