Chapitre 9 ✔️

576 104 43
                                    

M A L E K


          — Alors, elles durent combien de temps ces séances, normalement ?

— Une ou deux heures en gros, ça suffit.

Les nuages tapissaient le ciel, de quoi apporter un bol d'air frais agréable par rapport aux derniers jours. J'avais décidé de me balader avant le rendez-vous. Contrairement à moi et mon tee-shirt, Sonja, que j'avais croisée en cours de route, se protégeait avec un gilet de sport gris et violet.

— Cool. Je vous attendrai, alors. Il faut qu'on parle de la semaine passée, voir si y'a du nouveau.

Je m'en voulais. Cette fille brillait de sympathie, en plus d'arborer un joli minois à en déraciner tous les arbres. Je n'avais pas pu lui avouer la vérité sur ce qu'il s'était passé l'autre matin. J'ignorais si la peur m'en empêchait ou si je rejetais inconsciemment la faute sur mon traumatisme.

Dans tous les cas, je n'y arrivais pas.

Au bout de la rue, Eneko pénétra dans le bâtiment. Malgré son air naturellement dépité, il marchait avec entrain, béquille en main. Mon cœur se resserra. Pourquoi le vivait-il aussi bien ? À tous les coups, il était fier des cauchemars qu'il m'apportait. Si je n'agissais pas, il continuerait à me porter malheur ! Je ne voulais pas de lui dans ma vie, non. Je craignais ce qui arriverait s'il y restait.

La maquillée m'arracha de mes pensées et me salua. Nos visages se narguaient, toujours un peu plus proches. Je lui embrassai la joue et trottai jusqu'au bureau de Prairie, sans doute crispé. Socialiser, ça me connaissait, mais draguer... J'avais encore du boulot.

Près de la porte, la plaquette de l'entrée avait changé.

« Vise les étoiles. Au pire, tu retomberas sur la lune. »

Sacrée collection de citations débiles... les changeait-elle toutes les semaines ? Ça ne voulait rien dire. Tant pis.

En dépit de son sourire indécollable, la thérapeute s'était habillée de façon plus formelle, portant un blazer bleu nuit dont la froideur se fondait à l'atmosphère du bureau.

Je la saluai ainsi qu'Eneko pour ne pas paraître abrupt. Au fond, je me rendais plus coupable d'hypocrisie qu'autre chose. Ce gars avait l'air si innocent, mais je ne pouvais pas avoir pitié de lui. Les événements n'auraient jamais pris une telle tournure si jamais il ne m'avait pas accompagné...

J'ôtai mon regard de ce chat noir aux yeux d'acier. Prairie attendait que l'on se concentre.

— Bonjour, les garçons. J'espère que votre semaine s'est bien passée. Comment l'avez-vous vécue ? Qu'avez-vous fait ? Eneko ?

— Oui, ça va. Je suis sorti, par rapport à d'habitude, je suppose que ça veut dire que je vais mieux.

— C'est vrai ? Génial. Qui as-tu vu ?

— Un ami.

— Et toi, Malek ?

— Je...

Comment lui dire que je ne m'étais jamais senti aussi seul de toute ma vie ? Lorsque je ne trouvais pas le sommeil, je m'improvisais des virées nocturnes et je me lamentais sur mon sort à la recherche de petites beautés Arkanoises. Depuis l'accident, je perdais tous mes amis de vue, même ceux qui n'étaient pas partis en vacances...

Je comprenais ceux restés à l'écart après l'E.M.I., mais en plus de ça, je ne me sentais plus sur la même longueur d'onde, on n'avait plus les mêmes délires. Je ne m'éclatais plus à jouer avec le feu.

TRANSES 1: Deux Anges Revenus Trop TôtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant