Article 4

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A l'issue de la Sélection, le Protecteur, selon sa propre convenance, aura le devoir de modifier et de nommer sa Dépendante.





Monseigneur, si je peux me permettre...

J'ignore le vieillard qui nous suit en trottinant pour nous devancer. Je finis quand même par lui prêter attention, conscient que sans lui, je ne sais absolument pas où aller dans ce labyrinthe. Alors l'homme nous guide jusqu'à une pièce plus grande que la précédente, bien plus lumineuse et bien équipée en terme de mobilier. Elle ressemble à un salon cossu de la capitale avec ses canapés beiges et ses meubles en bois. Seuls les murs concordent avec le reste, mettant en avant les affreuses toiles monochromes.

Je n'attends pas son autorisation pour prendre place et ne suis pas surpris que Nicolas s'assoit le plus loin possible de moi, sur le deuxième canapé qui me fait face. Sa colère n'est pas redescendue, je n'aurai pas son approbation en me contentant de faire un caprice sur le choix de ma dépendante. Peut-il toutefois remettre en question ma décision ? Sa position l'en empêche, mais son cerveau tordu ne l'en privera pas.

Monseigneur, reprend l'insupportable maître des lieux, nous avons tant de prétendantes à vous proposer, toutes aussi soumises les unes que les autres. Avez-vous arrêté votre choix ?

— Je l'ai fait.

— Nous connaissons cette prétendante, nous la connaissons que trop. Pour tout vous dire, elle nous a attiré bon nombres d'ennuis et sa soumission n'a jamais été quelque chose de totalement acquis. Elle n'est pas faite pour un titre si important, les Royaumes ne seront que faire d'une inadaptée. Que diraient les Dieux ?

Plus il déblatère, plus il confirme mon choix. N'est-ce pas exactement ce que nous attendions de la prétendante que nous étions venus chercher ?

Je n'ai qu'à jeter un coup d'œil à Nicolas pour le voir se détendre lentement dans son canapé et, tout au fond de moi, je sais qu'il a compris. Quand bien même il ne peut lire dans son esprit, le numéro quatre-cent quatre a quelque chose que les autres n'ont pas et si la braise ne se fait pas sentir, c'est peut-être parce qu'elle est enfouie sous un tas de cendre trop important.

Monseigneur, elle a vingt-deux ans... Elle était promise à nourrir les maisons closes de Prima, ne voulez-vous pas choisir une prétendante plus jeune ? Que pensera le peuple d'un choix tel que celui-ci ?

— Etes-vous en train de remettre en question ma décision ?

L'homme rougit et s'incline devant moi tout en faisant une grimace détestable.

— Jamais je ne me permettrai un tel affront, Monseigneur. Mais sa majesté le roi acceptera-t-il ce choix ?

Las d'un discours qui m'importune plus qu'il me distrait, je me lève et toise le vieillard, prêt à lui faire comprendre qui est l'héritier dans cette pièce et qui est celui qui a échappé de justesse à une vie d'exil. Comprenant bien que le temps n'est plus à la parole, il recule et rougit de plus belle et je me demande si un jour seulement, il a eu une paire de couilles.

Alors j'avance et l'attrape par le col, jouant de ma taille pour impressionner ce petit homme voûté qui aurait dû se contenter d'enculer ses pairs en toute discrétion plutôt qu'essayer de faire de même avec l'héritier qui se tient devant lui.

— Vous êtes bien couillu pour un sans-couilles, je crache à son visage que je domine d'une bonne tête.

Monseigneur...

— Remettez encore une fois mon choix en question et je vous trouverez un sort bien pire que l'exil.

— Ayez grâce, je ne pensais pas à mal.

DÉPENDANTES [ L'émeraude des Sept Royaumes ]Where stories live. Discover now