Chapitre 6 - Loïc

1.9K 124 9
                                    

Je baisse la tête vers mes pieds, déjà ensevelis sous cette eau bleue turquoise tiède et salée. Quand je relève les yeux vers mon meilleur pote, il me regarde encore. Comment vous dire que je suis plus que très mal à l'aise ?

"J'en sais rien...

- Tu me regardais mais tu ne sais pas pourquoi ?

- Ouais. Je sais pas ! T'étais devant moi, je t'ai regardé, et voilà ! Ça aurait très bien pu être Corey ou l'un des jumeaux. Mais c'était toi devant moi."

Je sais, moi, que je mens. Si cela aurait été un autre des gars je serais resté fixé sur l'écran lumineux qu'est mon téléphone. Mais je n'ai pas de raison précise à lui donner. Il... sur le coup il m'a... attiré. Ouais c'est ça, il m'a attiré physiquement, vendredi soir.

"Ok ! Ok. T'énerve pas."

Il part rejoindre les autres, me laissant seul devant cette immense étendue d'eau.

•••

On quitte la plage vers 10h30, pour aller prendre un deuxième bus, qui lui va nous emmener dans la rue de Tristan.

Là-bas, on enlève nos chaussures dans l'entrée, peinte en gris clair, presque blanc, et on les met dans le meuble à chaussures, pour ne pas salir la maison. Outre le fait d'être la meilleure cuisinière que je connaisse, la mère de Tristan est aussi la plus maniaque. Pire que moi pour le rangement !

On pose aussi nos sacs près des escaliers, et nos vestes, si fine ou épaisses soient-elles, sur le porte-manteau.

Irina arrive quelques minutes après nous, rentrant du lycée, car elle est en 1ère. Puis la petite dernière pointe le bout de son nez. Enfin, petite dernière... Elle n'a que trois ans de moins que nous.

Quand elle me voit elle m'embrasse la joue puis se gratte la nuque.

"Je... euh... merci pour l'autre soir.

- C'est rien.

- J'ai vraiment eu peur que... qu'il arrive à faire ce qu'il voulait me faire...

- Je ne l'aurai jamais laissé faire, Rach.

- Merci..."

On va tous se poser autour de la table, et j'évite le regard de Tristan, que je sens sur moi. Il n'a pas dû me croire tout à l'heure, et le connaissant, il fera tout ce qui lui est possible pour me tirer les vers du nez.

On mange. Toute la tablée parle, mais moi je préfère regarder mon assiette, dans laquelle ma fourchette s'amuse avec mes petits pois.

•••

Après le repas, alors que les autres veulent retourner au lycée tout de suite, Tristan me retient. Dans son regard, je comprends que je vais passer à l'interrogatoire. Youpi...

"Allez-y, on vous rejoindra juste avant le cours.

- Ok..., souffle Corey."

Tous les deux, on monte dans sa chambre et il ferme la porte à clé, certainement pour éviter d'être dérangés dans notre discussion. Assis sur son lit tous les deux, on se regarde.

"Alors ?

- Alors quoi ?, je feins l'innocence .

- Écoute Loïc, t'es mon meilleur pote depuis qu'on a cinq ans ! Tu peux tout me dire. On a une règle tous les deux : on se dit tout ! C'est que sur ça, la vérité, que marche notre amitié."

Notre amitié... La vérité... Dire la vérité ? Lui dire qu'il me plait plus qu'il ne le devrait ? Que je suis attiré par lui, un garçon, mais encore plus, lui, mon meilleur ami ? Je ne pense pas que se soit une bonne idée, mais en même temps... Je n'aime pas mentir. Je déteste ça !

"Je ne peux pas.

- Tu ne veux pas où tu ne peux pas ?

- Les deux. Je ne veux pas le dire parce que c'est trop tôt pour le faire, et je ne peux pas parce que j'ai peur de ce qu'il se passera suite à ma révélation.

- Mais putain Loïc ! Moi je te dis tout, même quand j'ai peur de ta réaction ! Et ça c'est parce que j'ai confiance en toi. T'as pas confiance, c'est ça ? 

- Si... bien-sûr que si. Mais c'est trop compliqué dans ma tête...

- T'as mis une fille en cloque ?

- Quoi !? Nan !"

Il est complètent à côté. Je pense être gay, et il me parle d'une grossesse potentielle. Il est loin du compte...

"Je... j'arrive pas... J'arrive pas à en parler. Je suis désolé."

Je sors de la chambre, puis de la maison après avoir récupéré mes affaires et remis mes chaussures. Je ne peux pas aller en cours cette après-midi, j'ai besoin de réfléchir.

J'arrive chez moi, et suis content de voir que mes pères ne sont pas là, mais bien au travail. Je monte dans mon antre et ferme à clé.

Allongé sur mon lit, en caleçon, les bras derrière la tête, je fixe le plafond gris de la pièce.

J'aime bien Tristan, je l'adore, on a fait les quatre cent coups ensemble, on a dragué des filles en soirée ensemble, on a pissé ensemble. A l'heure d'aujourd'hui et au jour d'aujourd'hui, je dirais qu'on a tout fait ensemble. Tout dans le domaine de l'amitié, je veux dire.

Je ne sais pas pourquoi j'ai cette soudaine attirance pour lui. C'est vrai quoi, je l'ai toujours trouvé beau, séduisant, intelligent, drôle, et parfois lourd, mais tout le monde analyse ses amis comme ça. Enfin, je pense.

Mais c'est vrai que depuis vendredi, le soir de la fête, je le regarde plus en détail. La courbe de ses lèvres, son nez pas trop grand ni trop petit, ses cheveux bruns foncés lisses. Tout en lui est beau, enclin à l'attirance.

Je suis perdu dans ce que je ressens comme un jeune ado avant de passer à l'action pour la première fois !

Je crois... Que je suis gay... Where stories live. Discover now