Chapitre 14 ✔️

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M A L E K


          Je rentrai dans l'enceinte de notre appartement, le crâne bousculé de pensées et les épaules écrasées par la gueule de bois. En espérant que personne ne vienne me déranger... Mon matelas m'appelait pour que je m'y affale jusqu'à la prochaine cuite. La fatigue frotta mon front au chambranle de la porte. Yenska grattait ses pattes avant à ma jambe.

Les souvenirs de la soirée d'hier se mêlaient encore à l'alcool, mais je savais ce que Sonja et moi avions fait. Mes remords me le rappelaient. Le sentiment d'avoir commis une erreur, de ne pas avoir agi dans la complaisance nécessaire, me rongeait. Ce n'était pas sérieux, on s'était juste amusé — on n'en reparlerait jamais.

Je laissai s'échapper un soupir rauque, une main sur le crâne. Ce dernier tanguait, martelé par une douleur lancinante. Certes, les médecins m'avaient demandé d'éviter l'alcool tant que ce truc m'enroulait le front, mais je n'en faisais qu'à ma tête. J'avais voulu l'impressionner... ou ne pas la décevoir. Comme si elle attendait quelque chose de moi...

La rentrée approchait. Je devrais me ressaisir, que je le veuille ou non. Néanmoins, cette histoire ne me facilitait pas la tâche. Eneko non plus.

Ce gars-là rayonnait par son empathie, mais il me balançait ses démons à la gueule ! Sans lui, je ne serais pas aussi stressé et j'aurais pu retrouver mes potes, guérir sagement de ma fracture.

Et malgré tout, nos flammes brillaient à l'unisson.

La rencontre de deux personnalités fonctionnait comme le contact de deux substances chimiques — s'il y avait une réaction, les deux s'en voyaient transformés et j'avais peur que tout cela n'explose. Je peinais à l'avouer, mais il était l'étincelle qui pourrait mener à ma perte, me transformer à vie. Je ne devais pas le laisser faire.

Stop.

Stop !

Je ne l'avais pas trahi.

Je titubai vers la cuisine et me servis de l'eau fraîche. J'arrachai un bout de pain sec dans la foulée.

— T'as encore la gueule de bois.

Les lèvres humectées, je chancelai pour faire face à Nayla. Ses yeux noirs me jugeaient, comme d'habitude. Ses cheveux crépus retombaient sur ses épaules brunies, éclairées par la fenêtre. Hébété, mon regard la fuyait, je tremblais toujours. Mentir ne servirait à rien.

— J'vais bien. J'vais dormir.

— À onze heures ?

— J'vois pas le problème.

Au moins, j'éviterais une insomnie. Je la bousculai, mais elle me rattrapa d'une force inconnue.

— Quoi ? grinçai-je.

— Malek. Fais attention à toi.

— Pourquoi ? Vous me faites plus confiance.

Les rayures du papier peint m'échappaient comme sur un tapis roulant, je tombais loin de ma sœur, pourtant, elle ne bougeait pas.

— Non, Malek, tu te trompes ! Tu es mon frère. Crois-moi, j'essaie de comprendre ce qui t'arrive, la seule chose que je te demande, c'est de m'écouter.

— Nan...

Je traînai jusqu'à ma chambre. Pas le courage de supporter cette conversation. Mon crâne écrasa mon oreiller douillet. Le mot « confortable » prit tout son sens. Le marchand de sable devait être dégoûté de travailler la journée, mais il m'accueillit tout de même pendant quelques heures.

TRANSES 1: Deux Anges Revenus Trop TôtUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum