Chapitre 18

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    Je reste là, frappée par un coup invisible. C'est uniquement visé pour Niko. Je ne comprends pas ce que ce mot vengeur signifie. Dès lors, les trois loups passent à côté de moi sans que je les voie. Je commence à me rapprocher quand l'Alpha et les deux autres morphes détache l'Oméga. Il est encore en vie, j'entends son cœur battre. Niko est à côté, regardant un point devant lui, à terre.

    Comment est-ce possible ? Comment ceux à l'origine de cet affreux colis ont su que ce camion allait ici ? De plus, je ne sens pas d'autres odeurs que celles des déménageurs et celle du loup Oméga. Ce serait techniquement impossible pour deux humains de faire plier un morphe. Quelque chose ne tourne pas rond. Existe-t-il un être vivant sans odeur ?

    La meute, alertée par l'Alpha, débarque de tous les côtés. Je vois Izaak en compagnie de Jeanne arriver dans une voiture aussi belle que les autres. Un loup de taille moyenne pour un morphe vient se poster à côté de moi. Je le regarde. Sa couleur est blanche, seules ses pattes sont noires. Je renifle discrètement le loup, ou plutôt la louve, et me rends compte que c'est Kenzi. Elle est de retour de sa garde.

    Je regarde le brancard ainsi qu'un homme aux cheveux gris fendent la foule en direction du père de Steban dans les bras de son fils. Il est vite pris en charge par, ce qu'il me semble être, une équipe médicale. Je recherche mon ami du regard mais ne le trouve nul part. Je regarde partout autour de moi jusqu'à tomber sur Joséphine, en haut des marches, choquée.

"Grand-père !" hurle-t-elle en se jetant des marches

    Ses yeux ont changé en ambre. Je fronce les sourcils. Elle risque de se transformer et ça fera pire que mieux. En sachant cela, je prends mon courage à deux mains et viens m'interposer entre elle et l'équipe médicale, encore à quelques mètres d'elle. Elle grogne en me voyant et se jette sur moi. En un rien de temps, la voilà sous sa forme animale, prête à m'ôter la vie d'un coup de mâchoire. Paniquée, je suis à la lettre ce que me dis mon instinct. Je rassemble mes pieds et prends une grande respiration avant de pousser d'un seul coup sur son ventre. Elle ne tombe pas très loin de moi. Je me réjouis de ma nouvelle force. Je me redresse. Les autres nous regardent en faisant un barrage de leur corps entre elle et son grand-père.

    Kenzi, déjà sous sa forme de canidé, vient se poster à côté de moi, sachant que je ne ferai pas de nouveau le poids face à la fille de l'Alpha. Mes amies grognent en même temps. Lorsque Jo me regarde dans les yeux, je vois le reflet des miens. Mes iris sont entièrement jaunes. Je sens que je suis prête à me battre. Je n'ai aucune technique mais la force surnaturelle peut toujours aider.

    Jo semble se résigner. Elle recule, les oreilles baissées. Comme l'avait fait Steban ou Niko, elle change de forme en très peu de temps. Son corps de louve noire disparaît, retrouvant ainsi la jeune femme que je connais. Mes poings se desserrent quand je la vois, pleurant dans ses mains. L'animal reste presque palpable dans mon esprit quand je m'approche d'elle. Je la prends dans mes bras et la berce.

"Je suis désolée... pleurniche-t-elle dans mon épaule, son corps tremblant de partout

- Ce n'est rien. Ton grand-père va s'en sortir ! Vois le bon côté des choses ; nous l'avons retrouvé.

- Tu as peut-être raison... -elle renifle- T'as quand même un sacré culot... T'interposer entre un morphe qui a perdu le contrôle alors que le tien n'a même pas encore émergé... C'était presque du suicide !

- Je le referai si c'était nécessaire. admis-je, très sérieuse

- T'es folle, ma parole."

    Je le relâche quand elle tourne les talons, suivant son grand-père, plus calme. Je regarde de nouveau le camion, apercevant mes bibelots au fond, derrière le tas de fils rouges et noirs. Deux des hommes de Steban sont en train d'interroger les livreurs qui ne comprennent absolument rien. Je me tends quand je me rends compte que ces humains ont vu une femme se changer en loup. J'intercepte un membre de la meute, une dominée encore fatiguée de son réveil, et lui demande ce que leur vie va devenir ensuite. Je n'ose pas me dire qu'ils vont mourir pour avoir vu quelque chose qu'ils ne devraient pas voir. Ne sachant rien, elle me souhaite une bonne nuit.

Différente : Déréliction [Fin]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant