TRANSES 1: Deux Anges Revenus Trop Tôt

Chapitre 29.3 ✔️

E N E K O

          Il ne pouvait pas se dématérialiser comme moi, d'où mon avantage. Cependant, le sang qui coulait dans ses veines, lui, pouvait transcender les dimensions et m'attaquer lorsque je n'étais pas dans mon corps.

— Ta mère t'a trahie ! Elle se sert de toi, haletai-je.

— Tu ne sais pas de quoi tu parles.

Sa voix grinçait sous la souffrance. Cela fonctionnait. Voilà ce que cela faisait enfoiré ! Tu vas...

Une force tira ma flamme hors de sa portée. Un effilement de veines. Il me propulsa en arrière, et là, panne de courant.

Je tombai à la renverse, dans mon corps. Le choc résonna dans mes entrailles. Mes mains tâtèrent la pierre froide. Ma prothèse vacillait et menaçait de me lâcher, mais pour Malek, je me relevai. Tiens bon, Eneko.

Le blond projeta son poing en avant. Son sang...

Ilça, aide-moi ! Je croisai les bras devant mon visage. Ma flamme m'embrasa la peau quelques secondes afin de repousser son attaque. Elle devenait plus puissante chaque seconde, si bien que parfois, je craignais sa matérialisation.

Conscient du danger, je m'élevai de nouveau.

Le faciès d'Anaël avait perdu toute once d'angélisme — un comble, vu son prénom. Un noir miroitant le tachait, comme de l'encre de Chine renversé sur une feuille blanche. Ses yeux manquaient toujours à l'appel. Comment pouvait-il me voir ?

Il me balaya ma jambe droite — ma prothèse, conscient qu'il s'agissait de ma faiblesse. Je faisais de mon mieux pour l'éviter et l'éloigner le plus possible. Le désespéré en était devenu bestial. Avec le bon œil, je pouvais en profiter.

Il m'agrippa les épaules. Je fermai les paupières. Je ne me laisserais pas intimider. Je me déplaçai dans les airs et l'enchaînai à coup de brûlures afin qu'il me lâche. Dans une explosion d'énergie, je le poussai aussi loin que possible. Je ne devais plus limiter ma force. Je m'élançai et assénai coup sur coup comme jamais, quitte à tousser d'épuisement.

Ma tête lancinait de douleur. Au-dessus de la scène, j'activai le pouvoir de ma flamme et traversai ma poitrine afin d'en partager les bienfaits. Le visage de Malek, couplé à sa puissance, me revigora.

Mon pied voltigea et heurta le crâne d'Anaël qui s'écrasa par terre.

C'est le moment !

Un trop-plein d'adrénaline ordonna à mon corps de reprendre le couteau tandis que je le nourrissais de détermination. Je grillais d'excitation à l'idée de planter cette lame dans ce démon frêle, de voir la cascade de sang couler.

Je me propulsai la tête la première, le canif brandi. Il roula. Mes genoux frappèrent le béton ; il immobilisait mon poignet. Il m'empêchait de l'atteindre. De l'autre, il empoigna mon ventre et rouvrit mes précédentes blessures.

Je ne laissai échapper aucun râle de souffrance. Cependant, ma flamme se transforma en circuit électrique et une douleur indicible m'envoya tourbillonner. Le choc m'engouffra dans un trou noir. Je devais l'arrêter à tout prix.

J'endossai mon squelette, et là, un cri. Les genoux à terre, je me redressai malgré les tremblements et agrippai son poignet afin de le tordre.

Ses doigts plongèrent dans mes taillades, à deux doigts de m'arracher un organe. Ma peau s'était rouverte. Le sang se déversa sur mes abdominaux. La souffrance se propagea dans mon corps et lorsqu'elle atteignit mes cordes vocales, je hurlai à la mort. Le brasier pesait un lourd poids sur mes épaules. Ma respiration trahissait ma crainte de mourir. Je m'affaiblissais. Pitié, faites que lui aussi...