Bazile

/19/ Au sec

Bazile n'en revient pas. Elle a obtempéré.
Elle est à l'arrière de la voiture et se sent actuellement comme une enfant conduite par ses parents. Béatrice conduit. Le trajet se déroule en silence et les seuls sons perceptibles sont ceux de la voiture et surtout celui de la pluie sur les vitres et le toit. L'averse ne cesse pas et les lumières de la ville endormie se déforment à cause des gouttes sur le verre, aux yeux de Bazile qui regarde par la fenêtre, perdue dans ses pensées.

Finalement Béatrice finit par dire d'un ton qui se veut rassurant:

-Je suis certaine que dans quelques semaines vous en rigolerez toutes les deux...

Sans lâcher la vitre des yeux elle répond alors d'un ton neutre et légèrement absent, comme si elle se parlait à elle même:

-Nous n'avons jamais ri toutes les deux...

Béatrice lui jette un coup d'œil à travers le reflet du rétroviseur puis échange un regard légèrement attristé et inquiet avec Orion.

Enfin ils arrivent chez eux.
Béatrice fonce de la voiture à la maison pour être le moins mouillée possible et leur ouvre la porte.
Ils retirent leurs manteaux et leurs chaussures.

-Je vais te préparer une des chambres d'amis je reviens.

Et elle disparaît au fond du couloir.

Orion se tourne vers Bazile qui affiche sur son visage comme une absence de toute émotion.

-Attends ici.

Il quitte également la pièce laissant la jeune femme toute seule qui s'assoit alors sur un toit petit bout du canapé, de peur de mettre de l'eau partout.
Orion revient avec deux serviettes de bains. Il lui en tend une et utilise l'autre pour d'ébouriffer les cheveux.

-Merci.

Bazile se penche en avant pour laisser tomber en avant ses longs cheveux blonds au reflets châtains clairs et se met à les essuyer dans la serviette.
Lorsqu'elle relève la tête elle reste bouche bée en découvrant Orion en train de retirer sa chemise. Elle lui collait déjà à la peau, redessinant ses muscles et son corps, mais de le voir ainsi sa peau nue lui fait pendant un instant oublier tout le reste et la laisse simplement hypnotisée par ce spectacle.
Il se met alors à essuyer son torse, ses bras et son dos.

-C'est bon. J'ai fait ton lit! dit Béatrice en revenant.

Aussitôt Bazile détourne le regard du demi-dieu qui lui fait face et se remet à éponger innocemment sa chevelure.

-Oui tu as raison. C'est un coup à attraper froid de rester habiller comme ça.

Elle prend la chemise trempée sur le canapé puis s'adresse à Bazile:

-Toi aussi.

Bazile marque un temps, déstabilisée, puis balbutie:

-Mais... je... suis en robe.

Béatrice lève les yeux au ciel:

-On est entre nous là, il n'y a personne aux fenêtres. Allez.

Bazile se lève et s'exécute, complètement perdue devant la détente soudaine de Béatrice qui a eu l'air de changer totalement de comportement à la seconde où elle a quitté ses frères et ses belles sœurs.

Elle lui donne la robe, se retrouvant en sous-vêtements et se retenant de chercher le regard d'Orion pour savoir s'il est en train de la regarder.

Béatrice repart du salon sous les yeux de Bazile qui fait alors le lien entre les révélations d'Orion et la réalité: Béatrice joue un rôle. Elle a toujours joué un rôle depuis qu'elle la connaît, parce qu'elle se sont toujours vues en présence de leurs familles. Et maintenant qu'il n'y a plus que Bazile elle peut redevenir elle même. Pas jusqu'à lui avouer que tout son mariage est un faux-semblant et qu'elle est en réalité lesbienne, mais suffisamment pour se lâcher et se rapprocher de celle qu'elle est vraiment, bien loin des comportements de Marie et Laura...