Second Chapitre.

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Lorsque j'ouvre les yeux, je mets plusieurs minutes à comprendre où je suis. En déglutissant, j'agite mes mains toujours encerclées de menottes solides. Je n'ai donc pas rêvé.
En me redressant avec un frisson, je fixe la porte de la pièce, et me surprends à imaginer qu'elle vole en éclats pour laisser entrer une lumière salvatrice. Mais rien...
Je soupire et pose les pieds au sol étirant mes bras. Hier soir, j'ai trouvé un moyen de défaire la chaîne souple qui liait les deux cercles autour de mes poignets, me laissant libre de mes mouvements. Reste que je ne peux toujours pas utiliser mes pouvoirs. Il va falloir que je comprenne comment détruire ces menottes.
Je traîne les pieds jusqu'à la salle de bains, et c'est la gorge serrée que je me déshabille. En observant mon visage livide et épuisé dans le petit miroir, je suis attristée de me rendre compte que mon regard a perdu tout éclat. Il faut que je me ressaisisse, absolument.

En sentant l'eau brûlante couler sur mon corps,  je souffle longuement et ferme les yeux. Je suis encore tendue et sale de la veille, et ma plaie à la clavicule est encore ouverte. Je grimace, et tente d'oublier, ne serait-ce qu'un instant, l'endroit et la situation. Il faut que je me ressaisisse, et je me le répéterai jusqu'à ce que ça marche. Ça va aller, je m'en sortirai, alors je peux supporter ça quelques temps. Je peux me permettre d'apprécier pour quelques minutes une douche réconfortante.

En sortant de la pièce, enroulée dans une serviette fine, je frémis, et me dirige vers l'armoire avec l'espoir d'y trouver des vêtements. Je ne peux pas remettre ceux d'hier, tachés de boue, de sueur et de sang, imprégnés de ce que je veux absolument oublier.
Et je trouve des vêtements. En observant les étagères remplies, je suis d'abord surprise, puis ravale mon étonnement. Il avait préparé mon arrivée, il avait prévu, après tout.
Après un instant d'hésitation, j'enfile une simple tenue noire, et prends une profonde inspiration, alors que je sens des gouttes d'eau gelée couler le long de ma nuque. En ramenant mes cheveux mouillés sur mon épaule, je m'approche de la porte pour tenter de l'ouvrir, poussée par un élan d'espoir absurde. Évidemment, c'est un échec.

Alors, pendant assez longtemps pour que j'en oublie la notion du temps, je fais les cent pas dans la chambres. Le cœur battant, je tourne en rond, respire et me roule sur le lit, torturant mon esprit. Mais je ne trouve aucune solution.

Pendant que je recommence à faire le tour dans la chambre en envisageant de me jeter simplement sur Jorah pour le vaincre, et m'insulte en un souffle pour mon idiotie, j'entends la porte grincer derrière moi et me retourne avec un saut. Un tremblement parcourt mes jambes quand je croise le regard de l'ancien roi d'Érédia, qui m'adresse un sourire sinistre.

— Bonjour Heaven, comment ça va ?

Je ne réponds pas, et me contente de faire un pas dans sa direction.

— Je vois que tu es déjà prête. Tu aimes les vêtements que je t'ai pris ? Ils sont à ta taille, c'est bien, je me doutais que tu avais à peu près la même corpulence que ta mère.

Un frisson remonte dans ma nuque, et je reste muette.

— Bon, eh bien tu vas pouvoir me suivre.

La mâchoire serrée, je reste clouée au sol alors que je croise le regard des deux elfes derrière Jorah. Alors, ce dernier agrippe mon bras et me tire hors de la pièce. Je lâche un hoquet étouffé lorsque je me retrouve dehors, sur un long balcon en bois qui surplombe les rues de haut. Je m'agrippe à la rampe, observant le paysage, bouche bée. Depuis ici, j'aperçois déjà le camp grouillant de monde plus bas, s'étendant au milieu des arbres qui se dressent tout autour. Directement agencé selon la place qu'offre la forêt, le village est fait de véritables bâtisses en bois et en matériaux solides, aménagées près du sol mais aussi dans les arbres, semblant utiliser tout ce que la forêt peut leur donner. Je ne m'attendais certainement pas à ça. J'imaginais, un peu naïvement sûrement, une petite tribu vivant dans des maisonnettes de bois et de terre, peu aménagées. Mais je me retrouve face à une très grande tribu, vivant dans une sorte de ville certes minuscule mais paraissant fonctionner aussi bien qu'Érédia.
Je déglutis. Alors c'est ça, le camp des Bannis.

Différente - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant