Chapitre 24

76 21 0
                                    

Date de rédaction : 25/03/2023

Sereine, je quittais enfin mon bain, non sans omettre de finir ma flûte de champagne. Voilà l'éternel rituel d'avant méfait. Je n'appréhendais pas les évènements à venir, Raphael Verano ne connaissait pas mon visage, il était d'ailleurs peu probable que Falko ait évoqué mon existence, il me pensait écarté du jeu, mais il me faudrait tout de même rester sur mes gardes ce soir. Nul ne sait quelle surprise cet abruti pouvait nous réserver.

Sur la chaise à l'entrée de la pièce, je portais mon attention sur la robe encore emballée. Je ne lui avais rien demandé, mais Hana avait pris les devants, et il fallait avouer qu'elle avait du gout. Un satin duchesse, plus obscur et luisant que les ailes d'un corbeau, je saurais en faire bon usage. Mais pour l'heure, je replongeais dans un jean ainsi que mon pull. Dans le miroir, j'avais peigné mes cheveux en arrière, d'ici qu'on lève le camp, ils auraient le temps de sécher. Il nous restait quelques mises au point à mettre au clair. Pour cette raison, je coupais la chaîne hi-fi avant de déserter la salle de bain et retrouver la fraicheur qui planait dans le salon.

Hana et Calixte se trouvaient autour de la table, l'une passait en revue le matériel tout en dégustant un panzerotti, sorte de chausson fourré à la tomate et mozzarella, une spécialité de la ville. Tandis que l'autre examinait des plans de l'opéra soigneusement récupéré auprès des autorités italiennes qui avaient cédé devant la requête d'Interpol.

— Alors ? questionnais-je en me penchant sur la surface afin d'étudier nos éléments.

— Nous entrerons par-là, indiqua le sergent Wiles en pointant du bout de son indexe la porte principale.

Évidemment, avec l'invitation volée, je ne voyais pas l'utilité d'emprunter la porte de service. Mais à considérer tous les plans du bâtiment, je me demandais comment nous pourrons repérer et intercepter Verano avant l'échange. Si l'on additionnait les sous-sols jusqu'au toit, la Scala égalait la Tour de Pise en termes de hauteur, soit cinquante-six mètres. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Mais je comptais avant tout sur l'extravagance de notre hôte pour que l'on puisse le repérer facilement. Les invités ne manqueraient pas de le saluer afin de démarquer, de bons dithyrambistes comme on en croisait à la pelle dans ce genre de festivités.

— Reis passera aussi par l'entrée principale, affirmais-je sans le moindre doute.

Lui aussi possédait une invitation, alors je ne voyais aucune raison qui l'obligerait à se montrer discret. Maintenant qu'il avait pris le melon en se considérant comme le plus grand et le plus rusé des voleurs, il n'hésiterait pas à gonfler le torse et parader à sa guise.

— Si on se sépare ça devrait le faire, je prends les étages du haut et tu m'occupes de la réception et des sous-sols, Hana nous épaulera depuis l'extérieur et guettera les allés et venus.

— En espérant que son antenne ne nous fasse pas défaut, me moquais-je.

— C'est réparé, lâcha-t-elle sans trop nous prêter attention.

La jeune mère était collée à son téléphone, ses doigts tapotaient à toute vitesse le clavier, à qui pouvait-elle bien discuter pour sourire autant ? Son fils ? Ou bien son conjoint ? L'un des deux, aucun doute possible. Les jours se rallongeaient et elle s'impatientait de retourner auprès de ses proches. Un sentiment que je ne comprenais pas. En vérité, tout ce dont je rêvais à cet instant ne se résumait qu'à mon jacuzzi avec vue sur le mont Cervin. Oui, il n'y a que mon chez-moi qui me manquait. Et j'espérais bien le retrouver d'ici peu. Pourquoi pas demain ? Milan ne se situait pas très loin de la frontière suisse, il me suffisait de remonter jusqu'à Côme, une petite heure suffirait pour me trouver en terrain neutre, enfin, si je parvenais à voler une voiture ou une moto. Il s'agissait du scénario idéal. Car je n'étais pas décidée à les laisser m'embarquer à l'issue de cette soirée. Je pourrais même me dissiper là, maintenant. M'enfermer dans la salle de bain, passer par la fenêtre, descendre le long de la gouttière et abandonner mes deux compères dans leur misère. Demain, j'aurais retrouvé ma vie d'avant, à nager dans le luxe et à jouir de tous mes crimes. J'en mourrais d'envie. Et qui m'en empêcherait ?

La Voleuse aux Mains d'Or - Tome 1 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant