III

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Lord Alexander Sky, 18 juillet 3264, Hastrye

Ils m'ont enfermé dans un commissariat il y a cinq jours, en toute logique, j'aurais dû pouvoir sortir sous caution, mais voilà, preuve que ce n'est pas la justice qui gère cette affaire, je resterai là jusqu'à mon procès. Je n'ai pu voir personne d'autre que le policier et les détenus jusqu'à cet instant où un officier arrive dans le couloir et vient me dire :

― Votre femme est là pour vous voir.

Alors il ouvre la porte de ma cellule et me mène jusqu'à la salle, qui, il y a quelques heures, était encore une salle d'interrogatoire où l'on me frappait.

Rose attend silencieusement, la tête baissée vers la table, j'ai l'impression qu'elle prie. Je passe derrière sa chaise et viens m'asseoir en face d'elle. J'inspire, j'expire, ferme les yeux puis les rouvre pour le poser sur son front ; elle redresse timidement le regard qui s'assombrit aussitôt, en remarquant les marques sur mon visage. Elle reste silencieuse quelque temps, ce qu'elle s'était préparée à me dire est resté coincé dans le fond de sa gorge.

― Allez-y... murmuré-je.

Elle souffle pour reprendre ses esprits.

― On doit bien faire quelque chose Alexander, ils ne peuvent pas vous accuser comme cela, juste avec de lettres, vous devez tout nier.

― J'ai essayé Rose, j'ai essayé de nier, plus longtemps que je ne l'aurais dû, ils m'ont frappé. Ils ont comparé l'écriture des lettres avec un quelconque papier que j'avais rédigé pour le roi, il y a des années, c'était indéniable. C'est le roi qui est derrière tout ça, c'est moi qu'il veut faire tomber, ils ne m'ont même pas demandé qui était mon correspondant, ils s'en fichent. Tout ce qu'ils veulent, c'est se débarrasser de moi.

― Le roi, mais que pourrait-il bien retirer de cette affaire ?

― Ecrivez à la reine, elle vous expliquera.

Elle est terrifiée cela se voit bien dans son regard qui n'ose même plus croiser le mien.

― Simon est arrivé hier, il séjourne avec nous rue Robert Moore. Il a essayé de venir vous voir, mais ils lui ont interdit l'accès. Il vous a écrit cette lettre. (Alors elle sort de son manteau un petit morceau de papier qui n'est même pas cacheté.) Lisez-la maintenant, je la détruirai dès que je serai sortie d'ici. Nous ne devons plus laisser aucune trace.

Je prends la missive froissée en mesurent son caractère précieux avant de la déplier.

Très cher Alexander,

Le pire est peut-être que je ne sais pas quoi vous écrire tant je suis perdu, mais j'en ressens un fort besoin.

Je veux croire que vous allez vous en sortir, que bientôt, nous remarcherons ensemble sur la plage, que le soir, vous viendrez encore m'écouter jouer. Nous ressortirons le soir pour aller danser, et l'alcool me fera dire des paroles qui sans cela me feraient rougir. Alexander, tout sera bien vite fini, nous recommencerons à vivre comme avant et tout aura été oublié.

Je vous aime tellement que je ne peux pas croire qu'il puisse en être autrement.

Je vous embrasse mille fois.

A bientôt,

Votre Simon

Je replie la lettre et la rends à Rose qui s'empresse de la ranger. Je voudrais reprendre ce fichu bout de papier froissé pour pouvoir le garder contre moi, garder sa présence rien que dans ces quelques mots.

― Comment vont les enfants ?

― Violet a cassé tout ce qu'elle pouvait casser dans sa chambre, elle a tenté de fuir deux fois pour venir vous voir. Colin ne cesse de me demander où vous êtes, il ne comprend pas pourquoi vous êtes parti sans l'avoir prévenu, je lui réponds qu'il vous reverra bientôt, je prie seulement pour que ça ne soit pas un mensonge.

LordsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant