Chapitre 4

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Date de rédaction : 08/12/2022

Quel meilleur rituel que celui de m'accorder du bon temps dans l'eau chaude d'un bon bain juste avant de passer à l'action ?

Le regard perdu dans un paysage londonien plongé dans la grisaille, je rabattais mes cheveux en arrière afin de retirer toute la mousse. De la buée avait fini par se déposer sur le miroir ainsi que les contours de la fenêtre. J'attendais patiemment que le soleil se couche, et, du bout de mes orteils, je soulevais la poignée pour laisser l'eau brûlante me réchauffer. Lasse, je tendais un bras jusqu'à la chaise toute proche dans l'idée de saisir la bouteille de champagne et remplir ma flûte. Le service d'étage avait pris soin de me porter une assiette de fruits. Je croquais dans des fraises, de la pastèque et du raisin, un petit bout de paradis en somme. Ajouté à cela, un air d'opéra qui me berçait depuis la chaîne Hi-Fi dans le salon, en fermant les yeux, je pouvais presque me sentir chez-moi.

— Rien n'y fait, menace ou prière. L'un parle bien l'autre se tait. Et c'est l'autre que je préfère, il n'a rien dit, mais il me plaît...

Sans m'en rendre compte, j'esquissais un sourire, car ces paroles me ramenaient à de vieux souvenirs. Louiza connaissait les paroles par cœur et elle savait les chanter avec toute la grâce et l'élégance d'une diva, elle était ma Castafiore. Je ressassais de cette manière mes derniers instants avec elle, et aussitôt je secouais la tête pour chasser ces souvenirs ternis et revenir à la réalité. Remémorer, le passé n'apportait jamais rien de bon. Et afin de me vider la tête, j'immergeais aussitôt le bas de mon visage sous l'eau pour ne laisser que mes yeux à la surface.

Cinq jours que j'avais quitté mon confort perdu dans les montagnes. Cinq jours que nous nous étions établis ici afin de scruter la demeure du secrétaire d'État à la Défense. Un titre bien trop long pour un homme qui passait ses journées à diner en compagnie de riches entrepreneurs et qui délaissait sa femme, en fin de compte, il ne se révélait pas si différent des autres hommes politiques qui avaient un jour croisé ma route. Bon au moins, ses absences régulières m'avaient permis de repérer toutes les entrées de l'immeuble dans lequel il résidait. Le toit m'apparaissait comme la meilleure échappatoire pour ce soir. Mon attention se déporta sur l'enveloppe près du lavabo. Avec cette invitation, je me fondrais parfaitement dans le décor, d'après mes informations, la soirée se déroulerait au rez-de-chaussée, au premier et au second. En revanche, le troisième étage sera inaccessible et surveillé en permanence. Le bureau du ministre s'y trouvait, et bien que l'on ne décelait aucune caméra dans chaque angle, car il s'agissait d'un domicile privé, je savais qu'une diversion ne serait pas de trop pour me permettre d'atteindre mes objectifs. Falko travaillait depuis ces deux jours sur son matériel pour le rendre opérationnel.

Et lorsque je pensais au loup, celui-ci pointait le bout de son museau. Il ne prit pas la peine de frapper. La porte s'entrebâilla, je remontais à la surface l'air de rien avant de porter la coupe à mes lèvres.

— Tout est près, annonça-t-il en s'investissant dans la salle de bain.

Soigneusement, mon acolyte suspendit une housse de protection noire sur le porte-serviette. Il hésita une seconde entre repartir ou bien rester. À voir sa tête, je devinais que quelque chose le chiffonnait. Falko s'adossa contre le mur le plus proche en croisant les bras, puis il me fixa. Difficile de le déchiffrer, j'ignorais ce qui pouvait bien le perturber autant, et vu la façon dont il tenait sa langue, il attendait que j'entame la discussion :

— Quelque chose te dérange ?

Le blond hocha la tête.

— Cinq millions c'est suspect.

— Trente, si nous livrons avant lundi, corrigeais-je en souriant.

— Et toi ça ne semble pas t'inquiéter ?

La Voleuse aux Mains d'Or - Tome 1 [TERMINÉ]Where stories live. Discover now