Chapitre 35

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LUKE

Bip. Bip. Bip.

Ce son incongru me réveille.

Je tente d'ouvrir les paupières, en vain, le premier essai se solde d'un échec. J'ai l'impression qu'elles pèsent une tonne chacune. Je réitère le geste serrant les poings, comme si cela me demandait une force inouïe.

La première chose que je vois est un faux plafond blanc de dalles. Je laisse mes yeux s'habituer à la luminosité, puis je baisse lentement le regard vers le reste de l'endroit. Une table et une chaise en formica, à droite, une grande fenêtre pourvue de stores gris relevés. Juste devant la vitre, un fauteuil aussi terne que l'ensemble de la pièce, où repose Simon. Je l'observe quelques minutes. Sa canne à portée de main, il est replié sur lui, la tête en appui sur sa paume. Des rides de fatigue lui déforment le visage, et le rendent encore plus âgé qu'il ne l'est en réalité.

Pourquoi suis-je ici ?

Au moment où la question fuse dans mon esprit, je sens une douleur me traverser le torse, et découvre un bandage qui entoure ma taille. Je pose la main sur mon estomac, et tout me revient en une seconde : la cave ; Hector ; la balle qui pénètre dans ma peau ; Séléné.

Il m'a tiré dessus.

Où est-elle ?

Je me revois sur le tapis de la salle de musique, une pression sur l'estomac, et son regard paniqué où se reflétaient l'amour et la culpabilité. Ensuite, c'est le flou total.

Comment ai-je atterri dans cet hôpital ?

La porte de la chambre s'entrouvre, et un homme à la blouse blanche d'une cinquantaine d'années me salue.

— Bonjour Monsieur Amstrall, je vois que vous êtes enfin réveillé. Je suis soulagé.

Un sursaut sur ma droite me certifie que Simon vient de s'éveiller lui aussi.

L'homme se présente, et récupère la fiche accrochée sur les barreaux au bout du lit. Il sort ensuite son stylo pour y noter quelque chose avant de reprendre :

— Comment vous sentez-vous ?

J'essaye de parler, mais ma bouche est trop sèche. Je tousse pour essayer de retrouver ma voix.

— J'ai... soif.

— Tenez, entends-je avant d'apercevoir Simon qui me tend un verre d'eau, je m'en saisis, les doigts tremblants, je crois même qu'une partie du liquide se déverse sur le drap.

Il m'aide à m'hydrater.

— Nous allons vérifier vos constantes, mais sachez que l'opération s'est bien passée. Nous avons retiré la balle située dans votre estomac. La paroi est fragilisée, le chirurgien a cautérisé la plaie, mais il faudra attendre quelques semaines, avant de pouvoir s'alimenter normalement. La paroi stomacale a besoin de se reformer. Je vous prescrirai une liste d'aliments conseillés en temps voulu. Pour l'instant, le menu de l'hôpital est parfait pour vous. Bien sûr, évitez l'alcool et les boissons chaudes.

Il débite les informations à une telle vitesse que j'ai du mal à assimiler ce qu'il me dit. Il me demande mon nom, ma date de naissance, analyse la vitesse de mes rétines, écoute mon cœur, puis s'attarde sur la blessure.

— Quand puis-je sortir ?

— Pas avant plusieurs jours, je le crains. Allez, je ne vous dérange pas plus longtemps, passez une bonne journée, Monsieur Amstrall et reposez-vous, conseille-t-il en agitant le doigt devant moi.

À la seconde où la porte se referme sur le médecin, je me retourne vers Simon, toujours debout à côté du lit.

— Où est-elle ?

Lune de sangWhere stories live. Discover now