Chapitre 30

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    Comment me-suis retrouvée dans une ruche pleine d'abeilles ? Qu'elles se taisent enfin ; il y en a qui veulent dormir !

    Tout au fond de mon cerveau, j'ai bien l'impression que la masse informe dort elle aussi. Mais dans une autre partie, dans l'état de conscience, je sais ce qu'il se passe. Sauf que je ne veux pas ouvrir les yeux, têtue et encore à moitié saoule.

"Tu avais quoi derrière la tête, Louis ! Regarde dans quel état elle est ! -il le pousse des deux mains- C'est quasi la première fois qu'elle boit autant. Imagine si elle avait perdu le contrôle de sa part sauvage ! Tu aurais pu lâcher un animal en furie et inconscient de ce qu'il peut faire. C'était dangereux ! Tu comptais faire quoi après ton service ? La ramener chez toi complètement saoule ? N'ayant aucun moyen de penser logiquement ? Ça s'appelle un viol ! Elle ne résiste pas aussi bien à l'alcool que nous autres. J'ai fermé les yeux trop de fois, Louis. Mais c'est un non catégorique avec elle. C'est encore ma bêta et la laisser sans protection est encore quelque chose d'impensable. Je ne pensais pas que tu lui ferais ça. Elle est jeune, à peine mordue. Ne commence pas à vouloir lui faire regretter d'être devenu comme nous."

    Je me retourne en me bouchant les oreilles, marmonnant au passage une injure qui est passée inaperçue. Sans que je l'aie prévu, je me sens flotter. L'alcool fait un bien fou. Pourquoi maman ne m'a pas fait découvrir cette joie d'être portée jusqu'au Paradis ?

    Je me retourne et enlace la seule chose que je trouve. J'adore cette odeur. Mais j'ai bien trop chaud. Laissant traîner ma main sur mon ventre, je m'aperçois que je ne peux rien enlever de plus. Subitement, un air froid me fait tressaillir. Mes sourcils se froncent mais ces derniers sont vite stoppés par quelque chose d'étrange. C'est là que la totalité de mon cerveau se remet en marche doucement. Mon papa est revenu me chercher.

    Sur mes pieds, tenant d'une façon ou d'une autre, je regarde les yeux plissés de douleur un jeune homme devant moi. Il me tient fermement par la taille. La tête me tourne, me faisant vaciller de plus en plus. Je ferme les yeux pour me concentrer mais rien ne m'aide. Tout ce que je ressens de nouveau c'est un truc en tissu que l'on me force sur la tête. Je bouge les bras mais cette chose me les bloque. Le principal est que j'ai moins froid.

    Quand j'ouvre les yeux, je ne vois pas clairement l'individu qui me soutient. Mais tout ce que je sais c'est qu'il m'a prêté son tee-shirt en terme de camisole. Sans attendre, me revoilà flotter. La chaleur et la douce odeur sont aussi revenues. Cette dernière est ancrée dans ma tête depuis longtemps mais je ne me souviens plus d'où je la connais. Peut-être est-ce le parfum de maman ? Celui qu'elle met souvent ? J'espère que je vais retourner à mon appartement à Paris. Suis-je à Paris ? Maman ne m'aurait jamais laissée partir. Un grognement sort de ma bouche. Il faut que j'arrête de roter.

    Très vite, je me retrouve détachée de mon étreinte pour me retrouver sur les fesses, à terre. Je décide d'ouvrir les yeux. Malheureusement, ce geste ne fait qu'empirer mon mal de crâne. Il fait bien trop lumineux ici. Curieusement, la lumière disparaît instantanément. Je me gratte les yeux, ne faisant pas attention à ce qu'il se passe autour de moi. Une nouvelle fois, je flotte. Ce n'est que de courte durée. Je hurle quand je rencontre un bain d'acide froid. Une main couvre me bouche.

    Je tourne la tête et tombe sur d'ensorcelants yeux verts. Niko. Même dans le noir, ils brillent comme des phares. Il me regarde, aucune émotion transperce son masque de cire. Je ne me souviens pas de ce que j'ai fait mais je suis sûre que si je n'obéis pas, ce sera à mon tour de me faire attaquer par un robinet.

    Je me rends compte alors d'une chose, je ne suis habillée que de mes sous-vêtements et d'un haut bien trop grand. De son côté, il est torse-nu et nous ne sommes pas dans ma salle d'eau. Je me recroqueville sur moi-même, attendant ses paroles.

"Tu as au moins mangé ? me demande-t-il en s'accoudant à la baignoire, le visage fermé

- Je ne sais plus. Des tapas, je crois." dis-je d'une petite voix enrouée

    Il hoche la tête, la mâchoire serrée. Où est Joséphine ? Était-elle dans le même état ou m'a-t-elle lâchée ? Niko se décroche le bras pour ouvrir le robinet. Pendant un instant j'ai cru qu'il allait me le faire manger. Mais juste de l'eau chaude est venue me réchauffer. Ce bain est presque aussi agréable que celui de Kenzi. La différence est dans les explosions de senteurs. Heureusement qu'il n'est pas pareil qu'elle car je crois que ma tête aurait explosée avec ces produits industriels.

"Merci, Niko. Même si je suis un boulet que tu dois protéger jusqu'à ce que je mute. Merci d'être là. dis-je en prolongeant trop longtemps mes mots

- De rien. Sache que je ne fais pas ça pour tout le monde. Je le fais seulement pour ceux qui me sont chers. Tu n'es pas une mission que je dois accomplir. -je crois sentir ses doigts sur ma nuque ; ça a été fugace- Tu es ma bêta et je me rends compte, qu'avec le temps, j'ai appris à te connaître. -un rire nerveux sortit de sa bouche- Et en plus, tu es saoule.

- Tu me connais depuis mon plus jeune âge. Tu ne peux pas dire ça.

- Certes. Mais j'ai appris plus en ces derniers jours que ces dernières années. Tu m'épates tous les jours. Si tu continues comme ça, tu n'auras plus jamais besoin de quiconque.

- J'aurais toujours besoin d'un ami. Mais le problème c'est que tu es déjà plus qu'un ami. miaulé-je en m'immergeant presque dans l'eau devenue chaude

- Tu as cette impression car nous sommes reliés comme marquée à marqueur. La cicatrice que tu as, je l'ai. Mais les effets qu'a cette marque n'a rien de significatif. En tout cas pas pour nous deux. dit-il en remuant légèrement l'eau chaude

- Comment savoir si ce que nous ressentons est causé par ces marques ? Pourquoi ne veux-tu pas mettre un mot sur ce que nous ressentons mutuellement ? Je suis sûre que cette attirance n'est pas à sens unique.

- C'est ce que tu t'obstines à te mettre en tête ! Il n'y aura rien entre nous. répond-il en refermant son poing dans l'eau claire

- Pourquoi ? Explique-moi. clamé-je en encaissant la douleur d'un marteau-piqueur dans mon crâne

- Parce que j'ai peur !" crie-t-il en se levant, une sorte de rage émanant de tous ses pores

    Je me prends la tête entre les mains, douloureuse. Me massant les tempes, je le regarde faire les cent pas. De cette douleur, je n'ai pas pu bien entendre sa réponse. De sa réaction, je me dis que c'était très important. Je n'ose pourtant pas lui demander de répéter. Fermant les yeux, je me concentre sur ma respiration. J'ai l'habitude de devoir garder ma souffrance pour moi-même, n'ayant en aucun cas le droit de prendre le moindre médicament. Tout ce que je faisais était de dormir le plus possible. Ma technique marchait plutôt bien, malgré le décalage horaire qui se mettait en place.

    A vrai dire, j'ai bien envie de faire un somme. J'en ai besoin. Je ferme les yeux et trouve une parfaite position contre la paroi de la baignoire. Je réussis à trouver le sommeil malgré la tension qui flotte dans la pièce.

Différente : Déréliction [Fin]Kde žijí příběhy. Začni objevovat