VII 15 - Vacances, présage et imagination

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J'étais bien, à Cesson. Pourtant, des fois, j'avais cette image qui me revenait à l'esprit, de ce salut jovial qui m'avait été adressé à la kermesse et du rayon de soleil en arrière-plan.

Ça me revenait si souvent dans la tête que je finissais par m'en inquiéter, par me poser des questions : quand on était à Courbevoie, j'étais tellement malheureuse que je choisissais tout le temps de fermer mon esprit à la réalité et à m'imaginer à Cesson ; et maintenant que j'étais à Cesson - pour de vrai, enfin ! - voilà que mes pensées me ramenaient sans cesse à Courbevoie. On aurait dit qu'à force de vivre dans l'imaginaire, j'avais perdu le contact avec la réalité, même quand l'objet de mes rêves était devenu réalité.

Alors, je m'efforçais à regarder autour de moi ce Cesson que j'aimais tant, à profiter autant que possible de mes trop courtes vacances mais l'image de ce salut jovial qui m'avait été adressé à la kermesse et du rayon de soleil en arrière-plan me revenait encore. J'avais l'impression d'avoir laissé un bonheur à Courbevoie ; j'avais hâte de le retrouver.

Cette image ensoleillée me faisait l'effet d'un présage. Il allait se passer quelque chose, à la rentrée. Une bonne surprise m'attendait. J'en étais sûre et j'étais curieuse de découvrir de quoi il en retournait.

« Eh ben, range donc ton présage dans ta valise et viens vite jouer ! »

me dit Françoise, avec son accent chaud de Briarde.

Deux semaines plus tard, quand la voiture démarra pour nous ramener à Courbevoie, je fus prise d'une grosse angoisse, comme c'est souvent le cas à l'approche de la rentrée des classes. Pour m'en soulager, je faillis replonger mon esprit illico presto dans un Cesson imaginaire inspiré des souvenirs encore tous frais de mes vacances de Pâques, quand je me souvins que j'avais un présage rangé dans ma valise.

« C'est vrai, tient ! J'avais presque oublié tellement je me suis bien amusée avec Françoise. »

Me raccrocher à ce présage ensoleillé m'aida à laisser la voiture m'arracher à mon Cesson sans ouvrir la portière et me jeter dehors désespérément ; sans pleurer désespérément ; sans fuir dans l'imaginaire en désespoir de cause. J'avais l'espoir qu'il allait y avoir un changement à l'école, qu'une bonne surprise m'y attendait.

En même temps, j'avais peur de nourrir un faux espoir et d'être déçue. J'avais presque hâte que ce soit la rentrée pour en avoir le cœur net...

« Et vivre encore un trimestre à pleurer ?? »

me demandai-je.

Oh là là ! Je fermai les yeux, renversai ma tête sur la banquette arrière, respirai profondément et visionnai dans ma tête mes si bons souvenirs de vacances.

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