Chapitre 11

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Lidia cumulait les erreurs et avait demandé à Maggie de la rejoindre pour l'aider à terminer cette maudite robe qui lui donnait du fil à retordre. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'elle travaillait sur un modèle semblable mais Lidia ne parvenait tout simplement pas à mettre de l'ordre dans ses pensées. La vieille couturière l'observait silencieusement avec intérêt. Puis, lorsque la jeune femme brune envoya valser le tissu qu'elle tentait en vain de couper, Maggie se décida à intervenir. Elle prit Lidia par la main et l'entraina hors de l'atelier.

- Faisons une pause, lui dit-elle de sa voix douce.

Lidia soupira énergiquement, confuse et l'esprit embrumé. Elles marchèrent longuement avant que Maggie ne brise le silence :

- Comment s'appelle-t-il ?

- De quoi ?

La doyenne étouffa un rire et fixa Lidia avec malice.

- On ne me la fait pas, à moi. Alors, je te repose ma question : comment s'appelle-t-il ?

- Tristam.

Maggie sourit en observant la jeune femme porter ses doigts à ses lèvres. Ses joues avaient rosi lorsqu'elle avait prononcé le nom de son amant et ses yeux s'étaient mis à briller d'une lueur neuve.

- Dis-moi ce qui te tracasse Lidia.

- Il n'y a rien qui me tracasse, enfin, s'écria-t-elle aussitôt, je vais très bien ! Je n'ai fait que me balader avec lui, nous avons discuté, et... Oh Maggie, et si j'avais mal fait ? S'il ne voulait plus jamais me revoir ?

Lidia pleurait et peinait à contrôler ses sanglots. La doyenne la prit dans ses bras et se mit à lui caresser les cheveux. Peu à peu, la jeune femme s'apaisa et sécha ses larmes.

- Pourquoi as-tu peur d'avoir déçu l'Elu de ton cœur, ma fille ?

Elle renifla, les yeux baissés.

- Je... il m'a embrassé et je ne...

Lidia sanglota de plus belle tandis que Maggie effaçait ses larmes de ses mains douces et ridées par le temps.

- C'était la première fois pour moi.

La doyenne eut peine à retenir son rire. Elle se rappelait de son propre affolement lorsqu'elle s'était faite embrasser pour la première fois. Mais elle se souvenait aussi des paroles qu'une femme aussi âgée qu'elle l'était aujourd'hui, lui avait dites pour la rassurer. Mot pour mot, Maggie s'en rappelait :

- C'est normal d'avoir peur, tu sais ? Allons, sèche tes larmes ma fille, ne t'inquiète pas. Sais-tu comment je sais que tu n'as rien fait de mal ?

Lidia secoua la tête en fixant Maggie qui lui souriait d'un air maternel.

- Tu te poses beaucoup de questions !

La jeune femme se laissa emporter par le rire contagieux de Maggie et soupira d'aise en sentant un poids énorme quitter ses épaules.

- J'étais dans le même état lorsque j'étais à ta place.

- Et comment tu as fait ?

- Eh bien, comme toi, j'ai été rassurée par une amie très chère qui avait déjà vécu cette situation.

Elles éclatèrent de rire en cœur et retournèrent dans l'atelier d'un pas joyeux. Leurs voix résonnèrent un moment dans le grand hall d'entrée puis s'éteignirent, continuant de tourner en boucle dans l'esprit d'une jeune femme aux longs cheveux blonds, recroquevillée derrière un rideau, en haut de l'escalier, des larmes plein les yeux.

***

Elijah n'avait plus vu sa femme de toute la journée. Elle n'était pas venue déjeuner et aucune de ses couturières ne l'avait vue dans l'atelier. L'heure du dîner approchant, Elijah se demandait si son épouse allait le rejoindre ou si elle allait continuer de s'affamer dans l'unique but de ne pas le voir. Tourmenté par le comportement inquiétant d'Elena, il s'assit à son bureau et commença à écrire.

Ma chère Elena,

Je me doute bien que tu n'as pas envie de me voir alors je t'écris cette lettre, dans l'espoir que tu la lises sans trembler. Ce qui s'est passé, cette nuit-là, est entièrement ma faute. J'ignore si tu sais pourquoi j'ai agi de la sorte mais quelle que soit la raison, ce que je t'ai fait reste impardonnable.

Ma douce Elena, si tu savais comme je m'en veux de t'avoir traitée comme ces filles qui ne pensent qu'à la richesse ! Je ne te demande pas de me pardonner mais j'espère que tu pourras accepter, un jour, de passer plus de temps en ma compagnie même si j'ai conscience que chaque minute, chaque heure passée à mes côtés est un supplice pour toi, j'ai bon espoir que tu puisses découvrir mon vrai visage. Cette facette de moi que j'aurais dû t'offrir dès le premier soir. Celle que tu as entrevue quand je t'ai embrassée pour la première fois...

Je tiens à toi, Elena. Ne l'oublie jamais.

Elijah

***

Elena reposa la lettre de son mari, les larmes aux yeux. Elle avait eu la surprise de voir le dîner livré dans sa chambre et de trouver cette belle lettre manuscrite dans un coin du plateau. Indy dormait dans son panier, au pied du lit de sa maitresse alors que celle-ci tardait à se coucher, relisant encore et encore les mots soigneusement choisis par Elijah. Finalement, elle s'allongea, le ventre plein et la tête remplie de questions. Comme le sommeil tardait à venir, Elena se leva et s'installa devant son bureau, une feuille blanche sous les yeux. Après une dizaine de tentatives, elle éclata en sanglots et écrivit une seule phrase. La question qui déchirait son âme depuis ce fameux soir :

« Pourquoi tu m'as fait ça ? »

Thifany- le sort d'une dynastieDove le storie prendono vita. Scoprilo ora