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Lord Simon Hartfield, 25 septembre 3261, 16h50, Palieda en Sciliria

Ce matin, lorsque nous sommes descendus du train, Alexander m'a dit qu'il venait de lire que le début de l'automne était particulièrement chaud cette année. Evidement les températures n'ont rien à voir avec les étés de l'Ile d'Hartfield ou même d'Hastrye, et je semble être le premier à en souffrir.

La voiture avance maladroitement sur les routes de campagne du sud de la Sciliria, malgré les tressautements du véhicule et la chaleur étouffante, mon compagnon a réussi à s'endormir. Moi, je n'irais pas jusqu'à regretter d'avoir accepté ce voyage, mais je ne me crois pas capable de supporter de telles températures, 27°C à la fin de septembre, c'est inhumain quand on sait qu'à Hartfield on ne dépasse presque jamais les 16°C.

Voyant que le soleil commence à descendre dans le ciel, je m'autorise à ouvrir un peu le rideau pour observer le paysage. Devant moi, les champs et les arbres fruitiers défilent, j'observe avec intérêt les hommes qui récoltent les derniers citrons et les premières olives. J'avais lu tout cela dans des livres qui décrivaient le Monde, mais jamais, enfermé sur cette petite île du nord de notre royaume, je n'aurais pu imaginer voir tous ces beaux arbres rapportant tant de fruits colorés.

- Alors, que pensez-vous du paysage ? me demande Alexander qui s'est apparemment réveillé.

- J'attends de voir si la mer est aussi belle que vous me l'avez décrite.

- Elle le sera, ne vous en faites pas. (Il jette un coup d'œil par la fenêtre.) Nous arrivons, me prévient-il avec un sourire d'impatience suspendu aux lèvres.

Et en effet, dix minutes plus tard, la voiture s'arrête. Alexander reboutonne le haut de sa chemise, sur sa peau perlent de petites gouttelettes salées. Il ouvre la porte et saute du véhicule, puis se baisse pour me déplier le marchepied et me tend la main en souriant. Je saisis ses doigts et pose prudemment mon pied sur la planche branlante. Alors, le soleil à l'horizon m'éblouit si fort que je ne vois plus rien. Je sens une minuscule brise me frôle la joue, rien à voir avec les grandes bourrasques marines que je connais. Aveuglement, je pose le pied à terre, et, alors que je suis à deux doigts de basculer, l'appui donné par la main d'Alexander me rattrape.

- Merci.

- Ça va ?

Je hoche la tête, et quand je lève les yeux, je découvre une vieille et grande maison de briques et de tuiles qui se dresse vingt mètres devant nous, et derrière elle, j'aperçois la mer azure.

- Andiamo ! s'exclame Alexander, alors que je m'aperçois que personne n'est venu nous accueillir.

Nous franchissons les quelques mètres qui nous séparent du perron de la maison, là, nous grimpons les marches jusqu'à arriver devant une porte en bois usé qui ne dois plus protéger grand-chose. Alexander pousse la porte et nous pénétrons dans un petit sas carrelé qui donne sur un cloître à l'antique avec un bassin en son centre. De la pièce voisine, se dégage une forte odeur de fruits et de légumes qui ont longtemps mijoté jusqu'à être confits.

- Cela fait longtemps que je rêve d'à nouveau sentir ce merveilleux arôme, lâche Alexander.
Il n'en faut pas plus pour faire sortir de la cuisine une femme d'un âge avancé qui se jette presque sur lui.

- Ô Monsieur le comte, je n'ai pas rêvé, c'est bien vous ! Quel plaisir d'enfin vous revoir ici. Je suis vraiment navrée qu'il n'y ait eu personne pour vous accueillir, Signor Vasile doit encore s'être endormi, il commence à se faire vieux, vous savez ?

Elle vient de dire cela à une vitesse faramineuse avec un accent fort prononcé, c'était presque incompréhensible.

- Signora, ne vous en faites pas, c'est moi qui vous remercie de toujours être là. Je sais déjà que nous allons nous régaler. Simon, je vous présente Signora Vasile, la femme du régisseur, mais surtout la meilleure et la plus généreuse des cuisinières.

LordsWhere stories live. Discover now