Article 31

847 81 24
                                    





Les addictions, de qu'elle qu'en soit la nature, sont prohibées par Sa Majesté. Seule la lune vermeille fait exeption à l'Ordre, du lever de la lune dans l'obscurité à son coucher.



Valéryan me prend la main et m'entraîne dans la foule jusqu'à une grande pièce. Elle est éclairée par de discrets lampions et les rayons pourpres de la lune qui brille derrière l'immense vitre qui se trouve au-dessus de nos têtes.

Je n'ai jamais vu de fenêtres au plafond et j'espère que celle-ci ne s'ouvre pas. Du moins pas quand il pleut, cela ne doit pas être très pratique.

L'effervescence des membres de la Braise passe au second plan. Je ne peux détacher mon regard de la lune incandescente. J'ai l'impression qu'elle brûle et qu'ainsi, nous sommes un peu pareilles toutes les deux. Elle me regarde comme je le fais avec elle. Notre conversation est silencieuse, ce qui est un peu ridicule par ailleurs. La lune ne parle pas, elle ne saurait le faire.

Pourtant elle semble si libre, là, seule dans l'immensité noire. Elle est bien plus libre que moi qui détient la parole.

— C'est un puits de lumière. Une installation vieille de cinquante ans qui permet à qui le souhaite de rêver devant les étoiles quand elles nous honorent de leur présence, m'explique Valéryan.

— C'est magnifique.

— Vous êtes de la même couleur.

Je détourne mon regard de la lune pour fixer Valéryan, ne comprenant pas le sens de ses paroles. Il rit tout en me caressant la joue.

— Avec la lune, vous êtes toutes deux habillées de pourpre.

Il se penche, sa bouche frôle mon oreille :

— Et entre nous... vous brillez de la même manière. Si je devais choisir, la lune serait si jalouse qu'elle cesserait de nous éclairer chaque nuit.

— Vous dites vraiment n'importe quoi, je lui réponds, embarrassée.

Il rit à nouveau en enfouissant son visage dans mon cou qui doit certainement avoir, à l'heure actuelle, la même couleur que la lune.

J'aimerais bien savoir s'il est sincère.

C'est marrant de se dire qu'il y a quelques mois à peine, je n'étais qu'un numéro. Le tatouage derrière ma nuque me le rappelle sans cesse. Et aujourd'hui ?

Je suis une femme.

Je suis à la Braise, le centre de la rébellion.

Je suis aux côtés de l'héritier qui passe son temps à me désirer sans chercher à me cacher ses pensées. Si ce n'était pas moi le numéro, j'aurais juré avoir tiré le gros lot.

Alors oui, c'est marrant.

Tout est dans le contexte.

— Venez, me propose Valéryan, allons retrouver les autres.

J'acquiesce et le suit, prenant enfin conscience du monde qui m'entoure. Il y a des gens partout. Ils boivent et rient en parlant tous plus fort les uns que les autres. Ils sont habillés comme si nous n'étions pas en plein hiver et badinent librement sans aucune distinction de genre.

Ce que je veux dire, c'est que des hommes caressent des hommes et qu'ils n'en ont pas honte.

Un million de questions me brûlent le bout des lèvres, mais je me tais. La seule chose que j'ai envie de crier à m'en casser la voix, c'est que je ne comprends rien.

DÉPENDANTES [ L'émeraude des Sept Royaumes ]Tahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon