REMÈDE - PIERRE GASLY

49. Guérison.

17 février 2020.

Asha ne se souvient presque plus de ces réveils où frigorifiée, elle quittait son lit en vitesse, délaissant la chaleur insuffisante de sa couette.

Aujourd'hui, plus que jamais, elle ne comprend pas comment elle pouvait abandonner aussi facilement le confort de son matelas. Sûrement parce que sa tête reposait sur un oreiller, et pas sur le torse de Pierre. Sûrement parce que sa peau ne trouvait aucune plaisir, enveloppée dans des draps froids, ce qui est bien loin d'être le cas alors qu'elle est en contact permanent avec la chair fiévreuse de celle du pilote.

Elle se blottit un peu plus contre lui, renfermant ses bras qui entourent sa cage thoracique. Son oreille tout contre sa poitrine, elle peut entendre son coeur battre à intervalle régulier. C'est son nouveau son préféré.

Le normand est éveillé. Il sent les légers mouvements de la jeune femme. Mais il garde les paupières fermement closes, dans l'espoir un peu fou de faire durer ce moment au moins une éternité. Avec cette idée que peut-être, il pourrait ne pas affronter cette réalité dans laquelle ils seront séparés.

Cependant, Pierre n'a jamais été du genre à fuir.

Et puis il a cette envie de croiser une dernière fois son regard transparent. De s'enfermer dans cette bulle avant qu'elle n'éclate pour de bon. D'embrasser ses lèvres avant de lui dire adieu.

Alors, il ouvre les yeux. C'est la bonne solution. La seule solution. Et ses lèvres esquissent instantanément un large sourire. Leurs pupilles se cherchent, se fixent et échangent des messages silencieux.

Plus aucun mot ne semble être à la hauteur de l'instant. Tous deux cherchent à emporter ces sentiments avec eux à jamais.

Et il ne cherche même pas à retenir Asha quand elle dépose un chaste baiser sur sa bouche avant de se lever, en s'enroulant dans les draps pour cacher sa nudité. Le normand savoure encore une fois la vision de ses joues rougies, entre timidité et innocence. Elle n'a pas conscience que le dernier sourire qu'elle lui décoche avant de disparaître dans la salle de bains fait fondre son coeur et il étouffe un cri mêlant joie et désespoir dans son oreiller.

Pierre quitte le lit à son tour et dispose tout un tas de choses sur la table du petit-déjeuner, sans oublier les crêpes qu'ils ont préparées la veille. Tous les excès sont permis aujourd'hui. Demain, il ne lui restera plus qu'à se plonger à corps perdu dans sa passion, et tous les sacrifices qu'elle exige pour réaliser une meilleure saison que l'année passée.

Et alors que la brune prend place face à lui dans le silence, il lui tend un paquet qu'elle regarde avec des yeux ronds. Elle l'attrape hésitante, culpabilisant de ne pas avoir pensé à lui faire elle aussi un présent.

Mais Asha n'en a pas besoin. Elle a déjà laissé une trace indélébile.

Sous le regard encourageant de Pierre, elle déballe précautionneusement le papier pour trouver ce carnet bleu qu'elle lui avait offert lors de sa dernière venue dans la ville italienne.

Intriguée, elle passe ses doigts sur la couverture qu'elle ouvre avec délicatesse. Sur la première page, une citation qui la fait sourire.

"La douceur est invincible.
-Marc Aurèle"

Invincible. Le terme qu'elle avait utilisé pour décrire sa sœur. Un adjectif qu'elle se doit de s'appliquer aussi à elle-même. Parce que la détermination est un facteur essentiel au processus de guérison.

Sur la seconde page, deux listes scotchées se font face. L'une rafistolée, l'autre plus petite. Mais chacune témoin de ces souhaits qu'on ose à peine rêver et qu'il faut pourtant prendre le temps de réaliser pour s'accomplir tout entier.