Article 37

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Toute adoration envers les Dieux sera proscrite si elle entache la légitimité de sa Majesté le Roi.


— Elle n'est pas prête, réfute Arlette, les bras croisés sur sa poitrine.

— Et tu crois que ton plan est meilleur, peut-être ? A moins que ce ne soit encore un mensonge ?

Elle lève les yeux au ciel, mettant mon désaccord sur le compte d'un caprice.

— Ce n'était pas le bon moment pour te le dire, ce n'était pas mon rôle. Tes parents voulaient que cela vienne d'eux.

— Tu as eu tort, je méritais de savoir, tout comme Camille. Elle est prête, nous serons là pour elle.

— Pour faire quoi ? Lui offrir une troisième version de la grande guerre ?

— Juste la vérité.

— Arlette n'a pas tort, se permet Nicolas d'une voix peu assurée. Camille n'est pas prête, mais elle ne le sera jamais.

Je foudroie mon ami du regard, allant jusqu'à même regretter sa présence. Comment peut-il aller à l'encontre de mon avis alors que nous n'avons pas le choix ?

Mais avant que je puisse laisser exploser ma rage, il se lève du canapé et reprend :

— Personne n'est prêt, je ne l'étais pas non plus. Toutes nos certitudes viennent de s'effondrer, notre combat paraît futile désormais. Camille doit savoir, nous prendrons soin de la préserver par la suite.

— Vous ne réalisez pas ! clame Arlette, ahurie.

— Excuse-nous de ne pas avoir été dans la confidence ! Par tous les Dieux, Arlette ! Contre quoi nous battons-nous ?

— Vous refusez de comprendre que nous sommes impuissants.

— Alors quoi ? On laisse faire ? On me couronne et on ne fait rien ?

— Les Hommes ne peuvent rien, laissons faire les Dieux.

Je soupire en faisant le tour de la table basse, une fois, puis deux, et enfin trois. Je n'ai pas les mots. Tout va trop vite et les évènements me dépassent.

En dehors du fait que je viens d'apprendre que j'ai été dupé depuis ma naissance, les incohérences des Royaumes me sautent aux yeux. Nous ne pouvons rien faire.

Si j'abroge la loi de l'Ordre en libérant les femmes, j'ouvre les portes à toute sorte de rébellion, à commencer par celle qui sépare les classes. Je perdrai le contrôle, de nouvelles guerres verront le jour.

Mais si je ne fais rien, je serai le plus grand lâche de tous les temps. Pourtant je refuse de continuer à sacrifier les femmes juste par crainte d'une nouvelle guerre.

Arlette a raison, les Hommes ne peuvent rien. Ils ne savent que se disputer et faire preuve d'un redoutable esprit de contradiction. Les Dieux feront-ils la différence ?

Je doute qu'ils fassent preuve de pacifisme en tentant la négociation. Pourquoi ne tueraient-ils pas ? Quel est leur pouvoir ?

Il est hors de question de prendre le risque d'anéantir les Royaumes aussi bêtement. Et si je réveille des créatures surpuissantes endormies depuis la nuit des temps, je n'ai aucune garantie que leur venue soit bénéfique.

— Avons-nous d'autre choix ? me demande Arlette, ayant parfaitement lu mes doutes dans mon esprit.

— Pourquoi Camille n'est pas encore rentrée ?

— Elle ne se sentait pas bien après la soirée d'hier, m'explique Nicolas. Le contrecoup de la drogue, sans doute. Elle est allée prendre l'air avec Quentin, ce qui n'est pas plus mal au vu de la situation.

DÉPENDANTES [ L'émeraude des Sept Royaumes ]Where stories live. Discover now