I 2 - Dans mes oreilles de petite fille

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Le garçon s'enfuit ; Nadia reprit ses esprits et détourna le regard. Moi, j'éclatai de rire parce que l'absurdité de la situation me paraissait comique et aussi pour aider Nadia à dédramatiser.

Ce ne fut pas efficace. Elle me montra du doigt en criant : 

« salope ! »

et se mit à pleurer, sans même remonter sa culotte. C'est à ce moment que des grandes personnes crurent bon d'intervenir et nous séparèrent, de sorte que nous ne pûmes nous réconcilier.

Dans le fond, ce n'était peut-être pas plus mal parce qu'étant donné ce que j'avais vu dans les yeux de Nadia quand le garçon regardait ses fesses, si elle avait pleuré après coup, c'est qu'elle était de mauvaise foi. Si j'étais restée près d'elle à l'écouter, elle se serait attachée à déformer la vérité ; elle m'aurait induite en erreur en me disant des mensonges.

Ainsi, je me retrouvais seule pour réfléchir à ce qui venait de se passer. Le cri de Nadia résonnait encore dans ma tête : « salope ! », je n'arrivais pas à m'en défaire. Bizarrement, je savais ce que ça voulait dire, je savais même que c'était un gros mot. Plus étrange encore, je savais que ce à quoi je venais d'assister s'appelait un viol.

D'où me venait la connaissance de ces mots ? Il est certain que je ne les avais jamais entendus de la bouche de mes parents ; de la maîtresse non plus. Ça ne pouvait venir que de Tonton Frédéric.

Tonton Frédéric, c'était le frère de mon père. Il aimait bien parler fort, boire, fumer et faire la fête. Moi, j'aimais bien Tonton Frédéric. Souvent, nous passions nos dimanche ensemble et plus nous avancions dans le repas, plus il parlait fort. Moi, je ne prêtais pas attention à ce qu'il disait, c'était du blabla de grandes personnes mais il arrivait toujours un moment où ma tante disait :

« Voyons, Frédéric ! fais attention à ce que tu dis, devant la petite. »

Alors, il se taisait une minute, après quoi il répétait ce qu'il avait dit précédemment, plusieurs fois, de plus en plus fort et là, il n'y avait plus moyen de l'arrêter.

Ç'aurait bien été de lui de dire un truc genre :

« Si un garçon baisse ta culotte, c'est du viol. Faut pas te laisser faire ! »

Par contre, qu'un garçon réalisât des idées saugrenues à la Tonton, alors ça, il fallait le voir pour le croire !

DATE ET LIEU DE NAISSANCEWhere stories live. Discover now