X 9 - Trois fois

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Pourtant, Le matin suivant, ça recommença pareil : lorsque nous fûmes dans le rang pour aller en récréation, voyant Laurence devant moi, le désir de lui caresser la joue s'empara de moi, tant et si bien qu'il me parut vain de lutter.

« Lô-rence ! Lô-rence ! tu vas y avoir droit ! »

dis-je en moi-même . Rien de tel que l'arrogance pour tromper la honte.

Je tendis mon bras et posai ma main sur sa joue.

« Mais, arrête ! »

rouspéta-t-elle en rentrant aussitôt la tête dans les épaules, plus rapidement encore que la fois précédente.

« T'as voulu m'éviter, Lô-rence ? Eh ben, c'est raté, tu l'as eue quand même ! »

chantai-je en moi-même.

« Ne fais pas ça ! »

fit la voix de la maîtresse.

Levant la tête, je m'aperçus que c'était à moi qu'elle avait parlé : elle me regardait. Elle avait tout vu ! Je sentis le sang me jaillir au visage, tellement j'avais honte. L'émotion était telle qu'il me fallut faire un certain effort pour parvenir à articuler :

« C'était une caresse. C'est gentil. »

Et la maîtresse, toujours souriante et patiente, reprit d'une voix douce :

« Mais elle a dit non. Alors, faut pas le faire. »

Et puis, surtout, le geste était animé par de mauvaises intentions. Ça, la maîtresse ne pouvait pas le voir, c'était caché dans mon cœur et je me gardais bien de l'en informer ; d'autant que...

Et si je le refaisais quand même ? Si, à la récréation suivante, en marchant dans le rang pour aller dans la cour, le diable revenait encore m'obliger à faire le geste et me forcer à désobéir à la maîtresse, qu'est-ce que j'allais devenir ?

J'entrai dans la cour avec cette inquiétante question qui me taraudait.

Et puis non, plus rien. Le tantôt, le lendemain et tous les autres jours où nous marchâmes dans le rang pour aller en récréation, il s'avéra que Laurence et ses joues n'appelaient plus vraiment ni mes yeux ni ma main ; comme si Laurence avait fait le nécessaire de son côté. Est-ce à dire que le problème venait (aussi) d'elle ? Je ne sais pas. Peu importe. C'était fini. C'est l'essentiel.

Le diable avait eu si peur de la maîtresse qu'il était retourné se coucher. Ouf ! bon débarras !

DATE ET LIEU DE NAISSANCEDove le storie prendono vita. Scoprilo ora