7 - « Rêves d'évasion »

71 22 36
                                    


OWEN


Voilà qu'au grondement d'un cor, les gardes m'avaient abandonné au fond de mon trou sans sourciller. Je ne comptai ni atout physique ni matériel pour crocheter la serrure de ma geôle, mais je restai perplexe devant une telle agitation.

Était-ce l'œuvre du prince ? Je trouvais l'idée ridicule, même pour quelqu'un qui ne souhaitait pas être vu dans la prison.

Les riches sont capables des caprices les plus fous, pensai-je dans un soupir. Après tout, sa mère peut me faire exécuter sur un coup de tête...

J'en venais presque à regretter de ne point être mort en héros devant Natasha. D'ailleurs, qu'était-il advenu de mon corps dans l'autre monde ? Je me baladais dans celui-ci sous la même enveloppe... Les dieux fous l'avaient-ils dupliqué ? Ou bien mon cadavre avait-il disparu sous les yeux de tous, tel un prophète rappelé par le maître de l'univers ?

Je m'emporte... et qu'est-ce que ça peut faire? De toute façon, je ne peux probablement pas faire demi-tour.

Les doigts enroulés autour des barreaux, je voûtai le dos et laissai mon crâne rebondir contre le fer de ma cellule. Cela pouvait-il être encore un simple cauchemar, tandis que je dormais paisiblement dans un lit d'hôpital ?

Non... tout paraissait bien trop réel. Je ne devais pas me faire d'illusions.

— Pour un envoyé d'Imshe, tu manques de vie, souffla une voix.

Dans un sursaut, je posai les yeux sur le prince, emmitouflé dans une tenue de voleur fantastique.

— Ce n'est tout de même pas vous qui avez sonné l'alerte seulement pour descendre incognito ? lâchai-je, dépité.

Le jeune félidé fronça le nez.

— Bien sûr que non ! siffla-t-il. Seules les patrouilles le peuvent.

Ce fut à mon tour de grimacer.

— Donc vous profitez d'un incident, peut-être grave, pour venir me voir en paix ?

— Il ne doit s'agir que d'un vulgaire intrus qui a dû passer le premier mur d'enceinte. C'est rare, mais cela ne serait pas non plus la première fois.

— Et vous ne craignez-vous pas que votre mère si « tendre » se rue dans votre chambre et hurle d'horreur en vous voyant disparu ?

À mes mots, le prince se figea. Il mordilla sa lèvre supérieure, ses prunelles dorées rivées sur mon visage.

— Je n'y avais pas songé, avoua-t-il finalement en lorgnant d'un air sombre l'entrée du couloir.

— Comment un jeune homme habitué à la folie de sa mère peut-il oublier un tel détail ? m'emportai-je.

— La reine n'est pas folle ! grogna-t-il. Simplement paranoïaque... et je n'avais pas prévu qu'une sentinelle souffle dans le cor de garde ! Montre-moi ta pierre ! Le temps presse.

Parce qu'il compte l'examiner, puis remonter dans sa chambre avant que sa mère remarque sa disparition?

Même si j'ignorais la cartographie du palais, je doutais que les quartiers d'un prince se trouvent proches d'une prison...

— Ne me dis pas que tu as menti ! se méprit-il face à mon silence.

— Non ! Bien sûr que non.

Je me retournai et ramassai ladite pierre du banc.

— La voici, ajoutai-je en la tendant à travers les barreaux.

Ténèbres d'ImsheWhere stories live. Discover now